HomeOmbre et lumièreRAPPORTS DE L’ASCE SUR LA CORRUPTION : Sanctionner pour l’exemple

RAPPORTS DE L’ASCE SUR LA CORRUPTION : Sanctionner pour l’exemple


Je suis tombé par hasard sur le rapport 2013 que l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat (ASCE) a présenté, le 31 décembre dernier, au président du Faso, Michel Kafando. Mais j’avoue que j’ai été fort surpris. En effet, ce rapport de 187 pages révèle que les malversations financières ou encore les détournements de deniers publics ont pignon sur rue au Burkina Faso, pays des Hommes dits intègres. Pire, le rapport précise que la corruption va crescendo, d’année en année. Elle a même été multipliée par 10, à en croire les experts. Pourtant , il existe une kyrielle d’institutions chargées de lutter contre la corruption. Je veux parler notamment de l’ASCE elle-même, de la Cour des comptes et du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-Lac), qui font un travail remarquable sur le terrain. Pourquoi alors, au lieu de régresser, la corruption progresse-t-elle tel un cancer qui se métastase et qui affecte tout le monde, pour ainsi dire ? La réponse est simple. On a envie de dire que sous le régime de Blaise Compaoré, l’intégrité passait pour un délit, l’honneur un vilain défaut et l’excellence un crime. La preuve, on a vu l’ancien régime chasser des hommes propres placés à des postes de responsabilités, pour y placer des délinquants à col blanc. Si bien que chacun en faisait à sa tête, convaincu que rien ne lui arriverait. Je crois que ce qui préoccupait plus le Nabab Blaise Compaoré, c’était son pouvoir. Faites tout ce que vous voulez, pourvu que personne n’ose convoiter son fauteuil; c’était, hélas, la triste réalité. Si bien qu’on laissait les gens faire. C’est pourquoi je me demande même si l’ancien président ne s’en moquait pas, chaque fois qu’on lui présentait un rapport qui incriminait des gens qu’il avait choisis pour les placer là où il voulait. Tout se passait, en tout cas, comme si ce qui l’intéressait quand il recevait un rapport de l’ASCE, était de savoir comment il l’exploiterait politiquement, de sorte à tenir certains anciens “gourous” malhonnêtes de la République en laisse. C’est pourquoi j’ai fini par croire – qu’on me dise le contraire si j’ai tort – que Blaise Compaoré aimait moins les gens propres que les gens sales, parce qu’il se disait sans doute qu’avec les sombres pratiques de ces derniers, il avait là une carte en main pour les dissuader de le contester. En un mot comme en mille, il les tenait par la barbichette.

Le rôle d’un rapport est d’améliorer la gouvernance politique et économique

Cela dit, je tiens tout de même à féliciter l’ASCE qui, en dépit des difficultés auxquelles elle faisait face, n’a jamais baissé les bras. Elle produit régulièrement ses rapports qu’elle transmet à l’autorité compétente censée donner suite aux différentes affaires. Mais une fois entre les mains de l’autorité, celle-ci en fait ce qu’elle veut. Peut-être même, et ce n’est pas absurde de le penser, qu’une fois le rapport transmis, les noms de certains barrons épinglés étaient vite gommés, au risque de les exposer au grand public. On est au Burkina où tout se sait. Difficile de se cacher dans cette vaste savane où le paysan des confins des Cascades sait si son compère de Liptougou dans l’Est du Burkina a mangé à sa faim, la nuit dernière. Et pourtant, le rôle d’un rapport est d’améliorer la gouvernance politique et économique dans un pays.

En tous cas, si l’on veut que les rapports que produit l’ASCE se suivent sans se ressembler, il faut, à mon avis, donner un pouvoir de répression à cette institution ou créer des passerelles entre elle et la Justice qui pourrait, une fois le rapport fourni, traquer tous ceux-là qui gèrent nos biens publics comme un patrimoine familial.  Cela pourrait encourager tous ces hommes et femmes qui se battent corps et âme, pour que la transparence soit la chose la mieux partagée dans la gestion des derniers publics.

En tout état de cause, pour que plus rien ne soit comme avant, comme on le dit depuis la chute du régime de Blaise Compaoré, il faudra qu’on opère un changement de mentalités, en considérant comme sacrée la chose publique. Car la bonne gouvernance passe par là. Et le changement doit venir de chacun de nous d’abord.

« Le Fou »


Comments
  • Bel article!

    24 janvier 2015
  • L’ancien a mis les gens sales à des postes de responsabilités dans le but de les mettre sous son contrôle. Ces hommes, en effet, une fois écartés ne sont plus en mesure de dénoncer le régime parce que eux même ne sont pas propres.

    24 janvier 2015
  • Juste le fou. Le problème du burkina c’est la corruption. Tout le monde le sait. Mais difficile de lutter contre cette gangrène. Au burkina, on a jamais vu une autorité ou ex autorité être condamné pour corruption. On regle les affaires de crime économique à cout de milliard à l’amiable comme si c’était une affaire de famille. Les crimes politiques je n’en parle même pas

    25 janvier 2015

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