HomeA la unePRESUME COMPLOT DE ZIDA CONTRE DES PERSONNALITES : « Ces dénonciations de Madi Ouédraogo peuvent faire l’objet d’une nouvelle procédure », selon Alioun Zanré, Commissaire du gouvernement

PRESUME COMPLOT DE ZIDA CONTRE DES PERSONNALITES : « Ces dénonciations de Madi Ouédraogo peuvent faire l’objet d’une nouvelle procédure », selon Alioun Zanré, Commissaire du gouvernement


 

Le feuilleton du procès de la tentative d’attaque de la Maison d’arrêt et de correction  des armées (MACA) reprend. Mais cette fois-ci avec le  Commissaire du gouvernement, Alioun Zanré et ses collaborateurs qui, pour lever toute équivoque, ont animé une conférence de presse le 23 janvier 2017 à Ouagadougou, afin de donner des  précisions sur un certain nombre d’interrogations soulevées lors du procès sur le déroulement de la procédure. Il s’est également agi, pour  eux, de communiquer sur un certain nombre d’informations erronées distillées, à leur avis, volontairement durant tout ce procès  qui incriminait le caporal Madi Ouédraogo et 28 autres personnes pour association de malfaiteurs et détention illégale d’armes à feu et de munitions de guerre.

L’une des révélations qui aura le plus attiré l’attention de plus d’un, lors du procès du caporal Madi Ouédraogo et ses compagnons, dont le verdict est tombé le 18 janvier 2017, fut la dénonciation par le caporal Madi Ouédraogo, d’un présumé complot ourdi par le général Yacouba Isaac Zida contre certaines autorités militaires et politiques, en l’occurrence Salifou Diallo et les généraux Gilbert Diendéré et Djibrill Bassolé. Affaire pour laquelle le Tribunal militaire n’était pas saisi.  Mais face à la presse le 23 janvier dernier,  le Commissaire du gouvernement, Alioun Zanré, a souligné que « ces dénonciations de Madi Ouédraogo peuvent faire l’objet d’une nouvelle procédure au sens de l’article 53 du Code de Justice militaire s’il existe des preuves suffisantes ». 

Quid de la procédure d’interpellation ?

Revenant  sur la procédure ayant permis d’interpeller les accusés, le Commissaire du gouvernement, Alioun Zanré, a d’abord souligné que la loi encourage tout citoyen victime ou témoin d’une infraction, à venir la dénoncer devant une juridiction. Pour lui, cela peut se faire sous couvert d’anonymat. « Dans certains cas, si vous ne le faites pas, vous êtes poursuivi par la loi », a-t-il fait savoir avant de préciser que c’est ce qui s’est passé avec le dossier du Caporal Madi Ouédraogo et ses compagnons.  A l’en croire, la source qui est venue dénoncer les faits au Tribunal militaire avait été contactée par la bande. Elle a participé à la réunion du 16 décembre 2015 fixant la prochaine qui devrait se tenir le 19 du même mois de  la même année. « En tant que bon citoyen, il est venu se plaindre au niveau du Tribunal militaire. Naturellement, cette juridiction  l’a orienté en lui conseillant de grouiller pour avoir des preuves sonores », foi de Alioun Zanré. Chose que l’intéressé  a fait, a expliqué M. Zanré qui a relevé que c’est grâce à cet acte citoyen que l’intéressé a été absout conformément à la loi.  Selon les explications du Commissaire du gouvernement, c’est à partir de cet élément que Madi Ouédraogo a été interpellé. Et le Commandant du groupement de gendarmerie départementale de Ouagadougou, Sam Djiguiba Ouédraogo, de préciser que c’est Madi Ouédarogo, him-self, qui a cité tous ceux qui étaient à la réunion dont la plupart sont des éléments de l’Ex-Régiment de sécurité présidentiel (RSP).

Comment les auditions des accusés se sont-elles déroulées ?

« Les auditions des accusés n’ont pas été faites dans les règles de l’art ». C’était l’une des convictions des avocats de la défense lors du procès. Ce qui les avaient amenés  d’ailleurs à balayer du revers  de la main la crédibilité et l’authenticité des Procès-verbaux qui comportaient les dépositions de leurs clients, faites devant la Police judiciaire. Sur ce point, le Commandant du groupement de gendarmerie départementale de Ouagadougou, Sam Djiguiba Ouédraogo, a répliqué que ce sont des commandants de brigade expérimentés qui ont auditionné tous les accusés. « Toutes les auditions ont suivi les règles de procédure d’audition », a-t-il soutenu, avant de préciser qu’aucun des détenus n’a été forcé ou n’a subi d’injures encore moins des menaces ou des tortures pour  déclarer quoi que ce soit  ou  signer quoi que ce soit. De ses propos, tous les détenus ont librement fait leur déposition aussi bien devant la Police judiciaire que devant le juge d’instruction.   Pour le cas de Madi et sa bande  comme tous les autres cas, a-t-il souligné, les auditions  se font sans support numérique. Parfois, explique-t-il, les commandants le font pour pouvoir revoir en détail ce qui est dit. « A ce moment, l’accusé est prévenu en avance », foi de M. Ouédraogo.  Et le commissaire du gouvernement, Alioun Zanré, d’expliquer que lorsqu’un individu arrive chez l’officier  de police judiciaire (OPJ), il fait deux déclarations. Une première appelée  déclaration spontanée et une deuxième dénommée déclaration détaillée ou minutieuse. « Dans la déclaration spontanée, vous expliquez ce qui s’est passé et l’agent prend note », a-t-il indiqué. Ensuite, a-t-il renchéri,  l’officier de police judiciaire prend son cahier de déclaration  où il enregistre la déclaration détaillée de l’intéressé en lui posant  des questions sur la base de sa déclaration spontanée. Du point de vue de M. Zanré, c’est sur la base de cette déclaration détaillée  que l’officier de policier judiciaire rédige le Procès-verbal qu’il fait lire à l’intéressé avant signature. Embouchant la même trompette,  Mamadou Traoré, substitut du Procureur général près la Cour d’appel de Ouagadougou, a relevé que les propos que les détenus ont tenus devant le juge d’instruction sont les mêmes propos qu’ils ont tenus devant l’officier de police judiciaire. 

Condition de détention des détenus : plus d’1,7 million pour la nourriture

Toujours dans le procès du ministère public contre Madi Ouédraogo, lors des auditions des accusés les 6 et 7 janvier derniers, certains ont révélé avoir passé 72 heures à la gendarmerie sans manger. Une révélation qui avait fait froid dans le dos de plus d’un. Mais de l’avis du  Commandant du groupement de gendarmerie départementale de Ouagadougou, Sam Djiguiba Ouédraogo, aucun des accusés n’a été  détenu dans de mauvaises conditions. « Ils (NDLR : les accusés) avaient trois repas par jour. Certains avocats ont vu comment ils mangeaient et où ils dormaient (…). Ils ont été bien logés  et bien alimentés (…). Le montant de leur restauration s’élevait à plus d’1,7 million de  F CFA », a-t-il révélé.

De la comparution des témoins à charge ou à décharge avant l’audience

Revenant sur la comparution des témoins à charge ou à décharge, le Commissaire du gouvernement, Alioun Zanré, a souligné qu’avant l’audience, au sens de l’article 106 alinéa 4 du Code de justice militaire, avant l’ouverture des débats, l’inculpé (ou son conseil) doit notifier également au commissaire du gouvernement, par simple déclaration au Greffe, la liste des témoins qu’il désire faire entendre. « Dans ce procès, seul le conseil d’un accusé a demandé au Parquet de faire cette diligence pour lui, au mépris de la disposition ci-dessus en ce qu’il a saisi directement le parquet la veille de l’ouverture du procès en lieu et place du greffe », a-t-il soutenu.

Au cours des débats : De la comparution de la hiérarchie militaire

Au cours du procès, certains conseils, sur le fondement de l’article 118 alinéa 3 du Code de justice militaire qui dispose que « Si le Commissaire du gouvernement ou le défenseur désire au cours des débats, faire entendre de nouveaux témoins, il appartient au président d’en décider », ont demandé la comparution de certaines personnes dont le témoignage serait nécessaire à leurs yeux. Ce à quoi le parquet n’avait pas trouvé d’objection. « Mais le président du tribunal, en vertu de ses pouvoirs discrétionnaires, n’a pas trouvé nécessaire de faire comparaître lesdites personnes», a laissé entendre M. Zanré qui a relevé que, du reste, il avait été demandé aux parties qui souhaiteraient faire des pièces, de se manifester. « Ce à quoi toutes les parties n’ont rien trouvé à redire », a-t-il fait savoir. Qu’à cela ne tienne, la défense a préféré demander la comparution physique du général Diendéré alors  que sa déposition, du point de vue du Commissaire du gouvernement,  était versée au dossier dans la présente affaire. Cette requête faisait suite aux déclarations de Madi Ouédraogo tendant à dire qu’il aurait déjoué un complot ourdi par le général Yacouba Isaac Zida et que le général Gilbert Diendéré et l’ancien chef d’état-major général des armées, Pingrenoma Zagré seraient au courant dudit complot. Pour le cas de Ido Claude, le Commissaire du gouvernement, Alioun Zanré, a précisé qu’avant le procès, le ministère public n’a  aucunement été saisi par les avocats de la défense pour le faire comparaître à la barre. « Il ne nous a jamais été demandé de faire comparaître Ido Claude, mais plutôt un lieutenant  du nom de Nana, plus un autre dont je ne me rappelle plus le nom. C’est à l’audience que le nom de Ido Claude est apparu (…). Mais, le  tribunal, statuant sur la question, a soutenu que la comparution du soldat Ido Claude ( NDLR : en mission ounisenne au Mali) n’était pas nécessaire », a rappelé M. Zanré.

De l’enregistrement sonore

Quid de l’enregistrement sonore ?  Il s’agit de la bande sonore enregistrée au cours de la réunion  du 19 décembre 2015  tenue au domicile du caporal Madi Ouédraogo, situé sur la route de Pô, non loin du château de l’ONEA, avant le panneau de contrôle de la Police nationale. A en croire le Commissaire du gouvernement, c’est une bande sonore  de 1h39 minutes dont le contenu fait froid dans le dos, si l’on s’en tient au plan d’opération.  « Elle est très violente », a-t-il dit. Selon ses explications, Madi Ouédraogo et ses compagnons  envisageaient,  entre autres, d’attaquer le palais de  Kosyam, d’attaquer  la poudrière de Yimdi pour prendre des armes, d’aller à la MACA pour libérer les généraux et ceux qui y sont incarcérés, de s’en prendre physiquement au Chef d’état-major des armées, au Chef d’état-major de l’armée de l’air, de s’attaquer aux populations civiles si elles résistaient, de casser la BCEAO pour prendre de l’argent, de laisser les populations mourir. Une pièce « maîtresse » dont le contenu de la retranscription et la source ont fait l’objet de polémiques. Car, faut-il le rappeler, les avocats de la défense avaient demandé son retrait pur et simple. Sur ce point, le Commissaire du gouvernement, Alioun Zanré, a laissé entendre que cette requête devrait être formulée avant l’audience. A son avis, les avocats auraient dû la contester in auditu (latin : avant tout débat).  Et le substitut du Procureur général près la Cour d’appel de Ouagadougou, Mamadou Traoré, d’apporter ces précisons : « au cours du procès, on est revenu sur cette pièce en demandant à Madi Ouédraogo s’il reconnaissait sa voix. Il a répondu par l’affirmative ».

De la requalification des charges de l’association de malfaiteurs en complot militaire

Sur la requalification des charges de l’association de malfaiteurs en complot militaire, Alioun Zanré a noté que celle-ci est prévue par l’article 97 de la loi 51-93 du 16 décembre 1993 portant procédure applicable devant la Chambre criminelle qui dispose que « s’il résulte des débats  que le fait comporte une qualification légale autre que celle donnée par l’arrêt de renvoi, le président doit poser une ou plusieurs questions subsidiaires ». A l’occasion des débats sur la compétence du Tribunal, a-t-il rappelé, le président avait souligné que le Tribunal était saisi in rem (des faits) et non in personam (des personnes). « Ce à quoi, un des conseils de la défense avait demandé au président de leur notifier à temps l’éventualité d’une telle requalification des faits pour pouvoir l’interroger dans leurs plaidoiries. Dans ce sens, il a produit une jurisprudence de 1970 de la Cour de cassation française, le lundi 9 janvier 2017. Le mardi 10 janvier 2017, le président du Tribunal a porté à la connaissance de toutes les parties, l’éventualité de la requalification de l’association de malfaiteurs en complot militaire au regard des débats à l’audience », a-t-il indiqué. A son sens, le procès du ministère public contre  Madi Ouédraogo  s’est  bien déroulé, malgré ces incidents inhérents au déroulement normal d’un procès criminel. Mieux, il dit  avoir pris acte de la décision rendue par le tribunal dans cette affaire qui s’est soldée par : 3 condamnés à 15 ans de prison ferme en l’occurrence deux soldats et un civil, 15 condamnés à 10 ans de prison ferme, 2 à 6 mois de prison ferme et 9 acquittés dont un civil.

Mamouda TANKOANO

 


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