HomeA la uneYVES RAMDE, PRESIDENT DE L’ANEB : « Le seul reproche que l’on nous fait, c’est d’avoir voulu nous mettre à l’abri »

YVES RAMDE, PRESIDENT DE L’ANEB : « Le seul reproche que l’on nous fait, c’est d’avoir voulu nous mettre à l’abri »


S’il y a bien un sujet qui défraie la chronique ces derniers temps, c’est la crise que traversent les cités universitaires. Les étudiants sont, en effet, à couteaux tirés avec les responsables du Centre national des œuvres universitaires (CENOU). Ils réclament, entre autres, la tête du DG de ladite institution. Le personnel du CENOU, quant à lui, a, depuis le 20 octobre dernier, suspendu toutes activités jusqu’à nouvel ordre, pour dénoncer « les comportements inacceptable de certains étudiants ». La situation semble se compliquer davantage. Dans le souci de mieux comprendre la position des étudiants, nous avons rencontré le président de l’Association nationale des étudiants burkinabè (ANEB), Yves Ramdé, le 22 octobre 2015.

« Le Pays » : Pouvez-vous nous faire le point de la situation de crise dans les cités universitaires ?

Yves Ramdé : Permettez-moi de revenir d’abord sur l’historique des évènements. Tout a commencé le 2 octobre dernier. Normalement, les étudiants devraient avoir accès aux différentes cités dès le 30 septembre. Mais, lorsque les étudiants ont commencé à rejoindre les cités, ils se sont rendus compte que les cités étaient toujours fermées. Ce qui les a amenés à rejoindre le site de la cité vacances, sis à Kossodo. Au regard de la forte affluence, les étudiants dormaient à 6 dans des chambres destinées à 2 personnes. Pire, certains étaient obligés de dormir à la belle étoile, dans les broussailles. Au regard du contexte sociopolitique particulier que nous avons connu avec pour corollaire l’insécurité, les étudiants, après avoir passé les nuits du 30 septembre et du 1er octobre entassés dans les chambres ou dormant à la belle étoile, ont décidé, le 2 octobre, de rencontrer le Directeur régional (DR) du CENOU et le Directeur général (DG) du CENOU pour comprendre. Car, même s’il y avait report de la rentrée universitaire, le CENOU à son niveau n’a affiché aucune note pour annoncer un probable report de la date d’ouverture des cités. D’où, la nécessité pour les étudiants, de chercher à comprendre davantage. Lorsque ceux-ci sont parvenus à contacter le Directeur régional (DR) du CENOU, celui-ci leur a répondu que c’est au regard du contexte sociopolitique que vit le Burkina qu’ils n’ont pas réussi à afficher la liste des étudiants réadmis en cité. Alors, les étudiants lui ont fait l’exposé de la situation qu’ils vivaient au niveau de la cité de Kossodo. Il a pris l’engagement de travailler de façon à permettre aux étudiants de pouvoir dormir dans les chambres en cité, dès le 2 octobre, en attendant de remplir les procédures administratives. Mais, le DR avait aussi souligné qu’il ne pouvait mettre en œuvre cet engagement qu’après avoir consulté le Directeur général (DG). Ce qui veut dire simplement qu’il a renvoyé les étudiants vers le DG. C’est après plusieurs tentatives que les étudiants finirent par entrer en contact avec le DG pour lui poser le problème. En guise de réponse, ce dernier leur a demandé s’ils suivent l’actualité au Burkina. N’ont-ils pas appris qu’il y avait report de la rentrée universitaire ou, sont-ils sur une autre planète ? Il dira aussi qu’à son niveau, la situation est claire et que les étudiants devraient regagner leurs lieux de provenance. Alors que les étudiants, pour la plupart, venaient des provinces et d’autres hors du pays. Sur-le-champ, les étudiants ont demandé au DG de venir constater de visu les conditions dans lesquelles ils vivaient dans l’espoir que cela l’amènerait à changer de position. Toute chose qu’il a catégoriquement refusée. C’est alors que les étudiants sont revenus dans les locaux du CENOU à Kossodo, où ils ont trouvé le Secrétaire général (SG) du CENOU. Ils l’ont invité, lui et certains de ses collaborateurs, à venir constater les difficultés qu’ils vivent.

« Actuellement, les étudiants sont sans restauration, sans protection sanitaire… »

Une fois en cité, les étudiants ont reçu un appel du DG leur intimant l’ordre de libérer ses collègues dans les 5 minutes qui suivaient ; sinon il ferait appel à la gendarmerie pour réprimer les étudiants. Pourtant, aucune restriction de liberté n’a été posée à l’encontre de ces derniers. Prenant acte de cette information, les étudiants décidèrent de sécuriser le SG et ses deux secrétaires. Ils vérifièrent ensuite les alentours de la cité pour voir s’il n’y avait pas de forces de l’ordre. Ensuite, le SG et ses collaborateurs ont été invités à regagner leurs bureaux. Tel a été le déroulement des évènements de ce jour-là. Au niveau de l’ANEB, nous avons contacté le DR qui nous a dit la même chose que lorsque les étudiants l’ont contacté. A savoir, que la situation peut être gérée en permettant aux étudiants d’occuper les chambres en attendant de remplir les formalités administratives, mais qu’il lui fallait d’abord l’aval du DG. Le 2 octobre, autour de 11h, nous avons rencontré le DG qui va nous dire par la suite qu’il s’en remettra à la décision du DR. Pour nous, la question était tranchée. Après plusieurs tentatives, nous avons réussi à joindre le DR qui nous dira à son tour que les autorités ne pourront ouvrir les cités qu’à partir du 5 octobre. Qu’il aurait tout tenté pour régler le problème mais ses tentatives furent vaines. Il nous a donc renvoyés au DG une fois de plus. Mais, le DG était injoignable. Lorsque les étudiants ont su qu’ils allaient être obligés de dormir encore à la belle étoile les 2, 3 et 4, en insécurité, vu le contexte marqué par la menace djihadiste et la question des membres de l’ex-RSP en cavale, ils ont donc occupé les chambres. Et puis, nous pensons que le Burkina demeure un pays d’hospitalité. Donc, si une personne se trouve face à un problème d’accès à un logement, on devrait pouvoir lui trouver un toit quelque part, en attendant que sa situation se régularise. C’est pour cela que les étudiants sont allés occuper les chambres. Dès lors, le 5 octobre, le DG du CENOU va entamer une campagne médiatique mensongère pour parler de séquestration, de vandalisme… Toutes choses que les étudiants n’ont jamais commises. Nous avons même invité les journalistes à aller dans les cités constater d’eux-mêmes si les serrures des chambres ont été forcées ou pas. Mais le DG, fidèle à sa logique, va même jusqu’à déposer une plainte contre les étudiants qui ont jugé cela anormal et ont marché sur la direction générale du CENOU, le 13 octobre. Au regard de la campagne déjà orchestrée par le DG, les étudiants ont pris la responsabilité de protéger les locaux afin d’éviter tout incident. Depuis cette date, les choses ont évolué et le 20, nous avons vu la déclaration du personnel du CENOU, faisant état de la suspension de toute activité. Actuellement, les étudiants sont sans restauration, sans protection sanitaire…

Vous disiez tantôt qu’aucune chambre n’a été vandalisée comme l’a annoncé le DG du CENOU. Comment les étudiants ont-ils pu avoir accès aux différentes chambres ?

Certains étudiants avaient par devers eux les clés de leur chambre avant d’aller en vacances. Chose d’ailleurs qui est imputable à la conciergerie, sinon au CENOU qui a laissé les étudiants partir en vacances avec leurs clés. Donc, au retour, la majorité des étudiants disposaient de leur clé.

Que comptez-vous faire si la plainte du DG du CENOU contre les étudiants n’est pas retirée ?

Le DG, dans sa campagne médiatique mensongère a aussi tenté de démontrer que les étudiants étaient irresponsables et impolis. Nous sommes donc en train de constituer un large front avec l’ensemble des structures syndicales de l’université pour demander le retrait pur et simple de cette plainte et le rétablissement des œuvres sociales et qu’il n’y ait pas de répression contre les étudiants.

« La morale au Burkina ne condamne pas quelqu’un qui est en danger et qui cherche à se réfugier sous un toit »

Si vous n’avez rien à vous reprocher, pourquoi exiger le retrait de la plainte au lieu de laisser la procédure suivre son cours ?

Véritablement, dans le cadre de l’apaisement du climat social au sein de l’université, il est primordial que cette plainte soit purement et simplement retirée. Sinon, nous tenons pour seuls responsables les autorités. Dès le 2 octobre déjà, nous les avons interpellées pour qu’une solution à l’amiable soit trouvée. Autrement, elles seront tenues pour seuls responsables des actions qui allaient être menées. Au lieu de cela, ils sont restés droits dans leurs bottes en menant des campagnes médiatiques mensongères. Le seul reproche que l’on nous fait, c’est d’avoir voulu nous mettre à l’abri. A ce que je sache, la morale au Burkina ne condamne pas quelqu’un qui est en danger et qui cherche à se réfugier sous un toit.

Cela fait partie de vos revendications certes, mais quelle sera votre attitude si le DG refuse de retirer cette plainte ?

Nous serons bientôt en assemblée générale extraordinaire. Nous comptons donc formaliser toutes les revendications et décider de la suite à donner aux évènements.

On vous accuse également de trop tirer sur la ficelle. Que répondez-vous à cela ?

Nous ne faisons rien de pareil. D’ailleurs, on ne comprend pas pourquoi on est à ce stade. Nous avions juste demandé au CENOU de nous loger en attendant de formaliser la situation. C’était cela la revendication des étudiants. C’était juste une question d’hospitalité. Mettre les étudiants en sécurité en attendant que la commission d’attribution des chambres siège pour décider des étudiants qui ont droit ou pas à une chambre et tout rentrera dans l’ordre. Mais le CENOU a rompu le dialogue.

Quelle est votre réaction à l’appel au dialogue lancé par le gouvernement ?

Les étudiants n’ont jamais rompu le dialogue. Depuis le 2 octobre, nous avons tenté en vain de joindre le DG pour poursuivre le dialogue et trouver des solutions. Chaque fois que nous avons tenté de le joindre, sa ligne était occupée. Sinon, nous sommes ouverts au dialogue et nous respectons les institutions. Au regard de la tournure que les évènements ont prise, il est nécessaire que l’on puisse rétablir les œuvres universitaires et que la plainte contre les étudiants soit retirée.

Interview réalisée par Adama SIGUE

 


Comments
  • C’est vous ces vendus de l’ANEB qui foutez la vie académique et sociale des enfants de ce pays en danger et en retard. Vous gagner quoi à inciter les étudiants les pauvres fils de pays déjà aigris au chômage. Laisser les gens composer SVP, l’ANEB n’a apporté aux étudiants que mort, incapacité, échec, année invalide …
    Pourquoi vous ne savez pas négocier comme tout le monde. Vous n’avez pas le monopole de la force et désordre.
    Si le Ministre ferme les cités et les RU et suspend les cours. Que feriez-vous mon cher Yves le charismatique. Si vous avez reçu votre prix n’emmerder ceux qui veulent travailler et qui ne logent même pas en cité. Depuis que ce gâteau de RAMDE est là, l’ANEB ne sert plus qu’à des luttes idiotes et “etudianticides”.

    23 octobre 2015
    • Mon frère, il faut savoir raison garder. Nous sommes en face de jeunes gens comme nous qui ont quitté les profondeurs du Burkina pour venir étudier. La plupart de ces étudiants n’ont pas de parents proches à Ouagadougou. Ils n’ont pas non plus été informés à l’avance du report de l’ouverture de la cité universitaire. Avec la situation d’insécurité qui prévalait, il était à mon avis du devoir du gouvernement de la transition de les mettre à l’abrit et en sécurité. Même si la rentré universitaire avait été reporté, cela ne signifie pas que la cité ne serait pas ouverte à la date prévu. Je demande donc aux autorités de la transition d’être plus solidaires avec la jeunesse. Elles doivent chercher à résoudre les problèmes de ces jeunes gens en insécurité. Nous devons éviter d’échauffer les esprits davantage afin que l’on ne tombe une fois encore dans des situations de report des élections.

      24 octobre 2015
  • oui mais en quoi le départ du dg va résoudre le problème? le dg part et après?la crise à l’université ne se limite pas au cenou. la crise universitaire ne date pas d’aujourd’hui. il est impératif qu’il y ‘ait une reforme générale de l’université. Moi particulièrement je ne comprends pas pourquoi c’est le dg qui est mis en cause ici. est ce que c’est le dg qui a demande la fermeture des citées?aussi le dg est venu constater des faits: séquestration et vandalisme.de ce fait il a déposé une plainte ce qu’une personne normale est censée faire. est ce qu’il doit retirer la plainte parce que les étudiants qui ont commis ses actes le lui demandent? les étudiants savent qu’ils ne doivent pas partir avec les clés mais le font quand même parce qu”ils veulent revenir occuper leurs chambres. Si ceux qui étaient la avant vous avaient réfléchi comme vous; vous ne seriez même pas en citée. il faut qu’on arrête d’encourager ce genre d’attitude sinon à l’allure ou vont les choses le pire reste à venir. en quoi la lutte des étudiants est moins égoïste que celle du rsp? on n’a pas fait partir le rsp pour être de nouveaux sous des menaces alors qu’on nous parle de terroristes à nos portes. franchement y en à marre.

    25 octobre 2015
  • Les étudiants doivent revoir leurs copies car c’est leur avenir qui est en jeux. C’est pas parce qu’on que plus rien ne sera comme avant qu’on se permet d’aller occupé les chambres. Le Burkina est un État de droit, ils devront tout simplement faire profile bas et demander la clémence des autorités universitaires et tout rentrera dans l’ordre, mais s’ils veulent faire un bras de fer, ça ne fait que les mettre en retard. Le départ du DG n’est pas la solution, il est un fonctionnaire et peut servir partout ou on l’affecte. C’est votre droit mes chers enfants, mais pensez à votre avenir car vous êtes les futurs cadres de demain. Si vous vous comportez ainsi, quel sera votre comportement une fois dans la vie active? Si pour un oui ou pour un non on on revendique le départ du responsable, à cette allure, toute l’administration va changer des DG, le pays sera toujours en retard. D’ailleurs on nous traite de pays le plus pauvres d’Afrique et du monde. Il faut que la sagesse habite les uns et les autres pour trouver une solution pour le bien de nos enfants.

    26 octobre 2015
  • “Rien ne sera plus comme avant” monsieur Ramdé vous rendez-responsable l’administration de vous avoir amené a couper des chaînes, à défoncer des portes et à occuper illégalement des chambres en cité. Votre Secrétaire Général KABORE et SAWADOGO membre du CE à la rencontre du 2 octobre 2015 à 11h40 avec le DG, l’AC et le DAF du CENOU n’ont-ils pas eux avancé qu’ils étaient venus pour intercéder et non exiger un droit, car la mesure gouvernementale était belle et bien là? Vous même qui avez appelé le DG pour demander le rendez-vous où étiez-vous puisque vous avez préférer vaquer à vos occupations que de vous présenter à votre propre demande d’audience? Si réellement vous le chevalier était préoccupé par le sort de vos camarades qui dormaient dans la broussaille de Kossodo. Monsieur Ramdé, n’insultez pas vos aînés qui vous ont devancé dans l’ANEB. Vous n’est pas le premier président de l’ANEB et vous ne serez pas le dernier. Arrêtez de nous faire honte car à notre temps un délégué ANEB était non seulement un modèle de civisme et un exemple en classe. Encourager platement et bêtement des actes d’incivisme et de délinquance ce n’est pas notre ANEB, mais l’ANEB d’un Ramdé totalement dégénéré. Votre acolyte Monsieur Kabore Salifou du MEFA était récemment au devant de ceux-là qui réclamait châtiment pour les fraudeurs des concours de la fonction publique; aujourd’hui le voici réclamant des passes droits pour des hors-la-loi. Etre étudiant ce n’est pas être au dessus des lois mon petit Ramdé pardon Monsieur Ramdé. Arrêtez de détruire le pays et soyez des modèles pour vos plus jeunes frères.

    27 octobre 2015

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