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OUVERTURE DE LA CAMPAGNE ELECTORALE AU CAMEROUN


 Paul Biya contre Paul Biya

Le ‘’kick-off’’ de la campagne électorale a été donné hier au ‘’Biyaroun’’, pardon, au Cameroun par la commission en charge de l’organisation de l’élection présidentielle prévue pour le 7 octobre prochain. Ce sont 9 candidats au total, qui iront, en théorie en tout cas, à la rencontre des 7 millions de Camerounais inscrits sur les listes électorales, mais c’est un seul qui va l’emporter et ce, dès le premier round, le scrutin étant uninominal majoritaire à un seul tour. Parmi les prétendants à la magistrature suprême, il y a évidemment l’inamovible candidat à sa propre succession, Paul Biya, mais il y a également Joshua Osih du Social Democratic Front, Cabral libii dont la candidature est portée par l’Union nationale pour l’intégration vers la solidarité, Akere Muna, ex vice-président mondial de Transparency International, sans oublier le patriarche et éternel ‘’looser’’,  Adamou Ndam Njoya qui avait participé aux trois derniers scrutins et les avait tous perdus face à l’actuel président. Cette année encore, avec, ou plutôt à cause de la multitude de candidatures des partis dits de l’opposition, on assistera à une élection sans enjeu majeur, puisque ce sera à coup sûr du « Biya contre Biya », comme cela a toujours été le cas depuis l’accession au pouvoir de l’actuel  chef de l’Etat, le 4 novembre 1982. Et il en sera malheureusement ainsi, aussi longtemps que les Camerounais s’accommoderont de ce président valétudinaire, plus visible dans les couloirs de l’hôtel intercontinental de Genève qu’au palais présidentiel d’Etoudi et qui n’aurait présidé les conseils de ministres qu’une dizaine de fois seulement, en 36 ans de règne. On se demande légitimement comment, dans ces conditions, il arrive à gérer ce pays « truffé » d’intellectuels de haut vol, prompts à descendre en flammes les chefs d’Etat mégalomanes et autoritaires des autres pays.

Le Cameroun est une véritable curiosité démocratique

Est-ce parce qu’il est magnanime envers ceux qui pourraient lorgner son trône, ou bien au contraire, parce qu’il est particulièrement cruel envers ces derniers ? Est-il un manipulateur d’hommes hors pair ou simplement un homme de consensus, qui sait écouter et agir dans l’intérêt supérieur du Cameroun ? Il y a probablement un dosage méticuleux de tout cela, et ce cocktail sulfureux suffit à anéantir une opposition politique très encline à toutes sortes de marchandages sordides, rien que pour satisfaire des intérêts égoïstes et financiers. Conséquence, le président Biya va encore et presqu’en roue libre prolonger son bail de 7 longues années au terme desquelles il fêtera, si Dieu continue de lui prêter vie, ses 92 ans bien sonnés. C’est, quoi qu’il arrive, du gâchis pour ce grand pays qu’est le Cameroun, et c’est d’autant plus regrettable que de jeunes leaders aux discours novateurs comme Cabral Libii et Joshua Osih, seront laminés par un Paul Biya omnipotent et jupitérien, qui rêve de mourir en ayant toujours les babioles du pouvoir en bandoulière et ce, grâce à la complicité active ou passive d’électeurs légitimistes et fatalistes.  Pourtant, le Cameroun mérite mieux que ça, et il lui faudra peut-être une révolution copernicienne pour voir enfin l’avènement d’une nouvelle race d’hommes politiques lucides, courageux et intègres, à même de faire face aux nouveaux et nombreux défis, comme la sécurisation des régions du nord-ouest du pays en butte aux attaques des islamistes de Boko Haram, du nord-ouest et du sud-ouest où la vie est rythmée, depuis octobre dernier, par des attentats au cocktail Molotov et à la bombe, attribués aux séparatistes anglophones.  C’est donc l’unité nationale même du pays qui est plus que jamais mise en péril, et les arguments ne manqueront pas aux autres candidats pour tacler l’insatiable Biya au cours de la campagne électorale en cours. Seulement voilà, la soif d’alternance des Camerounais  n’a pas pu venir à bout des égo surdimensionnés des candidats de l’opposition, et c’est en rangs dispersés et avec des chances quasiment nulles de l’emporter, que cette dernière va encore à la conquête du pouvoir d’Etat, au grand bonheur du plus vieux chef d’Etat en exercice au monde, après le tunisien Beji Caïd Essebsi (92 ans) et le Koweitien Cheick Sabah Al Ahmad (89 ans). Il ne reste plus qu’à souhaiter bonne fin de règne…à vie à Paul Biya qui ne prendra même pas la peine de battre campagne ni de s’adresser aux électeurs. Sur ces deux points, Biya dispose de nègres de service qui font preuve d’un zèle hors du commun. Sous cet angle, le Cameroun est une véritable curiosité démocratique, le seul pays en Afrique, où le chef de l’Etat, qui, officiellement, a bon pied bon œil, ne sort pas du cadre douillet du palais présidentiel  pour battre campagne et s’adresse aux électeurs par procuration. Sacré Cameroun !

Hamadou GADIAGA


Comments
  • Beaucoup d’analystes politiques se trompent depuis le début et ne voit pas venir le candidat Cabral Libii. Il risque surprendre plus d’un.

    23 septembre 2018

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