HomeA la uneTRANSITION POLITIQUE EN ALGERIE : Bensalah a-t-il les moyens de surprendre agréablement ?

TRANSITION POLITIQUE EN ALGERIE : Bensalah a-t-il les moyens de surprendre agréablement ?


Moins de 24 heures après sa nomination à la présidence par intérim de l’Etat, Abdelkader Bensalah s’est adressé au peuple algérien dans une allocution télévisée. De ce premier discours à la Nation, l’on retiendra principalement l’engagement du nouveau chef de l’Etat à organiser les élections dans les délais constitutionnels de 90 jours. A cet effet, il a annoncé la prochaine mise en place d’une commission. Mais les questions que l’on peut tout de suite se poser, au-delà de l’effet d’annonce, sont les suivantes : quel crédit peut-on accorder à ses paroles ?  La rue algérienne mordra-t-elle à l’appât ?
Pour répondre à la première question, l’on peut se risquer à dire que Bensalah doit être le seul, en Algérie, à accorder du crédit à ce qu’il dit. Car, ils sont nombreux, les Algériens à rejeter cette eau en apparence propre que l’on veut leur faire boire.

Bensalah ne pourra que mettre en œuvre la feuille de route définie par l’armée

Et pour cause, l’homme est d’abord l’incarnation même du système politique mis en place par Abdelaziz Bouteflika dont il fut l’un des membres du premier cercle pendant les deux décennies de règne. Il ne saurait donc faire la politique autrement que comme il l’a toujours fait à l’ombre de son mentor : gestion clanique et corruption à outrance. Ensuite, Bensalah tient sa position actuelle de la seule volonté de l’armée qui est l’une des composantes essentielles du système politique algérien et qui ne se laissera pas dépouiller du pouvoir sur l’autel de la transparence et de la régularité d’un scrutin. Il ne pourra donc que mettre en œuvre la feuille de route définie par l’armée qui a récupéré la révolution populaire pour toujours garder la haute main sur le pouvoir. Et sans nul doute, si les choses devaient rester en l’état, le nouveau pouvoir issu des élections à venir conserverait ce statu quo.
Mais il est difficile de croire que la rue algérienne se contentera du simple rôle d’accompagnant du plan ourdi par l’armée. Les manifestations ont repris dès l’annonce de la nomination de Bensalah et dans les jours à venir, elles risquent de gagner sans nul doute en ampleur. L’armée et son faire-valoir tiendront-ils face à la bourrasque qui a emporté dans le creux de la vague Abdelaziz Bouteflika ?  En attendant de voir comment évoluera le rapport de forces entre les deux camps qui se disputent le pouvoir en Algérie depuis le projet avorté du cinquième mandat du président déchu, l’on peut épiloguer sur la capacité d’Abdelkader Bensalah à faire mentir l’opinion. A priori, l’homme dispose d’un important capital d’expériences qu’il peut mettre à profit pour réussir sa mission. En effet, dans la décennie 90, il a déjà géré avec succès la Transition et cela constitue un atout non négligeable, même si la situation actuelle se présente avec ses particularités en termes de défis à relever.

Bensalah est limité par les dispositions constitutionnelles

Accusé de tous les péchés et accusé à tort ou à raison d’être imposé par le pouvoir en place pour maquiller les comptes pendant la phase transitoire et assurer la pérennité du système à travers une élection truquée, Bensalah, pour sauver son honneur et réussir sa sortie de carrière politique, peut mettre son orgueil de côté pour faire les choses avec la bonne manière. Dans cette éventualité, il ferait le choix et réussirait le pari, même sur le tard, de se mettre du bon côté de l’histoire. Dans cette perspective, il devrait aller au-delà des mots pour donner des signaux forts. Mais Abdelkader Bensalah peut-il se faire harakiri quand on sait qu’à lui seul, il représente, dans l’imaginaire de nombreux Algériens, la face hideuse du système décrié ? Du reste, quand bien même il aurait la volonté d’aller dans le sens voulu par le peuple, de quels moyens dispose-t-il ? On le sait, Bensalah, au-delà de ses liens ombilicaux avec le système en place, est limité par les dispositions constitutionnelles qui lui interdisent tout remaniement ministériel, toute dissolution de l’Assemblée nationale, toute modification constitutionnelle. Il n’a donc ni le choix des hommes ni les moyens d’actions légaux pour opérer le changement voulu par le peuple. Il ne reste donc qu’à être au service d’une armée qui a volé la révolution populaire et qui entend garder de force, ce butin. C’est ce que laisse entrevoir la répression des manifestations qui a débuté depuis sa désignation à la tête de la présidence de la République.

« Le Pays »


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