HomeA la uneRAM OUEDRAOGO, (PRESIDENT DU RDEBF): Ce qui coule les hommes politiques au Burkina ,c est leur arrogance et leur suffisance

RAM OUEDRAOGO, (PRESIDENT DU RDEBF): Ce qui coule les hommes politiques au Burkina ,c est leur arrogance et leur suffisance


Plusieurs fois en lice pour la conquête du fauteuil présidentiel au Burkina Faso, Ram Ouédraogo, président du Rassemblement des écologistes du Burkina Faso (RDEBF), estime être le plus expérimenté des candidats à l’élection présidentielle du 29 novembre 2015. Pour ces élections, le président du RDEBF estime avoir toutes les chances d’occuper le palais de Kosyam au soir du 29 novembre. La vie de son parti, ses atouts pour la conquête de Kosyam, ses relations avec les autres partis, sa lecture de la situation nationale, ce sont autant de sujets que nous avons abordés avec lui, le 3 novembre 2015. De même, Ram Ouédraogo a expliqué comment il compte sortir le Burkina de la pauvreté, une fois élu. Lisez plutôt !

 

Le Pays : Comment jaugez- vous vos chances d’être président du Faso ?

 

Ram Ouédraogo : Depuis que j’ai mis les pieds au Burkina Faso, il y a de cela une trentaine d’années, j’ai mis mes ambitions personnelles de côté pour servir la Nation. J’ai toujours souhaité être président du Faso. J’ai un projet de société, pour sortir le Burkina de la pauvreté, de la misère. De ce point de vue, je pense avoir une chance d’être élu président du Faso. De plus, parmi tous les candidats à la présidentielle, je suis le plus expérimenté. Je suis à ma 4e tentative avec 3 candidatures effectives en ce sens que je fus le 1er candidat déclaré à la présidentielle en 1991, pendant l’Etat d’exception, face au capitaine Blaise Compaoré. C’est même au nom de l’unité d’action de l’opposition que nous avons fini par boycotter cette élection. Et depuis un quart de siècle, je suis toujours présent, sauf en 2010 où j’ai demandé de créer quelques conditions pour que les élections soient équitables, transparentes, ce qui n’a pas été fait. Je n’ai jamais renoncé à mener la lutte pour l’obtention du fauteuil présidentiel. Avec la nouvelle donne, en principe, tout le monde partant sur la même ligne, je dirai que j’ai ma chance en 2015.

 

Quelles sont vos alliances possibles en cas de second tour ?

Nous parlerons des alliances si second tour il y a. C’est à ce moment qu’on verra ceux qui sont au second tour. Donc, pour l’instant, je ne peux pas parler d’alliance, parce que chaque candidat a un programme et je dirai que chacun lutte pour sa chapelle. Nous, en tant qu’écologistes, nous sommes différents des autres partis politiques classiques et traditionnels. Souvent, nous ne partageons pas les mêmes valeurs. Il faut donc attendre pour voir s’il y a un 2e tour. Si je suis au second tour, faute d’avoir gagné au 1er, je verrai quels sont les partis ou les groupes qui répondent aux idéaux que notre parti défend, c’est-à-dire la morale, l’éthique, l’intégrité et la vraie démocratie.

 

Faites-vous partie des candidats qui souhaitent avoir le soutien du CDP ?

Pour l’instant, je ne veux le soutien de personne. Le seul soutien dont j’ai besoin, c’est celui du peuple burkinabè dans son entièreté. Si je voulais des alliances, je le ferais depuis longtemps ! Si vous vous souvenez très bien, cela fait plus d’une dizaine d’années que nous ne faisons partie d’aucun regroupement politique, car nous ne partageons pas les mêmes valeurs. Donc, aujourd’hui, même si la donne a changé, les acteurs restent les mêmes. On verra très bien, si nous sommes au second tour, comment nous comporter.

 

Vous avez parlé de vraie démocratie ; est-ce que cela suppose que dans le temps, ce n’était pas une vraie démocratie ?

Non, je pense qu’il ne faut pas être négatif jusqu’au bout. Nous sommes réunis ici parce que nous avons été dans un Etat de droit. En 1991, nous faisions partie de ceux qui avaient mené la campagne référendaire. Nous avons dit que l’Etat de droit qui était proposé, était bancal, mais qu’il valait mieux qu’un Etat d’exception ; ce qui veut dire que nous avons cheminé dans un Etat de droit qui demandait à être consolidé, parce que la démocratie, il faut toujours la parfaire. Nous sommes dans un autre contexte qui permet qu’on aille dans un Etat de droit véritable. Il n’y a pas de candidat-président car lorsque le président est candidat, cela crée beaucoup de nuisances à la démocratie, ce qui n’est pas le cas pour les élections à venir. Tout le monde travaille à ce que l’Etat de droit soit réel. Je pense qu’aujourd’hui, n’ayant pas déjà d’adversaire politique au pouvoir, on peut parfaire cette démocratie. On ne peut pas dire qu’il n’y a jamais eu les jalons d’une démocratie au Burkina Faso.

 

De qui vous sentez-vous le plus proche en termes d’idéologie ?

Peut-être que je vais vous décevoir, mais aucun. Cela, parce que les écologistes sont tout à fait différents des autres partis politiques classiques et traditionnels. C’est face à l’échec de ces partis que les écologistes qui étaient des groupes de pression, ont fini par déployer leur propre drapeau, c’est-à-dire faire de la politique. Si les autres partis répondaient vraiment à nos aspirations, on se serait mis ensemble. Malheureusement, on ne défend pas les mêmes valeurs. Les fondements de l’écologie sont la paix, la non-violence, la démocratie, le respect de la parole donnée et l’intégrité. Ce ne sont pas très souvent des valeurs partagées par beaucoup de partis politiques. Aussi les écologistes ne sont-ils pas pour tous les coups pour arriver au pouvoir, y compris le sang versé. Nous œuvrons toujours pour l’intérêt général. Donc, pour l’instant, je ne me reconnais pas dans un autre parti politique. Mais on est en politique et les choses fluctuent. Quelqu’un peut dire qu’il est devenu écologiste parce que nous avons gagné les élections ou que nous sommes au 2e tour. A ce moment-là, nous trouverons des gens ayant l’âme écologiste et nous verrons très bien s’il peut y avoir fusion des programmes.

 

Quelles seront vos priorités si vous êtes élu président du Faso ?

Notre programme comporte 15 points, notamment la santé, l’éducation, l’emploi, les infrastructures, la question de la jeunesse, la femme, l’habitat, l’eau et l’environnement. Toutes ces questions sont prioritaires pour nous, mais ce à quoi il faut s’attaquer en premier lieu, c’est la réduction de la pauvreté. Quand bien même on ne peut la faire disparaître totalement, on pourrait la réduire fortement. C’est pour cela que dans notre programme, nous avons pensé au PUR (Programme d’urgence Ram) qui va doter toutes les 45 provinces et les 382 départements de moyens conséquents pour tenter de résorber la pauvreté. C’est un vaste chantier, mais nous avons des propositions concrètes à travers le PUR par une véritable décentralisation de 100 millions de F CFA par an. Il y a 382 départements, nous allons décaisser 33 milliards 200 millions par an et environ 192 milliards pour les 5 ans de mandat, que nous allons injecter directement à la base. C’est pour la création de projets, la réalisation d’infrastructures communautaires. On veut que l’argent arrive à la base pour atténuer la pauvreté. Cela, sans compter les autres volets tels la santé, l’éducation, l’habitat. Le Burkinabè doit avoir un toit coûte que coûte. Dans notre programme, nous avons prévu la création d’HLM (Habitation à loyer modéré), réalisés avec des matériaux locaux, pour réduire le coût de ces habitations.

 

Et sur le plan de la gouvernance ?

J’ai la chance d’être sur le terrain politique depuis 25 ans et cela m’a permis de voir des actions de développement. J’ai pensé à ce PUR parce que le Burkina Faso ratifiait des conventions à coup de milliards de F CFA, souvent sous forme de dons. Mais le paysan qui se trouve à 15 km de Ouagadougou, n’a jamais vu la couleur de cet argent et à chaque fois, on lui disait que c’était pour le développement. Pourtant, on ne voyait rien qui se développait. Donc, dans l’analyse que j’ai faite, il faut que l’argent arrive à destination. Maintenait, il y a l’opérationnalisation. D’abord, nous allons convoquer les états généraux provinciaux qui seront, eux, précédés d’assises départementales qui auront pour but de faire asseoir sur la même table, les autorités religieuses, coutumières, la jeunesse et les autorités administratives. Ces Etats généraux procèderont à l’identification des besoins réels des populations qui iront aux états généraux provinciaux. L’argent qui sera donné passera par le canal du ministère des Finances, au début de l’exercice budgétaire annuel. A l’issue de l’exercice annuel, des états généraux seront également organisés pour évaluer les performances au niveau des acquis. S’il y a contreperformance, la province peut perdre tout ou partie de la dotation. S’il y a un détournement quelconque, les gens seront sanctionnés purement et simplement. Sur le plan de la gouvernance globale, la lutte contre la corruption est notre principal cheval de bataille. Dès que quelqu’un commet un détournement, il sera traduit directement devant la Justice. Je connais également les dossiers économiques et de crimes de sang pendants. Il n’y aura pas d’impunité en matière de lutte contre la corruption. Nous prenons aussi au sérieux la question de la réduction du train de vie de l’Etat. Beaucoup de mesures seront prises pour renflouer les caisses de l’Etat.

Au cours des meetings, les populations demandent d’abord si les gadgets sont arrivés

 

Qu’est-ce qui vous fait dire que vous êtes le mieux expérimenté parmi tous les candidats ?

J’ai un parcours que j’ai eu dans le passé, qui démontre cela, c’est-à-dire l’engagement et le serment. Mais c’est le peuple souverain qui confère la légalité et la légitimité, donc je m’en remets au peuple. J’ai un programme de société que nous envisageons même de traduire en langue nationale pour que les populations se l’approprient. La chance que nous avons est que l’insurrection est venue interdire la distribution de gadgets, ce qui va obliger les populations à écouter les programmes. A l’élection présidentielle de 2005, j’avais traduit mon programme en 6 langues nationales, en plus du français. Seulement il n’y a pas beaucoup de gens qui ont écouté ce programme, parce qu’au cours des meetings, les populations demandent d’abord si les gadgets sont arrivés. Aujourd’hui, force est de reconnaître que les gens n’ont pas le choix que d’écouter ce que les candidats vont leur proposer, avant de faire la part des choses. Si le peuple trouve que le candidat écologiste a de bonnes propositions, c’est tant mieux. Le cas échéant, il va en choisir un autre, mais je pense que les écologistes ont de bonnes propositions.

 

Comment avez-vous réuni la caution de 25 millions de F CFA ?

C’était une autre affaire, car j’ai été de ceux-là qui ont dénoncé cette caution de 25 millions de F CFA. Si on dit que le Burkina n’est plus comme avant, alors que la caution en son temps était de 10 millions de F CFA, il y a un problème ! L’insurrection populaire est survenue et les nouvelles autorités disent qu’il faut passer à 25 millions de F CFA pour que n’importe qui ne soit pas candidat. Tous les Burkinabè ont les mêmes droits. Ce n’est pas parce que vous n’avez pas 25 millions de F CFA que vous n’avez pas d’idées pour développer le Burkina. C’est bien de mettre des barrières, mais celles-ci ne doivent pas être basées sur l’argent, car c’est anticonstitutionnel.

 

Est-ce qu’on ne peut pas servir autrement la Nation?

Si on a des idées, on peut être président du Faso, c’est-à-dire qu’on peut servir partout où l’on a des idées. Mais il faut impérativement que quelqu’un gère le Burkina Faso. N’importe qui ne peut pas avoir la prétention de gérer le Burkina. Pour les 25 millions de F CFA de la caution, j’avais estimé que ce n’était pas une bonne idée. Des pays plus nantis que le Burkina ont une caution moins élevée. Pourquoi une caution de 25 millions de F CFA pour un pays reconnu aussi pauvre.

 

Le montant de la caution ne vise-t-il pas à éviter une pléthore de candidats ?

Mais la caution n’a pas dissuadé les gens. C’est la première fois au Burkina que l’on a 14 candidats à la présidentielle. Cela signifie que même si on avait fixé la caution à 50 millions de F CFA, il y aurait toujours des candidats. Mais mon problème est que l’on peut avoir des idées et ne pas avoir l’argent qu’il faut. Moi, particulièrement, pour réunir la caution, j’ai dû m’adresser à des banques jusqu’à mettre mon PUH en jeu. Heureusement que mon crédit m’a permis d’avoir les 25 millions de F CFA. C’est vrai qu’il y a d’autres qui n’ont pas ce problème. Beaucoup de candidats sont des fonctionnaires. Je connais le salaire d’un fonctionnaire au Burkina. En matière de crédit en banque, c’est le tiers du salaire, pas plus. Pour avoir un crédit de 20 millions F CFA, si vous touchez 1 million par mois, vous payerez une traite de 300 000, ce qui est difficile. Je n’incrimine personne, mais je me dis que cette caution n’était pas une bonne idée. Personnellement, je me suis débrouillé, j’ai payé ma caution.

 

Il reste aussi que certains partis ont vu leurs militants cotiser pour payer la caution

Je ne crois pas aux partis qui disent que c’est leurs militants qui ont cotisé pour payer leur caution. C’est de la démagogie. Je suis dans la politique depuis bien longtemps, il n’y a pas de parti dont les militants cotisent réellement. Ici, les partis fonctionnent comme des sociétés, avec un Président directeur général à la tête, qui fait tout.

 

Pouvez-vous en dire autant pour le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) ?

Nous sommes dans une savane. On voit tout le monde. Il y en a qui sont immédiatement sortis de l’université et qui ont accédé à des postes de responsabilités. Au Burkina, certains sortent comme fonctionnaires et au bout de quelque temps, ils roulent dans des voitures de plus de 20 millions de F CFA. On sait déjà que cela n’est pas clair. C’est pourquoi je dis que la gouvernance de Ram Ouédraogo, une fois élu, sera très difficile parce que tous les délits d’apparence feront l’objet de poursuites. Dans un Etat de droit, tout devrait être justifié. Parlant du CDP, c’était le parti au pouvoir et dans toutes les sphères de l’Etat, ce sont les militants de ce parti qui bénéficiaient des avantages : les gros salaires, les hautes fonctions, etc. Dans ce parti, ceux qui avaient les postes de responsabilité ne cotisaient pas la même somme que les militants de base. Il y avait une sorte de barème pour les hautes personnalités. Mais, pour les partis lambda comme le nôtre, la cotisation mensuelle des membres du bureau politique est fixée à 2 000 F CFA par personne. Pourtant à la fin du mois, pas plus de 5 personnes ne s’acquittent de cette somme. De même, pour la carte de militant du parti qui coûte 200 F CFA, c’est la croix et la bannière que de demander aux gens de la payer. Alors quand on me dit que ce sont des militants qui ont payé la caution, tant mieux car ces partis ont de la chance d’avoir des militants qui peuvent cotiser.

 

La subvention aux partis politiques fait polémique. Quel est votre avis sur la question?

Au moment où nous parlons, je n’ai pas encore vu la couleur de 100 F CFA. C’est une loi. Il faut donc qu’on aille jusqu’au bout de la logique. La démocratie a un coût. C’est au cours des réformes politiques de 2000 dont j’étais le chef, que nous avons proposé le statut de l’opposition, le financement public, le mode de scrutin et le financement dans un parti de notre opposition. L’article 13 de la Constitution confère le devoir aux partis politiques de former, d’informer, d’éduquer et de sensibiliser. C’est pour cela que le contribuable a décidé de soutenir les partis politiques pour qu’ils puissent mener leurs activités. Mais pour ce qui est des campagnes, au niveau des législatives, c’est au prorata du nombre de candidatures ; pour ce qui concerne la présidentielle, la somme est répartie de manière équitable entre les candidats. Le montant était bien précis : 500 millions pour la présidentielle, 500 millions pour les législatives et les municipales. Pour les activités des candidats, le montant était de 500 millions à partager entre les candidats, suivant des critères dont 5% au départ. Après, le parti au pouvoir a ramené cela à 3%. Seulement 5 partis étaient éligibles au détriment d’une centaine de partis. Chose qui n’était pas conforme à la loi et nous l’avons dénoncé en vain.

 

« Quand Dieu veut vous perdre, il vous rend sourd et aveugle. »

Après l’insurrection, ils ont maintenu la proposition de donner toujours un financement, mais le problème était de savoir comment distribuer de l’argent pour les activités de plus de 150 partis qui existent, même pour ceux qui ne vont pas aux élections. Ils ont donc décidé de donner l’argent aux candidats qui iront aux élections, mais cela pose un certain nombre de problèmes. Jusqu’au moment où je vous parle, aucun parti politique n’a bénéficié de cet argent. Aussi, il n’est pas juste qu’à 4 jours de l’ouverture de la campagne, les partis n’aient pas obtenu cet argent. D’autant plus qu’à l’époque, le parti au pouvoir utilisait la même pratique et pire il donnait des chèques barrés du Trésor public, la veille de l’ouverture de la campagne. Ce qui veut dire qu’il faut déposer le chèque à la banque et attendre la compensation de la banque avant d’espérer toucher l’argent. Pendant ce temps, le parti au pouvoir fait sa campagne tranquillement. C’est le même scénario que nous vivons à cette élection. N’eût été le coup d’Etat manqué du 16 septembre, la campagne démarrait le 19 septembre. Mais jusqu’au 15 et 16 septembre, on n’avait toujours pas le financement. Donc, chaque parti est obligé de se débrouiller pour s’en sortir.

 

Les partis qui ne sont pas en mesure d’aller aux élections à cause de problèmes de financement accusent l’Etat. Cela ne pose-t-il pas un problème d’éthique ?

Si notre parti n’était pas candidat à ces élections, nous n’allions pas prétendre au financement. Il ne s’agit pas seulement de l’état actuel du Burkina, mais plutôt d’une question de logique. Un parti politique a pour vocation première de solliciter les suffrages. Mais si les élections arrivent et que vous ne pouvez pas aller en compétition, vous ne devez pas prétendre au financement public. Non seulement c’est une question d’éthique, mais aussi de bon sens, car si un candidat n’est pas en compétition, il doit laisser la place à ceux qui le sont, afin que ces derniers bénéficient du financement.

 

Comment avez-vous accueilli le coup d’Etat de Gilbert Diendéré ?

Le Burkina est un pays spécial en Afrique. Pendant que j’avais fait mon programme pour démarrer mes activités le 17 septembre, on m’informa qu’on a arrêté le président et le Premier ministre. Immédiatement, je suis rentré chez moi et le lendemain, on a dit que c’était un coup d’Etat. Jusqu’à l’heure où je vous parle, je n’ai toujours pas compris comment quelqu’un peut opérer un coup d’Etat à quelques jours des élections voulues et souhaitées par tous les Burkinabè et la communauté africaine et internationale. Qui peut penser que ce genre de coup d’Etat peut prospérer ?

« Si c’était à recommencer, je soutiendrais le référendum »

Mais encore une fois, des Burkinabè sont morts. L’engagement que nous avons pris le 30 mars 2001 au stade du 4-Août lors de la Journée du pardon, disait que plus jamais le sang d’un Burkinabè ne devait être versé pour des raisons politiques. J’ai été déjà affligé par les événements des 30 et 31 octobre 2014. Nous avons tout fait pour prôner le dialogue, mais nous avons échoué. Je ne comprends toujours pas les initiateurs de ce coup d’Etat, mais comme je suis croyant, je pense qu’il y avait la main de Dieu dans ce coup d’Etat. Quand il veut vous perdre, il vous rend sourd et aveugle. Vous posez des actes aux antipodes de la raison.

 

La lutte contre l’exclusion de certains candidats de la présidentielle était l’une des raisons du coup d’Etat, selon le putschiste Gilbert Diendéré. Qu’en pensez-vous ?

J’ai été le premier, lorsqu’ils ont adopté le Code électoral, à dire qu’il n’était pas bon. On ne peut pas codifier l’exclusion dans un texte national. Et on parle de ceux qui ont soutenu. Si l’on s’en tient à cela, beaucoup ont soutenu la modification de la Constitution, vu que les stades étaient pleins lors des meetings. Je l’avais dit en son temps, si quelqu’un, de par ses hautes fonctions, a posé un acte répréhensible, vu que nous avons des lois, ce dernier pourrait immédiatement être attrait devant la Haute cour de justice. Selon le Code électoral, celui-ci ne peut plus être candidat. Cela était plus juste que de prendre une loi pour exclure. On a dénoncé cette loi et la CEDEAO même nous a donné raison. Mais aller jusqu’à faire un coup d’Etat et faire mourir des gens au prétexte de rétablir la justice, c’est créer une autre injustice plus grave que la première. Donc, cet argument n’est pas suffisant pour un coup d’Etat à mon sens.

 

En son temps, vous étiez pour le référendum qui n’a d’ailleurs pas porté ses fruits. Mais que pensez-vous de la tenue du référendum au Congo ?

Lorsqu’on est démocrate, on doit respecter toutes les dispositions et les fondements de cette démocratie et cela passe par la loi fondamentale. Parlant de notre propre situation, si c’était à recommencer, je soutiendrais le référendum. Le problème n’était pas politique, mais juridique. L’article 37 que j’ai même contribué à remettre en place, dit que le mandat du président du Faso est de 5 ans renouvelable une fois. L’article 165 parle de tout ce qui est intangible dans cette Constitution et que l’on ne peut pas toucher du tout à la forme républicaine de l’Etat, à l’intégrité du territoire, etc. En tant que ministre des Réformes politiques en son temps, avec le Collège de sages, nous nous sommes battus en vain pour remettre le verrou en place, pour loger l’article 37 dans l’article 165. Cela pour qu’aucun président ne puisse modifier cet article. Posez la question à l’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo. C’est cette faille politique qui a permis au parti au pouvoir de manœuvrer et le président Blaise Compaoré avait déclaré à l’époque à Dori, que si le peuple ne s’entendait pas, nous irions au référendum. Or, c’est ce qui est écrit à l’article 49 qui dispose qu’en cas de désaccord entre les Burkinabè sur une question importante, le peuple peut aller au référendum. La Constitution permet donc au président du Faso d’en appeler au référendum ; ce qui me fait dire que c’est une faille juridique. Le problème est qu’on nous a empêchés de loger cet article dans les articles intangibles. Il y avait d’un côté des juristes chevronnés qui soutenaient qu’en l’état, l’article 37 pouvait être modifié, et d’autres qui soutenaient le contraire.

 

« Le monde est une vaste prison dont les clés sont détenues par tous »

Je faisais partie de ceux qui estimaient que l’article 37 pouvait être modifié et jusque-là, je m’en tiens à cela. Sur le plan juridique, l’article 37 pouvait être modifié. Mais la question était de savoir si après 27 ans de pouvoir, il était opportun de le faire. C’est la question politique. On ne pouvait pas. A contrario, au Niger, le président Tandja ne pouvait plus rebeloter parce que la Constitution ne le permettait pas. Il a dû chasser le Conseil constitutionnel pour le faire. Au Congo, comme le président Sassou Nguesso ne peut plus se présenter, il a décidé de passer à une nouvelle République. Ce sont donc des tours de passe-passe dont les politiciens ont le secret. Chez nous, si on a de nouveau un problème de ce genre, je m’en tiendrai strictement à la Constitution. Je ne soutiens pas Blaise Compaoré. J’ai toujours été opposé à la modification de l’article 37. Mais si on veut poser la question au peuple burkinabè, je suis d’accord. Pour moi, le monde est une vaste prison dont les clés sont détenues par tous. Si vous voulez, vous ouvrez et vous sortez. Dans le cas contraire, vous restez dans la servitude. Ce qui signifie que si on demande aux Burkinabè s’ils veulent oui ou non lever le verrou de l’article 37 et qu’ils répondent par l’affirmative, ils en assumeront les conséquences.

Je ne soutiendrai jamais une modification de la Constitution pour lever un verrou. En tant que démocrate, on doit respecter toutes les dispositions de la Constitution. Mais l’essentiel, étant donné qu’on est en politique, est que tous les acteurs jouent le jeu de la démocratie, ce qui n’est malheureusement pas le cas. Lorsque vous regardez un peu partout là où les Constitutions ont été modifiées, ce sont les intellectuels qui en sont les initiateurs. Personne ne veut dire la vérité, tous tournent autour du pot. Si la démocratie fonctionnait correctement, les chefs d’Etat n’auraient pas peur de partir. J’ai compris Denis Sassou Nguesso. Il gère le pouvoir depuis plus de 30 ans. S’il le quitte, il traînera des casseroles, c’est-à-dire que des dossiers vont refaire surface. Mais s’il y a la vraie démocratie, il y aura des garde-fous et le président ne pourra pas faire ce qu’il veut.

 

Avez-vous été contacté par les putschistes pour faire partie de leur gouvernement ?

Comment vais-je me mêler à un coup d’Etat, alors que je suis déjà candidat à l’élection présidentielle ? J’ai dépensé beaucoup d’argent depuis 2012. J’ai été le premier à commencer la campagne. J’ai fait la Côte d’Ivoire, les régions du Burkina et le Niger. Je me débrouille. Je prends un crédit et je paye ma caution. Des gens voulaient m’accuser d’avoir soutenu l’article 37 pour bloquer ma candidature. Le droit a été dit, Ram Ouédraogo n’a jamais soutenu l’article 37. Comment quelqu’un qui a refusé de hautes fonctions dans l’Etat de droit, pourrait-il accepter d’être ministre dans un gouvernement putschiste ? J’ai assez de bon sens. Qui va donc m’approcher pour me dire quoi que ce soit ? Non seulement je n’ai pas été approché, mais aussi je n’étais pas au courant. J’ai été surpris comme tout le monde et j’ai même dit que c’était une bêtise. Je pense que c’est la main de Dieu qui nous a débarrassé définitivement de tout ce qui gênait. Sinon les auteurs de ce putsch n’allaient pas en rester là.

 

D’aucuns disent que vous avez quitté le pays pour Abidjan pendant le coup d’Etat. Qu’en dites-vous ?

Les 30 et 31 octobre 2014, j’étais à mon bureau. Les 16 et 17 septembre 2015, j’étais également à mon bureau. Aussi, lors de la rencontre avec la CEDEAO pour la médiation à l’hôtel Laïco, j’étais présent. Et quand je suis arrivé à l’hôtel, j’ai vu des représentants de partis politiques assis dans le hall. J’ai également vu Mgr Paul Ouédraogo et l’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo, avec lesquels j’ai discuté un moment. Après un bout de temps et comme personne ne disait rien, je suis reparti chez moi. Pourquoi quitter le Burkina Faso, mon pays ? A moins d’avoir quelque chose à se reprocher, il n’y a pas de raison de quitter le pays. Je n’ai rien à voir avec ce coup d’Etat. Pour ma part, j’ai bravé plus que ça, j’ai risqué la mort. Par contre, deux individus sont venus chez moi le 17 septembre, pendant que j’étais au service et quand ils ont sonné à la porte, ceux qui étaient à la maison ont demandé qui ils étaient ? Ces individus ont prétexté être des agents de la SONABEL. Pourtant, ils ressemblaient à tout sauf à des travailleurs de la SONABEL. Quand ils sont rentrés, ils ont demandé à voir les anciennes factures. Dès lors que j’ai été informé, je suis allé porter plainte au commissariat pour violation de domicile.

Mais je vais rendre hommage aux forces de défense et de sécurité avec lesquelles j’ai échangé par la suite. Elles ont été vigilantes parce que c’était un grand traquenard. Même s’il s’agissait d’un tract, on pouvait appeler pour demander des comptes parce que son nom y figurait. Peut-être que ce sont les mêmes gens qui ont tenté de faire invalider ma candidature parce que ne voulant pas d’un Ram Ouédraogo, qui m’ont rendu visite. Peut-être que l’idée était de m’éliminer de cette présidentielle. Mais je n’ai pas du tout été inquiété lorsque j’ai rendu visite aux forces de sécurité. Même mes ennemis me connaissent bien, ils savent que je ne me mêlerais pas à des histoires de coup d’Etat. Même ceux qui se font passer aujourd’hui pour les puissants du moment, sont les mêmes qui m’ont proposé de hautes fonctions que j’ai refusées. Comment alors aller me mêler des histoires de coup d’Etat alors que je suis candidat et que j’ai dépensé beaucoup d’argent ? C’est une question de bon sens, car j’allais perdre mes 25 millions de F CFA et avoir des problèmes de remboursement et même que je courrais des risques d’aller à la MACO.

 

Votre parti a-t-il été partie prenante dans la déclaration de soutien aux putschistes de la part du CDP et alliés  (CDP, ODT, UBN, NAFA et autres partis cagoulés en CAP) ?

Nous ne faisons pas partie du CAP et j’ignore ce que c’est d’ailleurs. Depuis un moment, nous étions dans une sorte de regroupement qu’on appelle Front républicain et dans ce front, on a une bonne partie de l’ex-majorité présidentielle plus des partis de l’opposition, qui n’étaient pas avec le chef de file de l’opposition et nous étions opposés à la question de la modification de l’article 37 pour lever le verrou. Mais nous n’étions pas opposés au dialogue ni au référendum. Depuis que les gens ont continué leur œuvre et qu’ils ont chuté, je n’ai jamais pu remettre les pieds nulle part. D’ailleurs, avant leur chute, je ne me mêlais pas des discussions car j’ai vu ceux qui étaient à la présidence du Faso lors du dernier Conseil des ministres de Blaise Compaoré où la décision devrait être prise. On nous avait tous appelé pour le dialogue à l’époque. Quand je suis sorti, la presse a voulu m’interviewer ; j’ai laissé entendre que je n’avais rien à dire et qu’elle pouvait plutôt aller vers les Hermann Yaméogo et autres. Parce qu’on avait dit tout simplement de dialoguer pour trouver une solution pour ne pas qu’on en arrive à lever le verrou de l’article 37. Quand j’ai vu qu’il y avait des velléités, je n’ai plus rien dit. J’ai fait comprendre que je ne faisais plus partie du regroupement. Mon nom n’y figure donc pas. Par contre, j’ai toujours dit que le Code électoral n’était pas bon, qu’il fallait l’inclusion. Je n’ai jamais signé cette déclaration dont vous parlez. Et si quelqu’un pense le contraire, qu’il m’apporte la preuve de cette signature.

 

Comment avez-vous accueilli la dissolution et le démantèlement du l’ex- Régiment de sécurité présidentielle (RSP) ?

C’était vraiment la main de Dieu. Quand vous prenez le rapport du Collège de sages, vous verrez que c’est nous- mêmes qui avons prôné cette dissolution. Renseignez-vous auprès de   l’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo ; c’est nous qui avons dit qu’il fallait dissoudre le RSP. Pendant longtemps, on a vu que cela était très difficile et qu’il fallait le faire avec tact parce que c’était des gens bien formés, avec un arsenal lourd. Il fallait donc aller doucement. A chaque fois que j’avais l’occasion de m’adresser au président Compaoré, je lui disais toujours de régler la question de l’Armée et d’accepter de quitter le pouvoir en paix. Je connaissais la délicatesse de cette question, l’ayant traitée au sein du Collège de sages. Après l’insurrection d’octobre 2014, lors de notre rentrée politique, la presse m’a encore questionné sur la question du RSP et j’ai répondu qu’il fallait éviter toute précipitation. J’ai préconisé le dialogue. Mais la main de Dieu a fait en sorte qu’ils se sont, pour paraphraser le président Jean-Baptiste Ouédraogo, tiré une balle dans le pied. Ce que nous regrettons, c’est le prix qui a été payé. J’ai toujours dis que si je suis élu, je vais résoudre la question du RSP. Cela étant déjà fait, si je suis élu président, je peux à présent m’attaquer au problème de développement. Donc, j’accueille avec beaucoup de joie cette dissolution, mais on rend hommage à ces gens encore une fois, qui ont voulu qu’il y ait plus de démocratie pour tous et qui ont perdu la vie. On dit du général Diendéré qu’il est un fin stratège. Je ne sais vraiment pas quelle mouche l’a piqué.

 

Le connaissez-vous particulièrement ?

Je ne connais pas particulièrement Diendéré. J’ai eu à serrer sa main deux ou trois fois, car on ne partageait pas les mêmes valeurs même si on est des parents, car nous venons tous deux de la province du Passoré. Mais nous n’avons jamais eu d’atomes crochus. J’ai même eu maille à partir avec lui en 1991. Lors du décès de Oumarou Clément Ouédraogo, c’est moi qui ai lu l’oraison funèbre au cimetière. Je les avais accusés d’avoir assassiné Clément et jusqu’à ce jour, je crois que Diendéré ne me l’a pas pardonné. Je confirme toujours que ce sont eux qui l’ont tué car moi-même j’ai failli y passer. Je vous assure que ce n’était pas facile pour nous. Le jour de la mort de Clément, nous étions en réunion chez feu Gérard Kango Ouédraogo. Quand on a fini la réunion, c’est Clément qui devait me déposer chez moi. Etant pressé et comme je causais toujours avec d’autres camarades, l’ancien ministre de l’Action sociale de Blaise Compaoré, Alain Zoubga, lui a dit qu’il pouvait rentrer et que lui, se chargerait de me déposer chez moi. Quelques minutes plus tard, on nous a informés de ce qui était arrivé. Lorsque je suis arrivé sur les lieux de l’assassinat, Clément n’était pas mort, mais il perdait tout son sang. Des éléments du RSP qui étaient au Conseil de l’entente, l’ont encerclé jusqu’à ce qu’il rende l’âme. C’est pourquoi nous parlons de pardon chaque fois. De plus, c’est moi qui ait traité le dossier, et avec la famille de Clément, nous avons tout fait pour essayer de prendre en charge les enfants et prôner le pardon. Ceux-là qui ruent dans les brancards aujourd’hui, ils étaient là, ils étaient complices. Je le répète chaque fois, le jour où je vais décider d’ouvrir la bouche, d’aucuns quitteront le Burkina. Mais je ne le ferai pas car lorsqu’on est un homme d’Etat, on évite de régler des comptes sordides qui peuvent mettre à mal la cohésion nationale. L’histoire jugera chacun. Je prône la cohésion, le pardon et la paix au Faso. J’ai été ministre de la Réconciliation en son temps et j’ai posé plusieurs actes pour le pardon et la paix. Mais ce n’est pas parce que je veux faire de la politique que je chercherai à incriminer d’autres personnes. Cela est le comportement d’un homme politicien et non d’un homme d’Etat.

 

Que devient le Front républicain ?

Avant les 30 et 31 octobre 2014, je ne pense pas qu’on parlait du Front républicain, car je ne participais plus aux différentes rencontres. En réalité, j’aurais dû continuer à parler de mon Front républicain pour une alternance pacifique dont les objectifs sont de parvenir à un changement dans la paix et la non-violence.

Hermann Yaméogo fait partie des hommes qui se sont battus pour la démocratie au Burkina. Je l’ai aussi considéré comme un homme d’Etat, mais il fait de la politique à l’ancienne

 

Que pensez-vous du sort de Hermann Yaméogo ?

C’est triste ! Mais comme j’aime à le dire, quand vous êtes un homme politique et surtout si vous êtes au pouvoir, vous avez trois options, à savoir la prison, l’exil et le cimetière avant l’heure. Au moment où je vous parle, je pouvais être à la MACO, surtout avec ces rumeurs qui faisaient état de ma nomination au poste de ministre de la Justice des putschistes. Hermann Yaméogo fait partie des hommes qui se sont battus pour la démocratie au Burkina. Je l’ai aussi considéré comme un homme d’Etat, mais il fait de la politique à l’ancienne. Ce qui crée des problèmes à Hermann aujourd’hui est qu’il a fait une déclaration au temps du putsch, pour dire qu’il était pour une transition avec les putschistes. Je regrette qu’il se retrouve dans cette situation aujourd’hui. Tout ce que je demande, c’est le pardon dans cette affaire pour que les Burkinabè soient ensemble. Mais il faut que cela serve de leçon à tous les hommes politiques. Les politiciens regardent le bénéfice immédiat, sans penser aux conséquences que cela peut entraîner. Celles-ci sont là aujourd’hui et c’est dommage. C’est regrettable que des politiques de leur trempe se retrouvent à la Maison d’arrêt et de correction des armées (MACA).

 

Avez-vous été surpris du fait que certains de vos alliés du Front républicain soient soupçonnés d’avoir pactisé avec les putschistes ?

Oui et non ! Les politiciens ne prennent pas le temps d’analyser. Plusieurs mises en garde ont été faites par des journaux dont le vôtre, pour demander aux dirigeants de ne pas franchir le Rubicon. Et j’ai même écrit un livre en 2011 où j’ai également mis Blaise Compaoré en garde. Mais les gens n’écoutent pas. On récolte toujours ce qu’on a semé. Mais c’est déplorable de voir que ce qui coule les hommes politiques au Burkina, c’est leur arrogance, leur suffisance. Avant que le CDP ne coule, j’ai clairement dit aux premiers responsables de ce parti qu’ils allaient chuter. Ce sont notamment Assimi Kouanda, Achile Tapsoba et autres. Je le leur ai dit et j’ai développé mes arguments. Mais ils ont toujours refusé de l’accepter. Après leur chute, il y a un d’entre eux qui m’a appelé pour me demander pardon pour tout ce qu’ils m’ont fait subir car j’ai été victime du CDP et il a regretté de ne m’avoir pas écouté.

 

Avez-vous des rapports avec Blaise Compaoré dans son exil ?

Non et c’est dommage. J’ai essayé de le voir mais je n’ai pas réussi. Lorsque je suis allé en Côte d’Ivoire le 30 mai dernier, pour recevoir un prix d’émergence et de développement, je suis entré en contact avec l’ambassadeur du Burkina en Côte d’Ivoire pour avoir les coordonnées de Blaise Compaoré et lui rendre visite. Mais il n’avait pas son contact. Donc je n’ai pas pu le voir. J’aurais aimé le voir pour qu’on échange sur tout ce qui s’est passé. Je ne sais pas si c’est le courage qui lui a manqué de se retrouver en face de celui qui lui a dit de ne pas faire, mais je n’ai pas réussi à le voir ni à avoir son contact. Je n’ai pas réussi à le voir et ça me désole car vu son parcours, ça m’aurait fait plaisir de me retrouver avec lui pour tirer quelques leçons pour l’avenir. C’est pour cela que Blaise Compaoré doit être en paix pour revenir au Burkina car il sera d’un bon conseil pour les hommes politiques et pour les générations à venir.

 

Pensez-vous qu’il aura ce courage ?

C’est mon souhait. Je ne pense pas qu’il vivra éternellement en exil. Il va rentrer un jour. A mon avis, c’est un homme responsable et il assumera ses actes. Il prodiguera aussi des conseils aux jeunes pour qu’ils évitent certains travers en politique.

 

Quels commentaires faites-vous de l’action de la Transition ?

La perfection n’est pas de ce monde comme on aime à le dire. Les autorités de la Transition ont fait ce qu’elles pouvaient, même s’il y a eu quelques imperfections. Mais la mission pour laquelle elles ont été choisies était d’organiser les élections. De ce point de vue, le bilan est acceptable. Nous sommes sur la bonne voie ; je souhaite qu’on n’ait pas de problème. Il y a aussi un peu d’amateurisme, mais il faut le comprendre. Les membres du CNT ne sont pas des professionnels de la politique. Plusieurs textes ont été votés et repris car incohérents. Ceux qui sont au niveau du gouvernement, pour la plupart, ne sont pas des politiciens non plus. Il y a des membres de la société civile qui pensaient que s’asseoir dans un fauteuil et critiquer était la même chose que si on était dans un gouvernement. Mais ils ont tous compris que gérer un pays n’est pas chose aisée. A leur décharge, ils ont fait ce qu’ils ont pu, même s’il y a eu des erreurs. Le temps qui leur a été donné fut court. J’aurais souhaité que la Transition soit de 16 mois au lieu de 12. Déjà, pour prendre de bonnes marques, il faut 4 mois. Ils se sont battus, ils ont fait de leur mieux. Mais ils ont intérêt à organiser des élections équitables et transparentes afin de sortir par la grande porte. Dans le cas contraire, l’histoire les rattrapera.

 

Avez-vous quelque chose d’autre à ajouter ?

Je souhaite qu’il y ait la réconciliation au Burkina, car cela est très important. Les gens meurent pour des questions politiques, alors qu’il est impossible de les réveiller. Pour toutes les contradictions, qu’elles soient économiques, sociales, de justice et j en passe ,elles doivent se régler par le dialogue et la concertation.Maintenant ,le mal est déjà fait ,il faut qu on trouve la solution  pour que les Burkinabé réapprennent a vivre  ensemble et que de telles situations ne se reproduisent plus jamais.Il y avait déjà un lourd contentieux en matière  de droits humains ,avant que   celui  qu on connait  aujourd’hui ne s y ajoute .Il faut donc une réconciliation véritable  et c est pour cela que la commission de réconciliation nationale et des reformes est revenue ,dans son rapport ,sur la question de la réconciliation nationale .Certes ,il faut aussi la réconciliation après cette justice .Donc ,j en appelle  a la réconciliation  et a la paix .Mes condoléances  aux familles  qui ont perdu les leurs  et je souhaite  prompt rétablissement aux  blesses .


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