HomeA la uneNOUVEL ATTENTAT MEURTRIER EN TUNISIE : Les choses se compliquent pour Essebsi

NOUVEL ATTENTAT MEURTRIER EN TUNISIE : Les choses se compliquent pour Essebsi


 

Le vendredi 26 juin, la Tunisie a été frappée de plein fouet par un attentat terroriste meurtrier. C’est le deuxième du genre, depuis l’accession de Béji Caïd Essebsi au pouvoir. Le premier, on s’en souvient, avait été dirigé contre le musée du Bardo de Tunis, en mars dernier, avec un bilan de 22 morts. Cette fois-ci, l’on déplore 38 morts, tous sauvagement tués alors qu’ils se bronzaient sur la plage d’un hôtel de la ville de Sousse, un des hauts lieux du tourisme tunisien. L’auteur  de ce massacre est un étudiant tunisien qui s’était fait passer  pour un touriste. Cette attaque, tout comme celle du musée du Bardo, a été revendiquée par l’Etat islamique (EI). Cette nébuleuse dont la communauté internationale semble n’avoir pas pris suffisamment la juste mesure de la dangerosité, est en train de  monter en puissance en termes d’occupation du terrain et de fascination qu’elle exerce notamment sur la jeunesse de bien des pays.

Essebsi avait hérité d’un pays en ruines

 L’EI est d’autant plus à l’aise dans ce rôle qu’il a affaire à une jeunesse à laquelle les pouvoirs publics n’offrent aucune perspective allant dans le sens de son épanouissement. C’est pourquoi l’on ne doit pas craindre de dire que l’attaque meurtrière de Sousse risque de ne pas être la dernière, tant que le pouvoir tunisien ne va pas prendre à bras-le-corps les préoccupations existentielles de sa jeunesse. Ce qui semble manifestement n’être pas le cas aujourd’hui. Dans ces conditions, l’on peut parier que les mesures sécuritaires déjà prises et celles qui sont en train d’être envisagées à l’effet de susciter la confiance des touristes qui, faut-il le rappeler, ont un faible pour  les belles plages tunisiennes, ont de fortes chances de passer à côté de la plaque, pour la simple raison que, comme le dit un adage populaire d’Afrique au Sud du Sahara, « Cabri mort n’a pas peur de couteau ». Et le moins que l’on puisse dire à propos des jeunes Tunisiens, est que la plupart sont des « cabris morts ». Pourquoi auraient-ils alors peur d’un couteau ? Ce n’est donc pas le fait d’installer sur chaque site touristique, une unité militaire, ni de fermer les mosquées clandestines qui distillent à longueur de journée leur message satanique à de milliers de désœuvrés tunisiens qui écument les rues du pays, le parchemin sous le bras en quête de travail, qui vont mettre la Tunisie à l’abri de toute attaque terroriste. Essebsi devra donc, dans sa riposte au péril djihadiste, se poser les bonnes questions, si tant est sa volonté de lui apporter des réponses appropriées. Ces bonnes questions sont en rapport avec la problématique du chômage des jeunes en particulier et la relance de l’économie du pays en général. La révolution tunisienne a certes débarrassé le pays du satrape Ben Ali, mais elle n’a pas pu apporter les réponses qu’il fallait aux nombreuses préoccupations des populations. L’on peut même dire que la situation économique s’est dégradée davantage sous la transition démocratique. Essebsi avait donc hérité d’un pays en ruines. Et les attaques terroristes meurtrières dont les cibles sont les sites touristiques les plus emblématiques du pays, n’augurent rien de bon pour la Tunisie.

La situation de la Tunisie est complexe

Les choses se compliquent donc pour Béji Caïd Essebsi à qui les Tunisiens avaient massivement accordé leurs suffrages, dans l’espoir que celui-ci répondrait mieux à  leurs aspirations que les autres prétendants à la dernière présidentielle. Et, de toute apparence, ce n’est pas demain la veille que l’on pourra assister à un début de réponse à ces aspirations. Car les ennemis de la démocratie tunisienne se retrouvent à la fois à l’intérieur et à l’extérieur du pays. A l’intérieur, il s’agit de tous ceux qui voient d’un mauvais œil les valeurs de laïcité portées par la démocratie. A l’extérieur, ce sont les tenants de l’idéologie rigoriste prônée par l’EI et AQMI (Al Qaïda au Maghreb islamique). Tous semblent  avoir mis un point d’honneur à ne pas permettre à l’expérience démocratique en cours au pays de Bourguiba, de faire des émules dans le monde arabo-musulman. Et le meilleur moyen pour y arriver est de s’attaquer à un des piliers de l’économie tunisienne, c’est-à-dire le tourisme. Et ce ne sont pas les bras qui vont manquer pour poser des actes susceptibles d’installer la psychose et la terreur dans le pays, à l’effet de dissuader  les touristes de l’Occident repu et « mécréants», de « souiller » les terres arabes,  surtout en cette période de jeûne. Ceux qui ont armé les bras de l’étudiant tunisien et qui l’ont gavé de leur idéologie funeste, savent qu’ils peuvent toujours compter sur le fait que la Tunisie regorge de milliers de jeunes acquis à la cause du djihadisme, pour avoir bénéficié d’une immersion en Syrie et en Irak aux côtés de l’EI. La situation de la Tunisie est d’autant plus complexe qu’elle a à sa porte, l’un des foyers les plus ardents du djihadisme, c’est-à-dire la Libye. C’est pourquoi il serait illusoire de croire que la lutte contre les attaques terroristes d’inspiration islamiste peut porter des fruits, si le gouvernement d’Essebsi se contente de faire le ménage à l’intérieur de la Tunisie. Cet effort domestique doit s’intégrer dans une politique globale portée par le monde entier. Essebsi a rappelé d’ailleurs cet impératif à la communauté internationale. La question se pose alors de savoir s’il sera entendu. Pour le moment, seules les condamnations de principe de la boucherie de Sousse sont à l’ordre du jour.

« Le Pays »


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