HomeA la uneLA NOUVELLE DU VENDREDI : Le pèlerin de la savane de Dunia

LA NOUVELLE DU VENDREDI : Le pèlerin de la savane de Dunia


Dans la solitude nocturne, le pèlerin de la grande savane de Dunia se couche sur sa natte de fortune. Le visage scrutant le ciel, par la pensée, il voyage à travers les étoiles. Des mots, inspirés par la contemplation des astres visitent son cœur. Il médite :

– Comment améliorer son rendement professionnel ?

– Comment récolter des graines pures pour la survie des siens ?

– Comment vivre avec son prochain selon les règles de la morale ?

– Comment donner le coup de peigne quotidien à son manteau spirituel ?

– Comment réussir sans détruire ?

Le pèlerin de Dunia rejoint la patrie des songes en s’imprégnant des meilleures intentions du monde.

A la lueur de l’aube, le voyageur de la savane se réveille. Il grignote une galette salée pour s’armer d’une dose d’énergie. Sur le chemin, il avance le pas en monologuant :

– Comment aider, défendre la veuve et l’orphelin ?

– Comment secourir la sœur, le frère, le voisin, l’ami, le collègue en détresse ?

 – Comment briser la chaîne de l’esclave, libérer le pitoyable du vice ?

– Comment apporter le salut à son semblable ?

Pendant que le laboureur de la grande savane besogne ardemment sous le soleil du Mogho, implorant le meilleur pour son prochain, des yeux dans l’obscurité le condamnent. Des mains invisibles déterrent ses semences. Les graines qu’il a peiné pour obtenir. Dans l’ombre, des doigts meurtriers écrasent cruellement ses bourgeons.  Par méchanceté, on jette des épines sur le chemin que sa sueur et son labeur ont balayé. On agit pour détruire les racines prometteuses de ses plantes.

Quelle injustice ! Triste réalité.

Il n’y a pas de mépris sans raison. La méchanceté n’est jamais gratuite. Elle à une source, une motivation. Susciter de la jalousie est une preuve formelle que l’on chemine sur une voie d’avenir. Conscient de cela, le travailleur de la savane concentre toute son énergie sur sa tâche.

Lorsque le pèlerin de la grande savane de Dunia découvre avec stupéfaction ses semences piétinées, ses fleurs écrasées, il s’attriste, peine et pardonne. Il verse des larmes pour le sacrifice, pour l’effort, pour l’espoir gaspillé par ignorance.

Sans haine, il reprend son travail. Doté par la nature d’un optimisme inébranlable, le pèlerin du pays des Hommes intègres est flexible.     

Il plie, mais ne rompe point.

L’explorateur de la savane est souvent affligé par les choses impropres étiquetées à son image. Il est chagriné par les langues mensongères qui écorchent son âme par malveillance.

Sous les croche-pieds,  il trébuche. Il  tombe sous les tacles de malignités. Automatiquement, il se relève pour continuer son chemin. Sans aversion.

Les adeptes de l’ombre qui manigancent pour sa perdition ignorent sciemment ses qualités. Pour lui nuire, ils se focalisent sur ses défauts.

Sur le ring de la vie, le lutteur de la savane encaisse les coups, il titube, chancelle, trouve son souffle entre les rounds en s’accrochant aux cordes. Dans le combat, il puise sa source d’énergie dans l’amour de son prochain. Il lutte pour le regard de l’exclu, pour l’éprouvé(e). Il se bat pour le malade en détresse, pour l’infirme affligé. Pour eux, jamais, il ne jettera l’éponge. Quand il perd, c’est dans la dignité. Il dédie ses victoires aux autres.

Dans sa marche, le pèlerin du Mogho accepte de porter le fardeau d’autrui, il traîne sa propre croix avec sagesse. Il saigne dans sa chair que sa générosité soit mal interprétée. Il souffre dans son for intérieur que son message soit altéré, ses actes déviés de l’objectif. Il peine sous les flèches de l’ignorance, de l’incompréhension, de l’hypocrisie.

Le bâtisseur de la savane est un fonceur, un solitaire dans l’univers de ses méditations. Il vit au milieu des autres, avec les autres, souvent sans les autres.

Dans la solitude nocturne, le pèlerin de la grande savane de Dunia se lève. Il se prosterne et prie :

– N’Soba le créateur, maître de l’univers !

Je t’implore de guider mes pas dans la lumière et dans les ténèbres. Qu’aucune épreuve ne me détourne de ton adoration. Faites, mon Dieu, que j’accepte ce qui émane de Votre volonté, ce qui s’exhale de l’homme, ce qui provient de la femme, en bon et en mauvais.

Seigneur, que Ton amour grandisse en moi ! Que je les aime tous ! Amen !                                                                                  

 

Ousseni Nikièma, Langage de sourds

[email protected]

70-13-25-96

 

 

 


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