HomeOmbre et lumièreLA NOUVELLE DU VENDREDI : Braquage à la ouagalaise

LA NOUVELLE DU VENDREDI : Braquage à la ouagalaise


C’est par une nuit ordinaire de décembre au Faso. Une nuit ordinaire dans le quotidien d’une maison discrète. Un lieu toléré par  la société et fermement condamné sans rappel par la morale universelle. Une maison dite de tolérance par les puristes de la langue. Une maison dite de passage par les plus tolérants.

En cette nuit cousue de décembre dans un tel lieu au pays des Hommes intègres. L’ambiance est chaude et discrète par l’arrivée des couples. Des couples rasant les murs dès leur sortie de voiture ou descente de moto. Des hommes et femmes s’évaporant comme des ombres dans ce genre d’endroit où la lumière est ennemie.  Et le sombre allié efficace et complice.

Il est 22h dans ce lieu ; ce lieu où le silence est roi et l’obscurité triomphe en  reine indétrônable.  Il est 22h et juste quelques habitués inaugurant impatiemment la scène, lorsqu’arriva dans une voiture grise deux hommes et deux femmes. Par leur aisance,  on notera pour les archives qu’ils sont incontestablement des habitués connaissant parfaitement le lieu, le service et surtout les codes.

Depuis leur entrée dans ce lieu, les couples entraient mais personne ne sortait. Les motos par le silencieux parkeur du soir qui ouvrait, entraient discrètement dans la cour et restaient plus que d’habitude.

Les voitures stationnées à l’entrée grossissaient à vue d’œil.  Et les occupants à l’intérieur prenaient plus de temps que d’ordinaire. Et le monde de la nuit grossissait en cette heure nocturne dans ce lieu où l’honnêteté est la dernière chose à venir  y chercher.

23h, 24h, 1h, vers 2h du matin, les occupants de la voiture grise, les deux hommes et les deux femmes ressortirent, tenant de gros sacs,  tranquillement s’en allèrent.

Les derniers couples noctambules voulant profiter du lieu constatèrent que tout était fermé et pourtant des motos à l’intérieur de la cour et des voitures devant la porte expliquaient le bon fonctionnement de l’endroit. Un fait intriguait cependant. L’absence du  gérant des lieux toujours au guet et partout et le parkeur toujours vif et discret. Redoutant le pire, les noctambules alertèrent la police, tout en prenant soins de filer par précaution avant leur arrivée.

Une fois sur place, la police constata les faits :

du  travail de professionnels. Méticuleux et sans casse. Un braquage de la bonne école du milieu. Un braquage à la ouagalaise en vogue depuis quelques semaines. Une nouvelle formule bien élaborée par le milieu que découvre à présent la police.  Sur la scène du crime, les victimes du jour ou du soir, les couples souvent officieux, hommes et femmes, tous nus comme des vers de terre dans un local et les vêtements dans un autre lieu tentaient vainement de cacher ce qui reste. Scène frisant le ridicule et la bassesse humaine.

Portefeuilles, portables, montres, bijoux, fouille méticuleuse des voitures, tous les objets précieux étaient partis avec les occupants de la voiture grise.

Pour le constat, les agents de police enregistrèrent les formalités d’usages. Noms, prénoms et adresses des victimes. Des victimes tous pressées de donner des patronymes d’emprunts, des faux noms pour la plupart et des numéros inexistants. Toutes les victimes se hâtèrent d’enfiler un vêtement ou le sien ou celui d’un autre, peu importe. Et surtout  de filer comme des ombres se fondre dans la nuit restante.  

Et le comble dans cette histoire de braquage à la ouagalaise dans un lieu de tolérance, aucune victime n’a porté plainte. Le bide pour les braves policiers et du pain béni pour les coupables.

 Et mon cousin plein d’humour qui me relata les faits, s’étranglant de rire, de souligner :

– Tu sais,  l’oncle de ma femme, cette même nuit dans un restaurant de la place, s’est fait voler son portable et son portefeuille avec. Et comble d’ironie, il a aussi perdu les clés de sa voiture à 22h cette même nuit, pour les retrouver miraculeusement vers 3h du matin. Il y a des soirs où rien ne va. Vraiment rien. Des soirs où mieux vaut rester chez soi, devant la télé et avec sa titulaire.  Et l’oncle de ma femme, bon vivant, préfère tout confier au destin sans porter plainte à la police. Un sage homme, l’oncle de ma femme. 

 Et, c’est pour cette raison  que notre histoire du jour  s’arrêta là.

 

Ousséni Nikiema

70-13-25-96

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