HomeA la uneREACTION DE KINSHASA AUX PROPOS DU PRESIDENT ANGOLAIS

REACTION DE KINSHASA AUX PROPOS DU PRESIDENT ANGOLAIS


La fuite en avant continue

En visite officielle de trois jours en France, qui a débuté le 28 mai dernier, le président angolais, Joao Lourenço, outre les questions de coopération bilatérale qui étaient au menu des échanges avec son hôte français, Emmanuel Macron, s’est exprimé sur le dossier congolais. Sur la question, Paris et Luanda sont sur la même longueur d’onde quant au respect de l’accord de la Saint Sylvestre 2016, comme solution de sortie de crise en RD Congo. Un accord que le président Kabila s’est investi à torpiller du fait qu’il le met hors jeu dans la course à sa propre succession. Et au moment où il croyait avoir habilement manœuvré pour enterrer définitivement ledit accord au grand dam de ses contempteurs, voilà que le nouveau président angolais jette un pavé dans la mare en remettant la question sur le tapis, au sortir d’un entretien avec le locataire du palais de l’Elysée. Et de quelle manière !? Morceaux choisis : «On n’a pas la prétention d’intervenir dans les affaires internes d’un pays, nous conseillons seulement. Nous montrons le bon chemin, le respect des accords qui disent qu’il doit y avoir les élections et aussi que l’actuel président ne doit pas postuler. Le pouvoir politique doit libérer les prisonniers politiques, pour créer un environnement favorable à la tenue des élections. (…)». Surfant pratiquement sur la même vague, son hôte français y est aussi allé de son commentaire : « La France viendra en soutien des initiatives qui seront prises par les pays de la région et l’Union africaine, qui est simplement celle de faire appliquer les accords qui, seuls, permettront une clarification de la situation politique, sans aucune complaisance, dans le calme et avec clarté». De quoi donner de l’urticaire aux autorités de Kinshasa qui voient derrière ces sentiments partagés, une conspiration contre la RDC. Et le porte-parole du gouvernement, Lambert Mendé, n’est pas passé par quatre chemins pour le faire savoir, mettant au passage en garde contre une éventuelle déstabilisation de la RDC. Fidèle à lui-même, il n’a pas hésité à couler, une fois de plus, un bronze verbal. De quoi je me mêle ? S’est-il étranglé, invoquant comme à l’accoutumée, la prétendue souveraineté de la RDC.

Cette position de la France et de l’Angola, pourrait être salvatrice pour le peuple congolais

Cela dit, est-ce le chant du cygne pour Joseph Kabila ?
L’histoire le dira. En attendant, cette position de Paris et Luanda sonne comme un avertissement sans frais pour le locataire du Palais du bord de mer qui est en train de jouer les prolongations depuis plus d’un an à la tête de l’Etat congolais et qui cherche visiblement à mener tout le monde en bateau, en attendant de trouver la meilleure formule pour se remettre en selle dans la course à sa propre succession. C’est pourquoi cette sortie du président angolais, au risque d’être quelque peu en porte-à-faux avec les règles de la diplomatie, est empreinte de courage. Car, il est rare, sous nos tropiques, de voir des présidents en exercice se prononcer aussi ouvertement sur les lubies de certains de leurs pairs souvent en délicatesse avec les règles de la démocratie. La plupart du temps, c’est un silence assourdissant voire coupable qui est observé par les têtes couronnées du continent, quand certains n’apportent pas en coulisse leur soutien au satrape pour l’aider à réussir sa forfaiture. Dans le cas de la RD Congo où le président Kabila est constitutionnellement disqualifié pour briguer un autre mandat mais ne se résout toujours pas à organiser les élections qui ouvriraient sa succession, ce n’est pas faute d’avoir essayé que les Congolais épris d’alternance montrent quelquefois des signes de résignation. C’est pourquoi l’on ne s’y tromperait pas, en voyant derrière cette position affirmée de la France et de l’Angola, un soutien inespéré qui pourrait regonfler à bloc l’opposition congolaise dans sa lutte pour le changement. Et si la France venait à lâcher Kabila, le rêve de nombreux Congolais qui ne demandent qu’à voir l’homme fort de Kinshasa débarrasser le plancher, pourrait enfin devenir réalité. C’est certainement ce qui a mis Lambert Mendé dans tous ses états. Et l’on comprend sa réaction qui n’est ni plus ni moins qu’une fuite en avant. Cependant, comme le dit l’adage, « la vérité rougit les yeux, mais ne les casse pas ». Et cette position plutôt osée et tranchée de la France et de l’Angola, qui pèse comme une épée de Damoclès sur la tête de Joseph Kabila, pourrait être salvatrice pour le peuple congolais. C’est peut-être l’objectif recherché, pour contraindre le maître de Kinshasa à respecter les règles du jeu démocratique.

Outélé KEITA


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