HomeA la uneREPRISE DES HOSTILITES A JUBA : Peut-on encore sauver le Soudan du Sud ?

REPRISE DES HOSTILITES A JUBA : Peut-on encore sauver le Soudan du Sud ?


 

Juba compte encore ses morts et panse ses plaies. En effet, la capitale du Soudan du Sud a encore été le théâtre d’affrontements meurtriers entre les forces armées fidèles au président soudanais Salva Kiir et celles de son rival, le vice-président, Riek Machar. Les deux hommes, comme on le sait, ne sont pas vraiment en odeur de sainteté. C’est la pression de la communauté internationale, notamment des Etats-Unis d’Amérique, qui les avait contraints à reprendre récemment leur cohabitation au sommet de l’Etat. Malgré cette cohabitation, l’esprit de belligérance ne s’est pas vraiment évanoui pour autant. Ces nouveaux affrontements avec leur corollaire de morts et de populations qui fuient la capitale, confirment à souhait cette relation tendue, ce climat délétère entre les deux leaders du pays. Ces violences suscitent la réprobation un peu partout dans le monde. Certains pays s’emploient à évacuer leurs ressortissants et  l’oncle Sam a dû se résoudre à envoyer des militaires sécuriser son ambassade et ses autres intérêts dans le pays. Il faut dire que le conflit politique au Soudan du Sud est difficile à régler du fait de sa connotation ethnique (Dinka et Neuer opposés les uns aux autres) et de l’incurie des deux frères ennemis que sont le président et son vice-président. Ces deux leaders se sont suffisamment illustrés par leur incapacité à transcender leurs intérêts égoïstes, à surpasser leur ego, à bien des égards surdimensionnés. C’est le triste constat qui se dégage de l’histoire du plus jeune Etat au monde à ce jour. Les cinq années d’indépendance ont servi à alimenter cette guerre fratricide.

Les dirigeants du Soudan du Sud sont la cause de la souffrance des populations

Salva Kiir et Riek Machar auraient-ils voulu donner raison à ceux qui ne voyaient pas d’un bon œil la naissance de ce nouvel Etat aux confins du Soudan, qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement. Les hommes qu’ils ont sous leur commandement, ont du mal à cohabiter à Juba, certainement en raison du fait qu’ils ont passé près de deux années à se combattre. La méfiance est donc la chose la mieux partagée entre l’armée fidèle à Salva Kiir et les ex-rebelles qui soutiennent Riek Machar. A l’heure qu’il est, c’est Omar el Béchir qui, certainement, est en train de rire sous cape. Les dirigeants sud-soudanais auront prouvé aux yeux du monde qu’ils sont les premiers acteurs des malheurs de leur pays. A présent que les morts se comptent à tour de bras, que le vice-président s’est retranché quelque part avec ses hommes, que des pays évacuent leurs ressortissants et que les populations fuient avec raison le pays, peut-on encore sauver le Soudan du Sud ? On en vient à se poser la question, tant les jours à venir sont incertains et l’équation semble des plus insolubles. Car, comme l’a souligné avec regret la présidente de la Commission de l’Union africaine, Nkosazana Dlamini Zuma, se prononçant sur cette reprise des hostilités à Juba, les dirigeants du Soudan du Sud sont hélas la cause de la souffrance des populations qu’ils sont censés servir et protéger. Ils semblent déterminés à veiller au malheur de leurs propres populations. Tout porte à croire que ces leaders ne se sont jamais départis de leur volonté de s’étouffer l’un l’autre, prenant les pauvres populations en tenaille dans leurs affrontements. L’Autorité intergouvernementale pour le Développement (IGAD) qui assure la médiation entre les frères ennemis, semble dépassée par les événements.

Il appartient à la Communauté internationale de se dépêcher de prendre des mesures fortes

Certes, au regard des derniers développements, il n’est pas exclu que le président et son vice-président ne soient plus maîtres de leurs hommes. C’est ce que laisse penser le fait que leurs éléments n’ont pas été vraiment réceptifs à leurs appels au cessez-le-feu. Si cela s’avérait, cela voudrait tout simplement dire que les monstres sont en train d’échapper à leurs géniteurs. Il se peut également que ce soit de la poudre aux yeux. En effet, Kiir et Machar peuvent faire semblant d’appeler à la cessation des hostilités tout en entretenant, en sous-main, la flamme de la guerre, en poussant chacun ses troupes, à faire feu sur les positions ennemies. Quoi qu’il en soit, ces commandants portent l’entière responsabilité des impairs que commettent leurs hommes. Cela dit, l’amnistie proposée aux ex-rebelles par le président sud-soudanais est choquante. On peut comprendre le souci de Salva Kiir, de faire baisser le mercure. Mais, alors même que le brouillard des combats ne s’est pas encore dissipé, il est trop tôt pour blanchir ceux qui sont impliqués dans les violences, au nom d’une quelconque volonté d’apaiser le climat. A cette allure, la mise en place du tribunal international prévu dans l’Accord signé en 2015 par les protagonistes, pour juger les crimes de guerre commis dans le pays, aura bien du mal à être une réalité. C’est cette tendance à l’impunité qui ronge la gouvernance des pays africains. Elle fait le lit des exactions futures, les combattants n’étant jamais dissuadés par quelque sanction que ce soit. Il est grand temps pour la communauté internationale, à travers le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies, de bander les muscles, conformément à l’appel lancé par Ban Ki- Moon sur la question. Les Etats-Unis d’Amérique, notamment, ne peuvent pas se payer le luxe de regarder ainsi sombrer ce pays, considéré comme leur bébé. En tout état de cause, il urge de travailler courageusement à réduire à sa plus simple expression, voire à anéantir, la capacité de nuisance des deux leaders du Soudan du Sud. Cela passe par des actions énergiques contre eux, mais aussi par l’avènement de nouveaux leaders, plus patriotes et aptes à rapprocher les populations, les ethnies les unes des autres, dans le cadre d’un Etat uni. Face à l’échec de ces chefs de gangs, incapables de se comporter en véritables hommes d’Etat, face à leur incapacité supposée ou réelle à maîtriser leurs hommes, il appartient à la Communauté internationale de se dépêcher de prendre des mesures fortes et appropriées. Au besoin, il faudra penser à mettre le Soudan du Sud sous tutelle onusienne, le temps de faire émerger de nouveaux leaders, respectables, patriotes, à même d’apporter la paix et la cohésion dans ce pays.

« Le Pays »


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