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SOMMET DE NOUAKCHOTT SUR LA SECURITE


 Le G5 Sahel victime du large spectre de ses ambitions ?

Alors que la question de l’opérationnalisation de la Force du G5 Sahel achoppe toujours sur des questions financières, les chefs d’Etat des cinq pays du Sahel que sont le Mali, le Burkina Faso, le Niger, la Mauritanie et le Tchad étaient en conclave le 6 décembre 2018, dans la capitale mauritanienne, pour chercher à mobiliser la rondelette somme de deux milliards d’euros pour le financement de projets communautaires, principalement dirigés vers les régions frontalières des cinq pays. Hormis le président malien, les quatre autres chefs d’Etat des pays concernés étaient présents au sommet de Nouakchott dont l’importance n’est plus à démontrer puisqu’il s’agit de trouver des fonds à consacrer aux zones particulièrement frappées par le terrorisme,  dans le but de fixer les populations dans leurs localités.

L’albatros de la force commune est toujours cloué au sol à cause d’une sciatique financière

L’objectif, comme on peut le constater, est noble. Et l’on peut comprendre l’approche parce tout le monde tend à s’accorder sur le fait que la lutte contre le terrorisme ne saurait se limiter au seul volet militaire. Celui-ci a besoin d’être accompagné par les questions de développement qui pourraient être une réponse autrement plus appropriée pour des populations qui ont souvent le sentiment d’être des laissés-pour-compte. C’est pourquoi le sommet de Nouakchott, tout comme les précédents sur la question du G5 Sahel, se justifie à plus d’un titre.

Seulement, l’on a souvent l’impression de faire du surplace et l’on se demande quelquefois à quoi servent ces sommets qui se suivent et se ressemblent, tant les lignes peinent à bouger. En effet, l’albatros de la force commune, annoncé à grands renforts de publicité, est toujours cloué au sol à cause d’une sciatique financière. Et il est à craindre que ce mastodonte qui végète depuis sa mise sur pied, ne meurt finalement de sa belle mort, tant on a le sentiment qu’il n’existe que de nom et manque de véritables ailes pour prendre son envol. Quoi qu’il en soit,  alors que les 400 millions d’euros prévisionnels ne sont pas bouclés pour lui permettre d’avoir la plénitude de ses moyens d’opération, voilà nos têtes couronnées à la recherche de cinq fois plus de moyens pour des projets communautaires. C’est à se demander si de telles annonces n’amusent  pas les terroristes. C’est pourquoi l’on est porté à se demander si le G5 Sahel n’est pas victime du large spectre de ses ambitions. Car, comme le dit le dicton, « qui trop embrasse, mal étreint ». Or, dans le cas d’espèce, l’on a le sentiment que le G5 Sahel veut ratisser large. Soit ! C’est de bonne guerre ! Et l’on ne peut pas reprocher à nos gouvernants de mener plusieurs combats pour le bien-être des populations dans un espace sécurisé. Seulement, en termes d’efficacité, les résultats ne semblent pas suivre la cadence des sommets.

C’est pourquoi l’on se demande s’il n’est pas temps, pour le G5 Sahel, de changer son fusil d’épaule. Car, en se dispersant de la sorte, l’on se demande s’il pourra atteindre ses objectifs. Pire, l’on a parfois même  le sentiment que ses dirigeants sont atteints de la « réunionite » tant les  réunions sont récurrentes pour des résultats quasi-inextants sur le terrain. Au passage, certains des chefs de la force commune perdent leur place et l’on se demande si cela n’est pas l’expression d’un certain malaise.

Il est temps, pour le G5 Sahel, de changer de paradigme

Quoi qu’il en soit, les dirigeants du G5 Sahel doivent éviter de donner le sentiment que ces réunions ne sont qu’une façon de donner le change pour ne pas qu’on leur reproche une certaine léthargie. Autrement, pour réunir les moyens de lutte, a-t-on besoin de se réunir avec autant de fréquences là où un bon coordonnateur aurait peut-être suffi ? Surtout si c’est pour solliciter les mêmes bailleurs de fonds et récolter des promesses de financements qui tarderont plus tard à prendre forme. En tous les cas, même s’il s’agit de prêts, si les Africains ne développent pas des initiatives locales de mobilisation de fonds, ils risquent, à la longue, une asphyxie financière sous le poids de la dette.

Cela dit, on ne peut pas crier à la pauvreté et au manque de moyens financiers et multiplier des sommets qui engendrent nécessairement des dépenses dont on se demande d’ailleurs qui en supporte les coûts. Pendant ce temps, les terroristes, eux, sont actifs et s’en donnent à cœur joie à leurs basses besognes et à leur travail de sape sur le terrain.

En tout état de cause, passés les premiers moments de surprise, il est temps, pour le G5 Sahel, de changer de paradigme en se donnant les moyens de ses ambitions. Pour cela, il est peut-être nécessaire de marquer une certaine rupture avec ce côté malsain de toujours tout attendre de l’extérieur et la propension à toujours vouloir rassembler d’abord tous les moyens financiers avant d’aller à l’abordage. En effet, certaines actions n’ont pas besoin de beaucoup de moyens pour prendre forme sur le terrain.

En tout état de cause, le terrorisme est aujourd’hui un fléau mondial, qui frappe tous les continents. Mais l’Afrique semble le maillon le plus faible de la chaîne de résistance car, elle donne le sentiment que laissée à elle-même, elle est incapable de subvenir à certains de ses besoins, notamment sur le plan sécuritaire. Mais il faudra bien que les Africains s’assument pour ne pas donner l’impression que sans l’extérieur, ils ne sont pas capables de se prendre en charge. C’est pourquoi les chefs d’Etat ont beau multiplier les sommets, tant que cela ne sera pas suivi d’effets visibles sur le terrain, il leur sera difficile d’avoir l’adhésion des populations.

 

« Le Pays « 


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