HomeA la uneSORTIE MEDIATIQUE DU PRESIDENT CONGOLAIS : Quand Kabila interprète la Bible au premier degré

SORTIE MEDIATIQUE DU PRESIDENT CONGOLAIS : Quand Kabila interprète la Bible au premier degré


Le président congolais, Joseph Kabila, s’est enfin résolu à rencontrer la presse nationale et internationale vendredi dernier dans son Palais, pour donner sa lecture de  la situation sociopolitique tendue et incertaine dans son pays. En fait de clarification, c’est à de véritables digressions et à des propos clairs obscurs que s’est livré l’homme fort de la République démocratique du Congo (RDC), comme pour mieux accentuer le scepticisme, pour ne pas dire le pessimisme des Congolais eux-mêmes et de leurs amis et partenaires, quant à l’alternance dont le principe a été acquis et acté le 31 décembre 2016 par toutes les parties, sous la houlette de l’Eglise catholique. Pour dire vrai, le président Kabila a encore une fois refusé de jouer franc-jeu avec les journalistes et avec son peuple, mais cela n’est guère étonnant de la part de celui qui a réussi le tour de force de s’octroyer quasiment un demi-mandat « cadeau », malgré tous les radars que la communauté internationale a braqués sur son pays, et malgré les séries de tirs groupés que son camp a essuyés de la part de l’opposition politique, de la société civile, des groupes armés et bien évidemment de l’Eglise catholique qui est en pointe dans la contestation et la condamnation de ses velléités monarchiques. Le seul mérite de cette sortie inhabituelle du très taiseux président de la RDC a été de prévenir les Congolais que le chemin de la démocratie et de l’alternance est encore long, et qu’ils doivent redoubler de vigilance pour ne pas dire d’endurance, s’ils veulent voir se réaliser le rêve qu’ils ont consigné dans le fameux accord de la Saint-Sylvestre, qui indique très clairement la porte et la date de sortie de scène de leur satrape de président. En administrant des leçons de morale politique et religieuse à l’opposition et aux prélats, et en appelant la communauté internationale à s’en tenir uniquement à sa mission de pacification dans les provinces crisogènes de son pays, Joseph Kabila n’a fait que trahir son intention jusque-là inavouée de renouveler son bail au Palais de marbre, quitte à museler tous les braillards en « recadrant le droit à manifester », comme il l’a lui-même martelé.

Tous ceux qui espéraient des annonces fortes en ont eu pour leur naïveté

Et plus la date fatidique du 23 décembre 2018 approche, plus la frilosité gagne les rangs chez ce « président par intérim » depuis la fin de son mandat constitutionnel en 2016, au point de s’attaquer vertement à l’Eglise qui a jusque-là joué le rôle de dernier rempart ou plutôt de dernier recours, à chaque fois que l’édifice RDC a menacé de sombrer. A travers des paraboles bibliques et une interprétation au premier degré des Ecritures saintes,  il a, en effet, sommé les leaders de la communauté catholique de ne pas outrepasser leurs prérogatives en troquant leurs soutanes immaculées contre les costumes pleins de salissures des hommes politiques, notamment de l’opposition traditionnelle. Cet argument d’un simplisme effarant, n’aura évidemment aucun effet sur le cardinal Laurent Monsengwo et les siens, pas plus que sa rhétorique sur l’inconstance du chef de file de l’opposition ne va détourner ce dernier de son objectif avoué ; celui d’être calife à la place du calife, en décembre prochain. En somme, tous ceux qui espéraient des annonces fortes et des décisions claires sur la gestion de la crise actuelle, en ont eu pour leur naïveté, et on est reparti malheureusement pour des semaines voire des mois de face-à-face à couper au couteau, entre les partis de la majorité présidentielle d’une part, et ceux qui s’opposent à l’enfarinement du peuple par Joseph Kabila d’autre part. Un mauvais présage pour ce pays-continent aux immenses potentialités économiques, mais continuellement tiré vers le bas de l’échelle à cause de la cupidité et de l’irresponsabilité de certains de ses fils.

Hamadou GADIAGA


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