HomeA la uneNOUVELLE DU VENDREDI : Broutilles et causes de divorce au pays des Hommes intègres

NOUVELLE DU VENDREDI : Broutilles et causes de divorce au pays des Hommes intègres


Dans le confort d’une villa cossue de la capitale. Dans un quartier résidentiel avec son luxe, son calme et son abondance. Un beau matin dans la salle de bain au carrelage étincelant de parfum de marque et de  propreté.

C’est tout d’abord un tube banal de dentifrice qui sera à l’origine de notre histoire. Ne dit-on pas souvent que l’irréparable est le fruit du banal ?

Un simple tube de dentifrice ordinaire qu’utilisent quotidiennement et en commun des millions de couples chaque matin et soir à travers le monde.

Sans faire de publicité de marque ou  de cabinets dentaires. Ce n’est plus un secret pour personne au pays des Hommes intègres et à travers l’Afrique profonde. Se brosser les dents est devenu un geste ordinaire. L’hygiène buccale est inscrite désormais dans nos habitudes. Il faut bien prendre soin de ses dents. Pour notre santé.

Revenons à notre tube dentifrice du jour.

Ce matin là, monsieur est le premier dans la salle de bain.  Et, scandale !

Pour la énième fois madame a utilisé le tube dentifrice comme monsieur le déteste vraiment, dont monsieur a horreur. Et grandement horreur ! Madame une fois encore, en se brossant les dents la nuit avant de se coucher, s’est permise de pousser le tube par le milieu. Une chose que monsieur déteste. Voir son dentifrice poussé par le milieu peut pourrir la journée de monsieur.  C’est une chose anodine pour certains mais pour monsieur c’est pourtant capital.

Depuis l’adolescence, le dentifrice de monsieur se pousse au bout, à l’extrémité ; avec respect. C’est un principe. Une raison de vivre pour monsieur.

Cette fois, trop c’est trop !

Madame dans ses draps est réveillée pour explication. Et madame après un dossier traité tard dans la nuit ne peut concevoir un tel manquement de savoir-vivre. Juste pour un dentifrice ? Et madame déteste une chose dans sa vie. Le réveil brusque. La douceur du rêve à la violence. Voilà une chose que madame ne peut accepter. Et, pour la énième fois, madame le fait remarquer à monsieur.

Comme des flèches empoisonneuses les mots pleuvent. Du salon, à la salle de bain. De la terrasse à la voiture en claquant les portes.

Et comble de l’ironie. Ce n’est pas une simple dispute d’amoureux sans lendemain vite étouffée sous les draps et les caresses. C’est une bataille d’éléphants. Les témoins du mariage assistent impuissants, les familles tentent vainement de recoller les morceaux. Les avocats et le juge osent l’impossible. Après des années de rencontres et médiations, il faut accepter l’évidence. Le divorce  est prononcé pour incompatibilité d’humeur.

En lisant cette histoire, nombreux sont ceux qui souriront en se disant :

– Quand même ! Ils exagèrent souvent les écrivains en dessinant la réalité dans leur page.  Comment peut-on divorcer pour la simple et très simple manière d’utiliser un tube dentifrice ?

Détrompez-vous ! De nos jours, au besoin on se marie pour un tout et pour un  rien. Au besoin, on divorce pour un tout et pour un rien. C’est la nouvelle tendance au Burkina Faso dans l’ère de la modernité africaine.

Pour trouver le  lien du meilleur et du pire des engagements traditionnels et religieux de nos pères, il faut creuser dans l’intimité profonde des couples.

Faites un tour dans un cabinet d’avocat. Intéressez-vous aux causes de divorces au Faso actuel et vous tombez des nues. Les causes de divorces deviennent de plus en plus originales. Pour ne pas dire des broutilles. Fini les différents ingérables de l’infidélité, coups et blessures, atteinte à la vie de l’autre, empoisonnement et autres délits majeurs dans le vieux couple africain.  

Si au Faso le taux de l’espérance de vie s’améliore par la qualité de nos soignants, l’espérance de vie des couples modernes est en chute libre.

D’un côté il y a ceux ou celles qui cachent la vraie raison, refusent ou rejettent en bloc cette philosophie des sages de la grande savane de Dunia :

 

Vivre à deux, c’est se comprendre, se pardonner et s’accepter.

 

Et de l’autre côté il y a ceux ou celles qui pensent avoir trouvé meilleur, hélas ailleurs juste après le mariage. Il ou elle s’en mord le doigt. Alors on invente pour simplement se débarrasser de l’autre.

Au pire il faut créer un environnement malsain et invivable dans le bassin des provocations. Des éclaboussures pour  pousser l’autre dans ces derniers retranchements. L’amener par des coups bien assenés à tomber dans le piège voulu par un geste de désespoir ou de défense. Un acte que l’autre exploitera diaboliquement et machiavéliquement à son profit. Il ou elle se lavera ainsi les mains et la conscience en s’excusant.

– Tu l’auras voulu ! Trop c’est trop. Voyez vous-même !

Jadis  nos aînés considéraient le divorce comme un échec à deux.  Un échec à se  mettre en cause. Et parfois comme le sien propre en cherchant par où on a failli. Comment réparer avec l’autre en s’améliorant ?

On avait honte de dire :

– Je suis divorcé(e).

Ça se chuchotait, ça se murmurait, ça se confiait !

De nos jours le dire frôle la fierté.

– Tu sais, je suis divorcé(e) et  libre ! Hourra !

Ça se chante, ça se clame, ça se  hurle sur les toits et dans la rue.

On a oublié que le mariage, à voir la mobilisation des familles, des amis, des voisins, des religieux, des sages, est une chose très sérieuse. Très sérieuse à considérer et à  reconsidérer à sa juste valeur. Un serment et un don de soi.  Des concessions et encore des concessions dans un plat de tolérance.

Et si le mariage n’était pas une simple chose à ficeler et à déficeler à loisir. Et si le mariage n’était plus cette simple chose à s’engager et à se désengager  à volonté  par des humeurs et des égos égoïstes sans fondement.

Et si on reconsidérait le geste à la mosquée, à l’église, au temple, à la mairie ou dans la case sacrée des ancêtres.

Ce sera beau ! Vous ne trouvez pas ?

Ainsi sans tomber aveuglément dans le revers de la modernité nous sauverons peut-être  l’essentiel.

 

Ousseni NIKIEMA

70 13 25 96

[email protected]

 

 

 


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