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TENSIONS SOCIOPOLITIQUES  AU PAYS D’ALPHA CONDE


Hier, 21 novembre 2019, la rue devrait reprendre, à nouveau, du service à Conakry et dans les principales villes de l’intérieur de la  Guinée avec un nouvel appel à manifester des opposants au référendum visant à modifier la Constitution, voulu par le président de la République, Alpha Condé. Cette manifestation fait suite à la marche des femmes qui, spatules en main, ont joint, il y a quelques jours déjà, leurs voix à la forte clameur qui monte en Guinée contre une éventuelle modification  de la loi fondamentale. C’est donc peu que de dire que la météo politique annonce, à nouveau, un sale temps sur les sommets du Fouta Djalon avec cette élévation progressive des températures. Car, la question que tout le monde se pose, est la suivante : le régime va-t-il encore sortir l’arme de la répression comme il en a pris l’habitude?

 

Alpha Condé aurait tort de rester sourd à la rue qui gronde

 

Trop tôt pour y répondre mais comme disent les Ivoiriens, « tout près n’est pas loin ». Mais une chose est certaine : depuis qu’Alpha Condé a réveillé les vieux démons de la division et de la haine avec son projet de tripatouillage de la Constitution, les marches se succèdent chaque semaine dans son pays, donnant lieu à des affrontements meurtriers entre manifestants et forces de l’ordre si fait qu’il faut craindre que les manifestations d’aujourd’hui ne débouchent aussi sur un bain de sang. Et pendant que la Guinée tout entière se transforme en un immense champ de bataille jonché de  cadavres, Alpha Condé continue d’avancer, se cramponnant  à son funeste dessein de pouvoir à vie et ce, malgré les mises en garde de la procureure de la Cour pénale internationale (CPI). En effet, l’on se souvient que Fatou Bensouda avait, dans un communiqué, lancé en ces termes, un avertissement aux responsables de l’escalade de la violence en Guinée : « Toute personne qui commet, ordonne, incite, encourage ou contribue de tout autre manière, à commettre des crimes atroces, est passible de poursuites devant les tribunaux guinéens ou par la CPI ». Mais cela suffira-t-il à faire démordre le Professeur ?   Qui connait l’homme, ne peut répondre que par la négative. Et pour cause. D’abord, Condé donne l’impression d’être trop imbu de sa personne au point de se croire tout droit sorti de la cuisse de Jupiter. Il regarde avec condescendance le peuple guinéen dont les amères complaintes lui passent dessus comme de l’eau sur les plumes d’un canard.  Ensuite, l’homme a été quelque peu ragaillardi par la contremarche qu’il a organisée pour répondre aux manifs de l’opposition et pour laquelle il se vante d’avoir mobilisé plus d’un million de Guinéens. Enfin, sans doute, l’homme compte-t-il sur les clivages communautaires très accentués en Guinée et qu’il instrumentalise à souhait. Mais quelles que soient ses motivations, Alpha Condé aurait tort de rester sourd à la rue qui gronde.En effet, il y a des signes qui ne trompent pas et l’homme devrait savoir les lire. Le premier de ces signes, ce sont les désertions qui se font dans  ses rangs. Quand un navire veut se saborder, on le sait rien qu’à regarder les rats qui le quittent précipitamment.

Il est temps que Condé se range du bon côté de l’histoire

 

Au nombre des signes de mauvais  augure pour le régime Condé, il y a, au-delà de la forte contestation interne, le désaveu de son projet par les Sages, en l’occurrence les anciens chefs d’Etat africains qui, unissant leurs voix à celle du président nigérien, Mahamadou Issoufou, ont demandé le  respect de la limitation du nombre de mandats présidentiels et  de la règle constitutionnelle de façon à favoriser ainsi le renouvellement du leadership politique. Si cette puissante voix morale des anciens n’est pas une malédiction, elle en a toutes les allures. Au regard de toute cette hostilité à son projet, Alpha Condé devrait comprendre qu’il va droit dans le mur.  Si ce n’est pas la rue qui mettra fin à son ambition de règne à vie comme on l’a vu avec Blaise Compaoré au Burkina Faso ou plus récemment avec Evo Moralès en Bolivie, ce sera l’armée guinéenne que l’on sait très bouillonnante et qui n’attend que l’opportunité pour s’immiscer avec fracas dans le débat politique, qui le fera.  Il est donc temps, alors qu’il n’a pas encore franchi le seuil du non-retour, qu’il se range du bon côté de l’histoire. Et si d’aventure, sa crainte était que la Guinée ne lui survive pas, qu’il se rassure que la grande Guinée lui survivra. Pour preuve, malgré la disparition de ses pères fondateurs dont le célèbre Ahmed Sékou Touré, la Guinée est toujours bien là ! Cela dit, on peut encore féliciter opposition et le peuple guinéen qui, non seulement restent fidèles à leur engagement de faire preuve de détermination dans la lutte contre la dérive monarchique du régime Condé, mais aussi font montre d’une maturité politique salutaire en rejetant toute idée de référendum. Et c’est en cela qu’ils méritent plus de soutien de la communauté internationale, à commencer par les organisations sous- régionales et continentales, en l’occurrence la CEDEAO et l’Union africaine (UA) qui se doivent d’être plus audibles sur cette crise qui peut déborder des frontières guinéennes.

« Le Pays »

 


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