HomeA la uneREJET DU PROJET DE REVISION CONSTITUTIONNELLE AU BENIN PAR L’ASSEMBLEE NATIONALE : Patrice Talon doit maintenant rester tranquille

REJET DU PROJET DE REVISION CONSTITUTIONNELLE AU BENIN PAR L’ASSEMBLEE NATIONALE : Patrice Talon doit maintenant rester tranquille


Au Bénin, c’est le projet de révision constitutionnelle du président Patrice Talon qui fait débat. En effet, alors que plusieurs voix et pas des moindres se sont déjà élevées contre ce projet qui paraît pour le moins impopulaire, le pouvoir de Cotonou semble n’en a avoir cure puisque le texte a échu sur la table de l’Assemblée nationale qui devait se prononcer, le 4 avril dernier, sur le principe de la révision, sans entrer pour autant dans le fond pour le moment. Mais c’était sans compter avec la détermination des contestataires qui entendaient empêcher le travail des députés. Finalement, la session a pu se tenir, malgré une faible mobilisation qui était loin de celle des grands jours. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la démocratie est vraiment en marche au Bénin où la pluralité des opinions et leur libre expression n’est pas une vue de l’esprit. C’est pourquoi il faut saluer le calme dans lequel s’est déroulée la manifestation de cette journée qui ressemblait à une journée de tous les dangers, eu égard à la détermination qu’affichaient les croquants à empêcher coûte que coûte l’examen du texte par les parlementaires.  Finalement, il y a eu plus de peur que de mal aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’hémicycle où les choses se sont décantées à l’issue du vote qui a vu le rejet dudit projet, pour n’avoir pas obtenu l’approbation requise des trois quarts des députés. Talon peut donc ranger son projet dans les placards. Il doit maintenant rester tranquille. En tout cas, on se demande comment il pouvait en être autrement, quand on voit toute la mobilisation qu’il y a eue au sein du peuple pour faire barrage à ce projet. D’autant plus qu’à la suite des magistrats qui avaient battu le macadam pour protester contre ce projet de réformes constitutionnelles qu’ils trouvaient « très inquiétant » parce qu’il consacre, selon eux, « la fin de l’indépendance de la magistrature », plusieurs autres voix se sont élevées pour le dénoncer, notamment des membres de l’opposition, de la société civile et même d’anciennes têtes couronnées tel l’ex-président Nicéphore Soglo, qui n’est pas passé par quatre chemins pour pourfendre l’actuel locataire du palais de la Marina en soutenant haut et fort qu’«il faut vite ranger le projet de révision de la Constitution dans les placards et penser aux choses sérieuses, aux paysans, aux artisans, aux jeunes… ».

Ce n’est pas tant la révision de la loi fondamentale qui pose problème que les aspects fondamentaux qui devraient connaître des retouches

En outre, la démission spectaculaire du ministre de la Défense,  Candide Azanna, dans les conditions que l’on sait, en dit aussi long sur ce projet controversé. Pourtant, bien des Béninois y étaient favorables, car la loi est restée inchangée depuis 27 ans et beaucoup pensent qu’il est temps de la moderniser. En tout état de cause, tout porte à croire que ce n’est pas tant la révision de la loi fondamentale qui pose problème que les aspects fondamentaux qui devraient connaître des retouches. En cela, si d’aucuns ne voient pas forcément d’un mauvais œil le mandat présidentiel unique de six ans par exemple, la question de l’immunité des dignitaires de la république par contre, en l’occurrence le président, les ministres et les députés, contre « toute mesure privative de liberté, y compris pour les faits antérieurs à leur élection », a du mal à passer. C’est pourquoi l’on avait du mal à comprendre l’obstination du président Talon à aller à cette révision constitutionnelle malgré la clameur réprobatrice, donnant quelque part le sentiment de faire dans l’entêtement, au point que l’on se demandait si cela ne cachait pas quelque chose. En tout cas, pour beaucoup d’observateurs, en donnant l’impression de voguer à contre-courant de l’opinion de son peuple, Talon était en train de vendanger l’héritage de ses devanciers qui ont su ériger le Bénin au rang de l’une des démocraties les plus avancées et les plus respectées du continent. Et certains en étaient encore à se demander comment le chef de l’Etat de ce pays voisin du Burkina pouvait se risquer à un tel entêtement, après le sort peu enviable qui a été celui que l’on sait de Blaise Compaoré qui avait les mêmes visées révisionnistes contestées. Pour le Bénin, l’histoire retiendra que les choses se sont décantées d’elles-mêmes au sein de l’hémicycle, contrairement au Burkina où le peuple insurgé a dû prendre ses responsabilités. En tout cas, Cotonou n’est pas Ouagadougou.

Outélé KEITA


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