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REVOLUTION D’AOUT 1983


Dans les déclarations ci-dessous parvenues à notre rédaction, le président de l’OPA-BF  revient sur la révolution d’août 1983 qu’il considère comme une conception endogène du développement. Ce faisant, il dit non aux « modèles prêts à porter » qui, parfois, sont en total déphasage aves nos réalités. Lisez !

 

« Le 4 août 1983, le Capitaine Thomas Sankara, appuyé par des partis politiques et des officiers progressistes de l’armée, prenait le pouvoir en Haute Volta, rebaptisée un an plus tard Burkina Faso, pays des « Hommes intègres ». Largement soutenu par les masses populaires dans les villes et campagnes, le Conseil National de la Révolution (CNR) affiche la ferme volonté de rompre définitivement avec les anciennes pratiques comme la corruption, le laxisme dans les services de l’Etat et le népotisme, qui maintenaient jusque-là le pays dans la misère, de compter d’abord sur ses propres forces et de ne plus se laisser dicter les orientations politiques et économiques par les puissances extérieures. Un tel schéma, opté par Thomas Sankara pour  développer le Burkina Faso, renvoie au processus de transformation économique, sociale, culturelle, scientifique et politique, basé sur la mobilisation des ressources  et des forces sociales internes et l’utilisation des savoirs et expériences accumulés par le peuple. C’est cette conception endogène du développement qui a permis ainsi aux masses populaires  d’être des agents actifs de la transformation de la société burkinabè au lieu de rester des spectateurs de politiques inspirées par des modèles importés.   En effet, le premier Plan populaire de développement (PPD), couvrant la période allant d’octobre 1984 à décembre 1985, avait été adopté après un processus participatif et démocratique, jusque dans les campagnes les plus reculées du pays. Son financement était à 100% burkinabè. Il faut noter que de 1985 à 1988, notre pays n’a reçu aucune « aide » étrangère, ni des pays occidentaux, France comprise, ni de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI). Nous avons entièrement compté sur nos propres forces et sur la solidarité de pays amis partageant la même vision et le même idéal. L’engouement populaire, surtout des Comités de Défense de la Révolution (CDR), et l’esprit de compter sur ses propres forces avaient permis d’accomplir 85% des objectifs du PPD !  C’est ainsi qu’en une année, 250 réservoirs d’eau furent construits et plus de 3 000 puits creusés. Il y eut d’autres réalisations dans le domaine de la santé, de l’habitat, de l’éducation, de la production agricole, etc. Pour le président Thomas Sankara, «  le plus important, c’est d’avoir amené le peuple à avoir confiance en lui-même, à comprendre que finalement, il peut s’asseoir et écrire son développement, il peut s’asseoir et écrire son bonheur, il peut  dire ce qu’il désire et en même temps, sentir quel est le prix à payer pour ce bonheur ».

 

NON au « modèles prêt-à-porter »

 

La dette totale du Burkina Faso s’élevait, en 2019, à plus de 3 400 milliards de F CFA, et nonobstant tous ces emprunts effectués, notre pays reste l’un des plus pauvres de la planète : plus de 44% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (1,25 dollar/jour) ; plus de la moitié de cette population survit au quotidien avec moins de 50 centimes. Pourquoi cette flambée de la dette extérieure qui, au lieu  de sortir le Burkina Faso de la pauvreté, ne fait que l’appauvrir ?  s’interroge-t-on. A ce propos, le président Sankara révèle : « Nous avons refusé les prêts de la Banque mondiale pour alimenter des projets que nous n’avons pas choisis… Nous avons dit au FMI : ce que vous nous demandez, nous l’avons fait. Nous avons réduit les salaires, assaini l’économie, vous n’avez rien à nous enseigner. Or, à chaque fois que nous parlions au FMI, il nous fallait fournir toujours de nouveaux gages. Il nous est apparu que ce qu’il cherche va bien au-delà d’un contrôle de gestion et que ce dont il s’agit, n’est autre chose qu’un contrôle politique ».   Et de conclure : « Il faut proclamer qu’il ne peut y avoir de salut pour nos peuples que si nous tournons radicalement le dos à tous ces modèles qu’on a essayé de nous vendre 20 ans durant. Il ne saurait y avoir pour nous de (…) développement en dehors de cette rupture ». Il savait bien de quoi il parlait. En fait, depuis les indépendances, les pays africains ont fait l’expérience de beaucoup de « modèles de développement », mais tous venus de l’extérieur et qui se sont soldés par un échec lamentable, avec des coûts exorbitants pour le continent dans tous les domaines.

 

L’émancipation de la femme

 

En déclarant qu’« on ne peut transformer la société en maintenant la domination et la discrimination à l’égard des femmes qui sont plus de la moitié de la société…notre révolution, durant les trois ans et demi, a œuvré à l’élimination progressive des pratiques dévalorisantes de la femme…Aussi celle-ci doit-elle s’engager davantage à produire et consommer burkinabè, en s’affirmant toujours comme agent économique de premier plan…Ensemble, nous devons toujours veiller à l’accès de la femme au travail. Ce travail émancipateur et libérateur qui garantira à la femme l’indépendance économique, un plus grand rôle social et une connaissance plus juste et plus complète du monde », Thomas Sankara avait bien compris que le développement, comme processus de transformation économique, sociale, politique et culturelle, ne peut devenir une réalité sans la libération et l’émancipation totale de la femme, la fin de toutes les formes de discriminations à son égard et sa participation active dans le processus de transformation. Il était très en avance par rapport à ses pairs africains et certains dirigeants occidentaux et institutions internationales qui célèbrent de nos jours avec clairons et tambours, « la libération » de la femme par la création de l’ONU-Femmes, l’adoption de lois sur le quota et d’autres mesures visant à l’émancipation économique, sociale et politique de la femme, autrement dit à son autonomisation. Une fois encore, l’histoire a amplement fait justice à la clairvoyance et à la vision stratégique du Président Sankara, qui était largement en avance sur son temps !

 

Sankara, l’alternative panafricaniste

 

L’engagement panafricaniste révolutionnaire du Président Thomas Sankara l’avait amené à apporter un soutien concret aux organisations et leaders en lutte armée sur le continent africain : SWAPO, ANC, FRONT POLISARIO, RASD, JOHN GARANG, YUERI MUSSEVENI, et à faire du Burkina Faso la terre d’accueil et d’exil de progressistes qui avaient maille à partir avec les pouvoirs dictatoriaux d’Afrique. Son idée de création de l’Institut des Peuples Noirs (IPN) avait séduit l’UNESCO et la diaspora noire dans le monde et en particulier aux USA. De grandes rues, des lycées et collèges de notre pays portent des noms d’illustres Africains ou de révolutionnaires : Mandela, Bambata, Samora Machel, Che Guevara, etc. L’ultime combat du leader de la Révolution d’août fut celui contre la dette, lors du sommet de l’OUA, le 29 juillet 1987, au cours duquel, conscient du danger à s’engager seul,  il appela  les chefs d’Etat  africains à constituer un front uni contre la dette : « Si le Burkina Faso, tout seul, refuse de payer la dette, je ne serai pas là à la prochaine conférence », avait-il averti. Il est assassiné le 15 octobre 1987, deux mois et demi après. Thomas est donc mort pour la libération des peuples africains. Sur la question de l’unité africaine, déjà en 1985, ses réponses sont sans équivoque : « Notre foi en l’unité africaine se consolide davantage au regard des problèmes politiques, socio-économiques qui démontrent que nous n’avons qu’une alternative à propos de l’Afrique : mourir chacun de son côté ou résister ».

 

Une relève en marche avec le néo-panafricanisme révolutionnaire

 

Aujourd’hui, des panafricanistes, partout sur le continent africain et ailleurs, à travers des partis politiques et mouvements de la société civile, militent pour l’unité africaine effective. Les tentatives d’unité par en haut ayant montré leurs limites, il faut que l’initiative revienne aux peuples africains. Et les peuples ne peuvent agir dans l’inorganisation, d’où, pour nous, la nécessité de la création d’une organisation des peuples africains (OPA).  Laissant aux gouvernements leur « Union Africaine », l’Organisation des peuples Africains – Section Burkina Faso (OPA-BF), un parti de l’avant-garde panafricaniste, s’engage résolument, aux côtés de notre peuple et des autres peuples africains,  par son projet de société révolutionnaire, fondé sur le néo-panafricanisme, à atteindre l’objectif de la création des Etats-Unis d’Afrique, dont le Burkina ne sera que l’un des Etats fédérés.   Dans ce contexte actuel de mondialisation, toute révolution solitaire est vouée à l’échec. Notre révolution doit prendre une nouvelle forme et devra s’adapter. L’expérience de notre pays nous livre des enseignements. C’est pour cela que nous reprenons à notre compte cet appel révolutionnaire « L’orientation idéologique qui convient, est celle qui trace la voie pour une réponse adéquate à la question sociale fondamentale du moment. Quelles préoccupations assaillent nos masses à l’heure actuelle ? Les doctrines des partis politiques doivent être jugées en fonction de la vision qu’elles se font du destin de nos communautés les plus représentatives et de l’orientation qu’elles entendent imprimer à l’évolution de nos sociétés. Notre jeunesse, particulièrement, doit être théoriquement armée, pour être à même de juger et de prendre parti. Nous devons désormais inscrire notre action dans une perspective moins passionnée, plus large, plus mobilisatrice, autour de grands thèmes qui transcendent les programmes politiques conjoncturels, une perspective qui soit à même de drainer des forces de progrès derrière nous, parmi lesquelles la jeunesse burkinabè désemparée. Et aujourd’hui, un de ces thèmes à même de combler le vide créé dans la conscience des forces patriotiques, dans celle des forces de l’avenir, c’est celui de l’Unité africaine, en ce qu’elle est une forme de mutualisation qui réduirait la fragilité de nos micro-Etats. Tout projet politique dans l’Afrique d’aujourd’hui, qui ne s’inscrit pas dans la perspective de l’intégration des Etats africains, est un discours creux et sans effets… Il est aujourd’hui temps de trouver une idéologie intégratrice qui permette à notre pays et à l’Afrique de se frayer un chemin dans l’étape actuelle de la lutte. »

 

 Le Burkina ma fierté, l’Afrique ma force ! 

 

Ouagadougou, le 2 août 2020

                                                                             Pour l’O.P.A.-BF

Le président

 

Me Ambroise Segui FARAMA »

 


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