HomeA la unePRESIDENTIELLE BURUNDAISE : Les comportements suspects de l’opposition

PRESIDENTIELLE BURUNDAISE : Les comportements suspects de l’opposition


Envers et contre tous, Pierre NKurunziza a organisé sa présidentielle, hier 21 juillet 2015. Le climat d’insécurité que vit le Burundi n’a pas suffi à le dissuader. En effet, peu avant l’ouverture officielle des bureaux de vote, des explosions et des tirs ont été entendus dans la capitale Bujumbura, dans la nuit de lundi à mardi, avec pour conséquences des morts et des blessés. Tout cela, le pouvoir burundais n’en a eu cure, allant même jusqu’à abuser de superlatifs pour tenter de légitimer sa mascarade électorale ; une manière d’expier sa forfaiture.

Au-delà du jusqu’au-boutisme de NKurunziza, on en vient à s’interroger sur les comportements de certains opposants. En effet, les candidats accompagnateurs de NKurunziza sont l’ancien diplomate Gérard Nduwayo de l’Uprona, Jacques Bigirimana du FNL et Jean de Dieu Mutabazi de la Coalition des partis politiques pour une opposition participative (COPA). Ceux-là sont proches du pouvoir et leur participation aux élections n’a rien de surprenant. Mais ce qui est intriguant, c’est l’attitude de trois opposants candidats, qui ont écrit à la Commission électorale nationale indépendante (CENI) pour signifier le retrait de leur candidature. Il s’agit de Jean Minani du Frodebu-Nanyuki, de Domitien Ndayizeye et de Sylvestre Ntibantunganya. Certes, on peut saluer la décision de ces derniers de ne pas légitimer la forfaiture du président burundais qui prend son pays pour son ranch. Mais ils n’en sont restés qu’au stade de l’annonce de leur retrait du scrutin. De fait, la CENI a estimé que pour que le retrait de leurs candidatures fût effectif, il aurait fallu que ces candidats eussent effectué le déplacement à son niveau pour récupérer leurs dossiers, au lieu de se contenter de lui adresser une correspondance. Ce qui peut paraître quelque part défendable, même si on s’attendait évidemment à ce que le pouvoir burundais fît de cela son miel, lui qui a du reste décidé de maintenir lesdites candidatures.

La démocratie au Burundi a plus que jamais besoin de la solidarité et de la détermination des opposants

Pourquoi diantre, cette opposition n’est-elle pas allée jusqu’au bout de sa logique pour éviter toute exploitation  ? Mais l’attitude la plus saugrenue est celle de Agathon Rwasa, le principal opposant de Nkurunziza. Il avait indiqué qu’il ne participerait pas aux élections. Mais, coup de théâtre ! Il décide à la dernière minute de ne pas retirer sa candidature de façon officielle. A quelle logique cela obéit-il, quand on sait du reste qu’il n’a aucune chance de vaincre NKurunziza, dans les conditions d’organisation du scrutin que l’on sait ? Bref, sa décision laisse libre cours à toutes les supputations possibles. En tous les cas, le comportement de ces opposants inspire deux réflexions. Primo, dans les républiques « gondwanaises » où la corruption est un instrument politique et où les opposants ont chacun leur prix, leur comportement ambigu peut laisser croire qu’ils ont été stipendiés par le régime de Nkurunziza, faisant d’eux les obligés du satrape burundais. Car sans doute, dans ces élections burundaises, beaucoup d’argent a circulé. Et si ce n’est pas par l’argent, NKurunziza pourrait les tenir par autre chose, notamment par le passé trouble de certains d’entre eux. En tout état de cause, on a le sentiment que les trois autres collègues sont restés au milieu du gué, pour avoir trahi l’opposition résistante, le peuple burundais et les démocrates du continent. Dans une Afrique des compromissions et des marchandages en tout genre, toutes les hypothèses sont envisageables.

Secundo, si par extraordinaire, il s’avérait que ces opposants, pour des raisons d’intérêts, ont travaillé, par la tactique de la diversion, à accompagner le dictateur de Bujumbura dans

son œuvre de sabotage de la démocratie, ce serait très grave. Et puis, ce serait, pour eux, le discrédit pour toujours. D’ailleurs, ce serait pour l’opposition, notamment pour Agathon Rwasa et les trois autres, faire un très mauvais calcul que de soutenir « nuitamment » Nkurunziza dont l’avenir paraît des plus sombres. En tout cas, un pays ne peut durablement construire son avenir sur la dictature. Ce faisant, la démocratie au Burundi a plus que jamais besoin de la solidarité et de la détermination des opposants et des organisations de la société civile. En attendant la proclamation de la victoire électorale du parti présidentiel dans les prochains jours, l’opposition doit donc retrousser ses manches pour accentuer la pression sur le fossoyeur de la démocratie au Burundi. Tout en espérant que certains d’entre eux n’ont pas déjà pactisé, en secret, avec le diable de Bujumbura.

Michel NANA


No Comments

Leave A Comment