HomeA la unePRESIDENTIELLE ET LEGISLATIVES 2015 : « Ce sera finalement pour le 11 octobre », selon Michel Kafando

PRESIDENTIELLE ET LEGISLATIVES 2015 : « Ce sera finalement pour le 11 octobre », selon Michel Kafando


Après les partis politiques, les organisations de la société civile, le président du Faso, Michel Kafando, a rencontré les patrons de médias, les responsables d’organisations professionnelles du monde de la presse, le jeudi 22 janvier 2015, à la résidence présidentielle de Kosyam pour, a-t-il dit, faire plus d’amples connaissances et échanger avec eux sur le déroulement de la transition politique au Burkina Faso. Cette rencontre qui s’est muée en un point de presse, s’est déroulée dans une ambiance bon enfant, même si quelques couacs organisationnels ont été relevés de temps en temps, mettant l’assistance dans un malaise perceptible. Plusieurs questions relatives à la vie nationale y ont été abordées, en l’occurrence celles relatives à l’organisation des prochaines élections, à la réduction du train de vie de l’Etat, les dossiers Thomas Sankara et Norbert Zongo, les problèmes que rencontre le monde de la presse, etc. Les patrons de presse n’ont pas manqué, tout en saluant l’initiative du chef de l’Etat de les rencontrer, de lui soumettre quelques préoccupations qui leur tiennent à cœur. Dans son adresse aux journalistes, Michel Kafando a annoncé que des réformes étaient en train d’être mises en œuvre. Au nombre de celles-ci, celles relatives à la justice avec la mise en place des Etats généraux de la justice. Et de relever qu’à leur prise de fonction, c’est un déficit de 300 milliards de F CFA et une dette intérieure de 200 milliards de F CFA (somme due à des Burkinabè qui ont offert leurs prestations à l’Etat) que le gouvernement de transition a trouvés. Le chef de l’Etat dit avoir donné des instructions aux services et institutions concernées, de procéder au règlement des factures. Pour ce qui est de la date des prochaines élections couplées, présidentielle et législatives, le président a annoncé que c’est celle du 11 octobre 2015 qui a été définitivement retenue, à l’issue du dernier Conseil des ministres.

 

Jamais autant de journalistes de la presse nationale ne s’étaient réunis à la résidence présidentielle de Kosyam. C’est assurément la première fois. Et pour cause, le président du Faso, Michel Kafando, y recevait ses confrères, car le président du Faso a été journaliste au début des années 60. Une rencontre auparavant mal comprise, parce que la correspondance adressée aux différentes rédactions, faisait état d’une conférence de presse à laquelle le président invitait les organes. Il était question, pour Michel Kafando, de favoriser une meilleure connaissance avec ses hôtes du jour, et d’échanger avec eux sur le déroulement de la transition au Pays des Hommes intègres. Michel Kafando était donc en famille, en compagnie de ses confrères car, comme il l’a lui-même souligné, il a été rédacteur et présentateur à la télévision nationale puis à la radio. Avant toute chose, il n’a pas manqué de traduire ses vœux de bonne et heureuse année au monde de la presse. Pour lui, il ne pouvait pas manquer de rencontrer les Hommes de média, quand on sait qu’ils ont une importance dans la vie nationale et un rôle à jouer dans la transition.

Michel Kafando a décliné ses préoccupations en relevant que, depuis sa prise de fonction, la première préoccupation était d’assurer la sécurité et la tranquillité des Burkinabè, toutes choses qui n’étaient pas encore gagnées d’avance. Après quoi, un gouvernement, des institutions et le Conseil national de la transition ont été mis en place. Et, pour parfaire cela, a-t-il ajouté, il reste à mettre en place le comité de réconciliation nationale, chose qui ne saurait tarder. Selon le président, d’énormes efforts ont été déployés côté diplomatie, pour faire savoir ce qui s’est effectivement passé au Burkina Faso parce que des gens ont travaillé à faire passer l’insurrection populaire en un coup d’Etat ; des efforts ont dû être faits pour rétablir la vérité et, à l’heure actuelle, tout est rentré dans l’ordre et certains même disent que ce qui s’est passé au Burkina les 30 et 31 octobre derniers doit servir d’exemple à d’autres pays. Il a également rappelé que l’objectif principal de la transition était l’organisation des élections et, à ce niveau, le dernier Conseil des ministres a retenu la date définitive du 11 octobre. Sur le plan du financement des élections, il n’y aura pas non plus de problème, les agences financières ayant toutes compris la nécessité d’aider le pays à s’en sortir. Quant au vote des Burkinabè de l’étranger, c’est une question définitivement réglée : « nous ne pouvons pas assurer ce scrutin », a lancé le président. Et ce, compte tenu de nombreuses difficultés, tant du point de vue organisationnel que sécuritaire.

Vers des Etats généraux de la justice

 

« Nous avons trouvé une situation très difficile à notre arrivée », a déclaré Michel Kafando. Et d’ajouter que « c’est pour cela que le gouvernement s’est engagé à essayer de restaurer la justice sociale ». Ce qui n’est pas du tout facile à son avis, lorsqu’on sait que le système précédent, qui s’est bâti pendant 27 ans, a eu le temps de miner le terrain. Cela explique donc les difficultés dans le choix des membres de la transition, vu qu’il n’était plus facile de trouver des Hommes saints. Et le président de demander l’indulgence de tous. « Nous sommes en train de procéder à des audits de certaines entreprises où la situation était très flagrante… Nous sommes un gouvernement de transition, cela veut dire que nous devons donner l’exemple, nous ne devons pas faire comme avant. Nous devons aller à la nouvelle démocratie en employant des méthodes démocratiques. Il faut toujours avoir la preuve de ce que vous avancez », a mentionné le président. Comme réformes, il a annoncé que le gouvernement était en train de mettre en place les états généraux de la justice, parce que la justice qu’ils ont trouvée à leur arrivée était une justice « assez bizarre, tout est fait, dans ses méandres pour que, dès l’instant où vous voulez vous attaquer à une situation, vous ayez tout de suite des blocages.» Ces états généraux vont donc permettre de réformer le système lui-même, les procédures judiciaires. Un programme de justice sociale sera créé. Cela, en poursuivant des gens qui, de façon flagrante, ont commis des crimes, des détournements publics qui ne peuvent pas, pour le moment être établis, les procédures judiciaires actuelles obstruant tout. « Nous sommes aussi en train de terminer la loi anti-corruption que nous allons soumettre au Conseil national de transition », a souligné M. Kafando

Autres dossiers que le président Kafando et son gouvernement ont ressortis des tiroirs, c’est la dépénalisation des délits de presse car, a-t-il estimé, « si nous laissons ce problème aux techniciens de la politique qui vont venir, je ne suis pas sûr qu’il sera réglé. Nous allons donc nous faire un point d’honneur de pouvoir nous-mêmes régler cette question ». De plus, le président s’est dit soucieux de la subvention accordée par l’Etat à la presse privée qui, à son avis, n’est pas confortable. Aussi envisage-t-il d’apporter un plus à cet appui.

Les patrons de presse et les responsables d’organisations professionnelles du monde de la presse, par la voix de leur représentant, Jean-Baptiste Ilboudo, ont tenu à remercier le président du Faso pour avoir eu l’idée d’initier cette rencontre. Ils ont également traduit leurs vœux de nouvel an, vœux de santé, de détermination et de réussite à la transition. Ils se disent disposés à jouer leur partition, comme ils l’ont fait depuis le débat de la crise et continent de le faire, pour l’atteinte des objectifs de la transition. L’occasion a été saisie par la presse pour soumettre ses préoccupations au président de la transition. Préoccupations qui ont pour noms : « mise en œuvre concrète des décrets sur la de fiscalisation du matériel entrant dans la production des services de presse tant écrite qu’audiovisuelle ; le relèvement conséquent de la subvention de l’Etat à la presse privée ; la mise en place du fonds d’appui à la presse privée ». A cela s’ajoutent « le renforcement en ressources humaines qualifiées et compétentes des rédactions ; la mise en place d’une structure professionnelle de distribution de la presse écrite ; l’implémentation des outils de connexion haut débit et leur accessibilité aux rédactions à des tarifs sociaux ; la tarification unique pour les services offerts par la SONABEL et l’ONEA ; la redistribution judicieuse de la publicité institutionnelle entre médias publics et privés ; la relecture des statuts des médias de service public et la dépénalisation des délits de presse ».

 

Echanges à bâtons rompus entre le président Michel Kafando et les patrons de presse

Après avoir remercié les patrons de presse d’avoir fait le déplacement de Kosyam, le président Michel Kafando leur a assuré que les préoccupations soulevées par leur porte-parole seront prises en compte. Puis, il s’est néanmoins prêté aux questions de ces derniers, quoi que ce ne soit pas une conférence de presse. Ainsi, parlant du projet de loi concernant les médias proposé par le gouvernement de transition, Cyriaque Paré, fondateur du portail internet « LeFaso.net », a posé la question de savoir si les médias en ligne étaient pris en compte dans ledit projet de loi. Et Michel Kafando de répondre que le principe arrêté par le gouvernement est de faire adopter une loi concernant la dépénalisation des délits de presse. Le ministre de la Communication, Alfred Nikièma, a, pour sa part, ajouté qu’une base documentaire, qui a été établie de façon consensuelle avec les différents acteurs, était disponible. Il a cependant affirmé que le processus reste ouvert pour d’éventuels rattrapages. Pour sa part, Abdoulaye Diallo, administrateur du Centre national de presse Norbert Zongo, a souhaité que l’accès aux sources d’information et aux documents administratifs soit codifié par des textes et non pas dépendre de l’humeur des individus. Par ailleurs, il a souhaité que l’OBM et le centre soient pris en compte pour les subventions de l’Etat à la presse privée. « Je puis vous rassurer donc que ces préoccupations seront prises en compte à travers le CNT, mais aussi par le biais du Comité vérité, justice et réconciliation où vous serez représentés, pour faire un certain nombre de propositions pour qu’on ait un document de qualité à la fin de la transition », a-t-il dit à l’endroit des patrons de presse.

Avant de répondre à la question de l’accès difficile des journalistes aux sources d’information, du directeur de publication du journal « Le Reporter », Boureima Ouédraogo, le président Michel Kafando a plongé la salle dans l’hilarité, en demandant à ce média de « corriger sa tronche » dans ses parutions. Puis, relevant que la rencontre avec les patrons de presse faisait la preuve que le gouvernement a pour ambition de faciliter aux hommes de médias l’accès aux sources d’information, Michel Kafando a confié que consigne a été donnée afin que toutes les informations soient données à tout journaliste qui le demanderait.  Et le ministre Alfred Nikièma de renchérir que des projets de lois, qui prennent en compte cet aspect, sont au niveau du gouvernement. « Au cas où on estimera qu’il y a des insuffisances, vous aurez toujours la possibilité de les amender au niveau du CNT et de la commission. Mais ce sont déjà des avancées enregistrées dans le domaine de la communication », a-t-il dit.

Parlant de la question des élections, Dieudonné Zougrana du journal « Aujourd’hui au Faso » a voulu connaître les actions concrètes entreprises par le gouvernement pour que les élections se tiennent à bonne date et dans la transparence. A en croire le président Michel Kafando, c’est le choix de la date qui importait. « A partir du moment où c’est cette date qui est retenue, la CENI est obligée de cadrer toutes les échéances avant cette date et elle est à pied d’œuvre pour le faire.

La CENI étant l’organe technique, c’est elle qui, en fonction de la date, est en mesure de dire quelles sont les échéances plausibles. La date du 11 octobre étant déjà retenue, la CENI va faire ce travail, d’autant plus que cela conditionne le financement des élections par tous nos partenaires », a expliqué le président de la transition. Pour la question des candidatures indépendantes, aussi bien pour les élections municipales que législatives, soulevée par le Fondateur des Editions « Le Pays », Boureima Jérémie Sigué, Michel Kafando a expliqué que cela était à l’étude. « Mais en l’état actuel de la Constitution et de la Charte de la transition, cela n’est pas possible. La commission vérité, justice et réconciliation s’en chargera », a ajouté Michel Kafando.

Le président Michel Kafando a également été interrogé sur le mouvement d’humeur au sein du Régiment de sécurité présidentiel (RSP) survenu le 30 décembre 2014 ; ainsi que sur les dossiers Norbert Zongo et Thomas Sankara. Concernant le dossier Sankara, le président Michel Kafando a estimé qu’il y avait un problème de compréhension. A l’en croire, l’Etat est disposé à aider la famille à procéder à l’identification des restes du président Thomas Sankara. « Cela signifie que la famille doit tout de même se mobiliser pour voir comment le faire. Il y a certainement des procédures. Mais ce n’est pas à l’Etat de faire ce travail, c’est à la famille de le faire. Il ne faut donc pas s’attendre à ce que ce soit l’Etat qui commence les installations. Nous avons été bienveillants, nous avons voulu, dans le cadre de la Justice et de la réconciliation nationale, régler ce problème, mais nous ne pouvons pas aller au-delà, d’autant plus que le cas Sankara n’est pas le cas Norbert Zongo », a dit Michel Kafando. Et d’expliquer que le cas Norbert Zongo était une enquête tandis que le cas Sankara est un contentieux judiciaire. « La famille a attaqué l’Etat en Justice. Ce que nous faisons, c’est d’aider la famille à identifier le corps. Maintenant, quant au fond du dossier, il faut que la procédure judiciaire suive son cours», a ajouté Michel Kafando. Parlant du mouvement d’humeur au sein du RSP, Michel Kafando a reconnu qu’il y a eu des divergences. Tout en confiant qu’il ne maîtrise pas les tenants et aboutissants de cette affaire, secret militaire oblige, Michel Kafando a assuré qu’un compromis avait été trouvé.

Christine Sawadogo et Thierry Sami Sou


No Comments

Leave A Comment