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 PRESIDENTIELLE MALIENNE


Ne pas prêter le flanc aux ennemis de la démocratie

Ils étaient  plus de 8 millions d’électeurs à être appelés aux urnes, hier, dimanche 29 juillet, pour élire le président de la République dans un contexte sécuritaire délétère, notamment au Nord et au Centre du pays. Les 24 candidats qui étaient en lice attendent fébrilement les résultats officiels avant la fin de la semaine en cours, même si beaucoup d’entre eux ne se font guère d’illusions sur leurs chances de créer la surprise, en remportant le scrutin. Le résultat de cette élection pourrait, en effet, être une sorte de remake de celle de 2013, avec un second tour qui mettrait  aux prises le président sortant et le chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé.  On se rappelle, en effet, qu’en 2013, les Maliens avaient joué les prolongations pour départager ces deux poids lourds de leur landerneau politique, et c’est Ibrahim Boubacar Keita (IBK) qui avait été plébiscité avec un score de 77,6% des voix. Mais cette année, l’écart pourrait être moins abyssal même si le président sortant venait à l’emporter,  en raison du bilan mitigé de ce dernier et de l’émiettement de la majorité présidentielle dont sont issus sept des candidats.  Il n’est toutefois pas sûr que cela profite pleinement à l’opposition, celle-ci étant traversée  par des courants contraires ; ce qui constitue un handicap de taille pour sa tête d’affiche. En somme, c’est une élection au résultat final indécis qui s’est déroulée hier, dans toutes les régions du Mali, avec un taux de participation vraisemblablement très faible au regard de l’affluence ou plus exactement du peu d’affluence devant les bureaux de vote. La désaffection des Maliens vis-à-vis des élections n’est véritablement pas une surprise, d’autant que depuis le retour de la démocratie dans ce pays en 1992, moins d’un électeur sur deux, a accompli son devoir civique. La faute certainement à une classe politique qui manque de crédibilité aux yeux de la majorité des citoyens qui estiment à tort ou à raison que leurs leaders politiques sont plus prompts à se servir qu’à servir le Mali.

Le principal défi pour le futur locataire du palais de Koulouba, demeure la sécurité

La présidentielle de cette année va connaître un taux d’abstention record puisqu’en plus de cette habitude malienne de ne pas se rendre massivement aux urnes, les risques d’attentats ou d’affrontements intercommunautaires principalement au Nord et au Centre du pays, ont dissuadé les populations de ces régions qui représentent  plus de 30% de l’électorat, de se rendre dans les bureaux de vote. La mobilisation de plus de 30 000 membres des forces de l’ordre maliennes et multinationales pour sécuriser le scrutin, n’a pas suffi à rassurer les électeurs et à éviter les attaques, les saccages et les incendies d’urne et de bureaux de vote, notamment dans la région de Mopti et dans certaines localités du Nord. Les terroristes se sont, en effet, invités dans la campagne à travers la voix de l’un de leur leader, Iyad Ag Ghali en l’occurrence, en demandant aux Maliens de rester chez eux, sinon ils seront pris pour cible au même titre que les forces de l’ordre chargées de la sécurisation des votes. Menaces mises à exécution, avec ces incidents signalés  à Kounari, à Fatoma et à Gandamia dans la région de Mopti, à Aguelock dans la région de Kidal et dans la région de Tombouctou où les votes n’ont pas pu se tenir dans 9 localités et où 17 urnes ont été emportées.  La preuve, s’il en fallait, que le principal défi à relever pour le futur locataire du palais de Koulouba, demeure la sécurité que des moyens militaires ne peuvent garantir, quels que soient leur nombre et leur sophistication. Il est évident qu’il faudra se pencher au plus vite sur les racines politiques du mal, et attaquer les variables structurelles sous-jacentes que sont la corruption, l’injustice et le repli identitaire, entre autres, qui alimentent les foyers de tensions et facilitent la tâche aux recruteurs terroristes. Tous les candidats en ont fait leur principal thème de campagne et celui qui sera élu, devra  travailler à réconcilier les Maliens même s’il faut, pour les besoins de la cause et pour certains, tendre la main au « diable », Iyad Ag Ghali. On espère que les ajustements décidés in extremis par le Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga, pour rassurer les candidats de l’opposition quant à la transparence du scrutin, vont nous éloigner des risques d’une crise postélectorale aux effets extrêmement dommageables pour le Mali et pour toute la sous-région. Les recalés de cette présidentielle, tout comme le futur vainqueur, devront relever  ensemble et sans acrimonie, les  défis immenses de la sécurisation de l’ensemble du territoire  et de la bonne gouvernance, afin de ne pas prêter le flanc aux ennemis de la démocratie qui ne désespèrent pas de transformer le Mali en un Etat de non droit. On attendra les résultats officiels prévus pour vendredi prochain au plus tard, pour apprécier le sursaut  patriotique des uns et des autres dans cette difficile quête de la paix durable et de la sécurité pour tous, au pays de Modibo Kéita. Dans tous les cas, les Maliens ne doivent pas prêter le flanc aux ennemis de la démocratie.

Hamadou GADIAGA


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