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SORTIE D’ONG SUR LE TRAITEMENT DES DOSSIERS JUDICIAIRES EN RCI


 

La piqûre de rappel aura-t-elle l’effet escompté ?

Un collectif   d’Organisations non gouvernementales (ONG) de défense des droits de l’homme dont la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH),  la Ligue Ivoirienne des Droits de l’homme (LIDHO) et le Mouvement ivoirien des Droits de l’homme (MIDH) ont, dans une lettre ouverte adressée au chef de l’Etat ivoirien, Alassane Dramane Ouattara (ADO), en date du 9 mai, dénoncé une justice sélective et la lenteur dans le traitement des dossiers judiciaires liés à la crise post-électorale de 2011. Dans la foulée, elles dénoncent aussi un projet de loi qui  serait en étude à la présidence  et qui vise à amnistier les auteurs d’abus commis pendant cette crise et mettent en garde ADO contre la violation de nombreux instruments internationaux protégeant le droit des victimes à la justice, notamment la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples qui en résulterait. Elles exhortent enfin le président ivoirien qui a affirmé, à maintes reprises, qu’ « il n’y aura pas d’impunité en Côte d’Ivoire » et que «  la justice sera la même pour tous….. Il n’y a pas d’exception, il n’y a pas de discrimination, la loi est la même pour tous »,  à honorer ses promesses.

On peut tresser des lauriers aux ONG qui ont joué leur partition

Il faut, avant tout, saluer cette sortie des ONG de défense des droits de l’Homme qui, en se faisant les porte-voix des sans-voix que sont les victimes des violences post-électorales de 2011,   sont bien dans leur rôle de veille citoyenne. Leur adresse à l’endroit du premier magistrat de la République de Côte d’Ivoire, a non seulement  le mérite de maintenir la flamme de la quête de justice  pour les 3000 personnes disparues et les 150 femmes violées pendant la crise postélectorale, mais elle fait aussi œuvre de pédagogie en rappelant aux prédateurs des droits humains de la RCI et au-delà, du monde entier, que le temps ne saurait ni effacer leurs crimes ni les soustraire du devoir de répondre un jour de leurs actes. Cet écrit qui interpelle le chef de l’Etat ivoirien et le met devant ses responsabilités, est d’autant plus méritoire qu’en raison de la neutralité supposée ou réelle des ONG de défense des droits de l’Homme qui en sont les auteurs, il donne une ocre de vérité et une teneur nouvelle aux récriminations des partisans de l’ex-président Laurent Gbagbo qui ont toujours dénoncé sans être véritablement écoutés, la justice des vainqueurs dont ils sont victimes. En tout état de cause, l’on peut tresser des lauriers à ces ONG qui ont joué leur partition.

Ceci étant, la question que l’on pourrait se poser, est celle de savoir si le cri du cœur des ONG aura un écho favorable auprès du président ADO, au moment où celui-ci semble plutôt préoccupé par les manœuvres politiques dans la perspective des élections à venir. Malgré les assurances faites par le Procureur de la République qui a fait une sortie pour tenter de calmer la tempête, la réponse semble négative. Et pour causes. D’abord, parce que les principaux mis en cause dans les violences post-électorales de 2011, sont les acteurs principaux du régime en place en Côte d’Ivoire. Les livrer aujourd’hui à la Justice reviendrait, pour le président ADO, à scier la branche sur laquelle il est assis.

ADO a visiblement échoué à panser les blessures   des Ivoiriens

Ensuite, nul doute que le temps a fait aussi son effet au point que de nombreuses traces ont été effacées. L’on peut bien se douter, en effet, que les auteurs des crimes que l’on évoque, ont utilisé leur posture au sein de l’appareil d’Etat pour mettre sous le boisseau la plupart des dossiers compromettants. L’on peut donc se risquer à dire que ce n’est pas demain la veille que « Watao » ou bien d’autres de la bande peuvent se retrouver pris dans les filets de la Justice en RCI. Il n’est cependant pas exclu que, pris dans l’étau de ses intérêts politiques et des revendications des organisations de la société civile et des victimes de la guerre, le président ADO  soit contraint à organiser des parodies de procès à  l’encontre de quelques menus fretins. C’est dire si les victimes des violences électorales ou leurs ayants droit peuvent encore couler pendant longtemps des larmes en voyant qu’au lieu de croupir dans les prisons comme leurs alter ego de l’autre camp, leurs bourreaux sont promus à des postes de responsabilité.

Cela dit, les fréquentes résurgences du dossier des crimes commis pendant la crise post-électorale sur la scène politico-sociale de la Côte d’Ivoire, traduisent tout l’échec de la politique de la réconciliation nationale que le président Alassane Dramane Ouattara appelait de tous ses voeux. Même s’il peut s’enorgueillir de son bilan dans le domaine économique dont tous les indicateurs semblent au vert, il reste qu’ADO a visiblement échoué à panser les blessures   des Ivoiriens et tout indique qu’il va terminer son mandat sans réussir cette prouesse. Et la question que l’on pourrait se poser, est la suivante : quelle serait la valeur de toutes ces réalisations économiques si elles sont destinées à être détruites dans de nouvelles guerres nées de l’échec à vivre ensemble des populations du pays de l’Eléphant ? Il est donc plus que jamais temps qu’ADO  se saisisse de la perche que lui tendent les organisations de défense des droits de l’Homme par leur appel et ce, dans le souci de laisser à la postérité, au terme de son bail à la tête de la République, un pays unifié et réconcilié avec lui-même.

« Le Pays » 


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