HomeA la uneSANCTIONS DE L’UE CONTRE DE HAUTS DIGNITAIRES CONGOLAIS :  Et Kabila dans tout ça ?

SANCTIONS DE L’UE CONTRE DE HAUTS DIGNITAIRES CONGOLAIS :  Et Kabila dans tout ça ?


L’Union européenne (UE) vient de prendre des sanctions contre neuf hauts responsables en RD Congo. L’information est officielle depuis le 29 mai dernier. Il s’agit de Kalev Mutond, chef de l’Agence nationale des renseignements congolais, Evariste Boshab, ex-vice-Premier ministre et ex-ministre de l’Intérieur et de la sécurité publique, Ramazani Shadari, actuel ministre de l’Intérieur et de la sécurité publique, Alex Kandé Mupompa, gouverneur du Kasaï central, le brigadier général Eric Ruhorimbere, chef des opérations militaires dans la région, Jean-Claude Kazembe Musonda, ex-gouverneur du Haut-Katanga, Muhindo Akili Mundos, commandant de la 31e brigade de l’armée congolaise, Gédéon Kyungu, chef milicien et Lambert Mendé, le ci-devant porte-parole du gouvernement. Si les huit premiers cités sont dans le collimateur de l’institution européenne pour faits de violation des droits de l’Homme et usage disproportionné de la force par les services de l’Etat, le truculent porte-parole du gouvernement, Lambert Mendé, semble, pour sa part, payer pour sa verve et son sens un peu trop poussé de la répartie en faveur de la politique répressive du gouvernement de Joseph Kabila. Toutes choses qui le font passer, à bien des égards aux yeux de l’UE, pour l’un des obstacles au bon déroulement du processus démocratique. Les sanctions prises contre ces personnalités congolaises vont de l’interdiction de pénétrer sur le territoire de l’UE au gel de leurs avoirs et à l’interdiction de percevoir des fonds de quelqu’un en Europe. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’UE, à la différence de l’Union africaine (UA) qui prône un dialogue dont elle sait pertinemment qu’il n’aboutira à rien, n’est pas impassible face à la détérioration de la situation en RDC où le président Joseph Kabila, constitutionnellement en fin de mandat depuis décembre dernier et disqualifié pour prétendre à sa propre succession, est à la manœuvre pour se maintenir au pouvoir. S’appuyant sur des collaborateurs zélés acquis à sa cause ou tenus par la barbichette. Et c’est peu de dire que la situation de tension qui prévaut dans les Kasaï avec son lot de morts et d’exactions sur les populations, est pain bénit pour le satrape de Kinshasa qui joue visiblement la montre pour ne pas aller aux élections. C’est pourquoi, au-delà de leur pertinence et de leur opportunité qui peuvent être sujettes à caution, ces sanctions de l’UE contre ces hauts responsables congolais dans le but de faire bouger les lignes, sont à saluer. D’autant plus qu’elles sont dirigées contre des personnalités influentes dont les actes sont jugés nuisibles à l’intérêt général et à l’avancée du processus démocratique, dans une RDC aujourd’hui à la croisée des chemins, du fait de l’incurie de la classe politique. Mais et Kabila dans tout ça, peut-on s’interroger ?

L’on peut regretter que l’UE ait frappé à la périphérie en évitant de frapper au centre

En effet, si l’objectif est de punir les principaux acteurs de la scène politique congolaise dont les actions freinent ou mettent en péril le processus démocratique, l’on ne comprend pas comment l’UE peut s’en prendre à du menu fretin et épargner le gros poisson Kabila dont tout le monde sait aujourd’hui que c’est lui et lui seul le principal problème en RDC. C’est pourquoi l’on peut regretter que l’UE ait frappé à la périphérie en évitant de frapper au centre. Pourquoi frapper les acolytes et épargner le chef bandit ? Cela aussi est l’une des curiosités de la politique des Blancs que la raison de l’Africain lambda ne comprend pas toujours sur le continent. Maintenant que ces sanctions ont été prises, la véritable question est de savoir ce qu’elles représentent et quel impact elles pourraient avoir sur les intéressés. En tout cas, au-delà de l’effet d’annonce, il y a lieu de craindre que ces sanctions ne produisent pas les effets escomptés et qu’elles coulent sur la peau des intéressés, comme de l’eau sur les plumes d’un canard. Pire, ces sanctions pourraient au finish apparaître comme des mesurettes qui auront le don de galvaniser davantage les intéressés dans leur combat pour maintenir le satrape au pouvoir. Et l’on ne serait pas surpris qu’un Lambert Mendé se fende d’une de ces répliques incendiaires dont lui seul a le secret, pour tourner en dérision ces sanctions. Il aurait donc fallu aller plus loin. Quoi qu’il en soit, à la faveur de ces sanctions ciblées qui frappent des proches de Joseph Kabila alors que lui-même est épargné, l’on pourra toujours tirer la leçon qu’il ne faut jamais lier étroitement son destin à celui d’un dictateur. En cas de coup dur, lui pourrait toujours s’en sortir là où ses collaborateurs les plus fidèles laisseraient des plumes et pas des moindres, si ce n’est leur honneur. Le cas de l’ex-président burkinabè Blaise Compaoré est d’ailleurs suffisamment éloquent à ce propos. Que chacun se le tienne donc pour dit.

Outélé KEITA


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