HomeDroit dans les yeuxNOUVELLE DIRECTION DU CDP : Vrai changement ou saupoudrage ?

NOUVELLE DIRECTION DU CDP : Vrai changement ou saupoudrage ?


Porté sur les fonts baptismaux en février 1996, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) avait pour ambition de rassembler les énergies politiques pour gérer le pouvoir d’Etat, conformément à la doctrine de la social-démocratie. Depuis lors, ce parti était aux manettes de l’Etat jusqu’aux événements des 30 et 31 octobre derniers. Pendant tout le temps où il était aux affaires, le CDP s’est notamment adonné au culte de la personnalité de Blaise Compaoré, au point d’arriver à se faire la conviction que sans ce dernier, il n’y a point de salut ni pour le parti ni pour le Burkina. De ce fait, il avait fait feu de tout bois pour l’accompagner dans sa volonté de mettre à exécution son plan de s’éterniser au pouvoir, quitte à précipiter son pays dans l’abîme. La suite est connue. Le peuple burkinabè s’est insurgé les 30 et 31 octobre derniers pour lui barrer la route et le contraindre à l’exil. Dans la foulée, une trentaine de morts et de nombreux blessés ont été enregistrés. Le 6e congrès ordinaire du CDP, qui a refermé ses portes le dimanche 10 mai 2015 dernier, est intervenu dans ce nouveau contexte politique. Il a été marqué par le renouvellement de ses instances dirigeantes avec désormais à sa tête Eddie Komboïgo, secondé par 11 vice-présidents. L’autre fait marquant est la mise en place d’un haut conseil national au sein duquel l’on note la présence de Blaise Compaoré, François Compaoré, Soungalo Apollinaire Ouattara, Naboho Kanidoua, Luc Adolphe Tiao, Assimi Kouanda, Paramanga Ernest Yonli, Alain Yoda, etc. A en croire le nouveau patron du parti, Eddie Komboïgo, le CDP s’inscrit dans le changement et il l’a dit en des termes qui ne souffrent d’aucune ambiguïté : « Notre parti avait besoin d’une véritable révolution pour se donner une nouvelle image. Au CDP, plus rien n’entravera la marche républicaine et démocratique de notre parti ». L’on peut décrypter ces propos de la manière suivante. L’insurrection des 30 et 31 octobre derniers a fait du bien au CDP.
En effet, sans ces événements, Eddie Komboïgo n’aurait jamais eu l’opportunité, même dans ses rêves, de dire que le CDP n’était ni républicain ni démocratique. Certes, il ne l’a pas dit en ces termes, mais c’est comme si.
La question que l’on peut se poser aujourd’hui est de savoir si la nouvelle équipe dirigeante peut véritablement inscrire le CDP dans la voie du changement.

Le CDP ne peut pas se passer de la vieille garde

L’on peut en douter, pour les raisons suivantes. D’abord, le choix de la personne d’Eddie Komboïgo permet d’être sceptique quant à la volonté du CDP d’opérer sa mue. En effet, si l’on en croit les langues fendues au mauvais endroit, l’homme aurait des accointances très fortes avec les templiers du système Compaoré. D’autres indiscrétions soutiennent l’idée selon laquelle, il en est lui-même un et pas des moindres. Si cela est avéré, on le voit mal opérer la mue du CDP. Car, comment peut-il réussir dans ces conditions, à avoir les coudées franches pour le faire ? Cette question semble d’autant plus pertinente que l’on sait que ceux qui percevaient le CDP comme leur chose à eux, se trouvaient justement au sein de ces templiers. Ce sont eux notamment qui ont travaillé méthodiquement à vider le parti de sa substance pour en faire in fine un instrument au service exclusif de la promotion de leurs intérêts et de ceux de Blaise Compaoré. Le changement du CDP, de toute évidence, doit se faire, s’il veut être décisif, contre tout ce monde qui gravitait autour de la galaxie Compaoré et qui n’a pas manqué, pour préserver son bifteck, de convaincre Blaise Compaoré de tripatouiller la Constitution pour s’accrocher au pouvoir. Eddie Komboïgo et son équipe risquent d’être dans l’incapacité de délester le CDP de ces gens pour lesquels le parti n’était qu’un marchepied vers la gloire et la fortune.
Ensuite, le fait d’avoir mis en place le haut conseil national au sein duquel l’on retrouve des personnalités dont la responsabilité ne peut être discutée dans la survenue des événements douloureux des 30 et 31 octobre 2014 derniers, est un signe qui ne trompe pas. Car, il traduit simplement le fait que le CDP ne peut pas se passer de la vieille garde. C’est pourquoi l’on peut affirmer sans gros risque de se tromper, qu’en lieu et place du changement professé, l’on a simplement fait du saupoudrage. Une réelle volonté de changement aurait consisté, pour le CDP, à faire d’abord le bilan critique et sans complaisance des 27 ans de règne de Blaise Compaoré. Un tel exercice lui aurait permis de mettre en évidence non seulement les zones de lumière, mais aussi et surtout les zones d’ombres. Cela lui aurait permis de battre sa coulpe et de s’inscrire de ce fait dans la nécessaire réconciliation nationale dont il a tout à gagner. Ce faisant, il aurait apporté la preuve qu’il a grandi et que plus rien ne se passera désormais en son sein comme de par le passé. L’on se rappelle qu’en 1987, Blaise Compaoré et ses camarades du Front populaire avaient procédé à une analyse critique des 4 ans de révolution à laquelle ils avaient participé, à l’effet de rectifier les choses. Qu’est-ce qui a empêché le CDP de se livrer à cet exercice ?
Si bien qu’on s’interroge sur sa réelle volonté de faire dans la rupture. Pour toutes ces raisons, l’on ne doit pas craindre de dire que le CDP gagnerait à s’adapter à la nouvelle donne politique et à faire acte de contrition pour l’ensemble des préjudices qu’il a pu commettre contre les intérêts supérieurs du Burkina.

Sidzabda


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