EL HADJ SOULEYMANE ZINABA, PREMIER VICE-PRESIDENT CHARGE DE L’ORGANISATION ET DE LA GESTION DE LA GRANDE MOSQUEE
Après les évènements de vendredi et dimanche derniers à la grande mosquée de Ouagadougou, nous avons tenté d’avoir la version de ceux-là mêmes qui en sont toujours les gestionnaires. Parmi ces derniers, El Hadj Souleymane Zinaba, premier vice-président chargé de l’organisation et de la gestion de la grande mosquée. Nous l’avons écouté dans la soirée du mardi 1er septembre 2020 au sein de la grande mosquée.
« Le Pays » : On a appris que l’Imam Aboubacar Sana a été refoulé de la mosquée. Expliquez-nous ce qui s’est réellement passé le vendredi dernier à la grande mosquée.
El Hadj Souleymane Zinaba : Le vendredi dernier aux alentours de 9h voire 10h, nous avons aperçu des jeunes en gilet, en train de faire le tour de la mosquée. Mes éléments m’ont donné l’information en précisant qu’il s’agissait de jeunes proches de l’imam Mahmoudou Bandé. Je suis arrivé à la mosquée et j’ai constaté moi-même la situation. J’ai donc demandé à notre sécurité de prendre les dispositions nécessaires comme ils en ont l’habitude à chaque prière du vendredi. Après cela, j’ai été approché par l’un d’eux en la personne de Karim Sakandé que l’on appelle communément « Kabila ». Il me dit qu’ils sont là pour sécuriser l’arrivée de l’imam Aboubacar Sana sur le lieu de la prière, et qu’ils ne sont pas là pour la bagarre. J’ai rétorqué en lui disant que c’est la sécurité mise en place par la mosquée, qui s’occupera de cet aspect. Pour preuve, de son arrivée de la France (imam Sana) jusqu’à son domicile et ce durant 4 jours, il a été sécurisé par les jeunes de notre mosquée. Je lui ai donc dit qu’aucune autre sécurité ne pouvait s’ajouter à la nôtre si ce n’est celle de l’autorité publique. C’est sur ces entrefaits que nous avons vu arriver les CRS. Ils nous font savoir qu’ils sécuriseront les entrées principales et que notre sécurité s’occupera de l’intérieur. C’est ce à quoi nous avons obéi. Mieux, ils ont demandé que nos jeunes enlèvent leurs tee-shirts estampillés « sécurité » et nous avons encore obéi. Quand le cortège de l’imam est arrivé, je suis celui qui a indiqué le véhicule de l’Imam Sana aux forces de l’ordre qui étaient sur place. J’ai dit à ce dernier que seul le véhicule le transportant, doit avoir accès à la mosquée. Tout le reste du cortège doit rester dehors. Les vidéos sont là pour attester cette version des faits. C’est ainsi que le véhicule de l’imam Sana a eu accès à la cour de la mosquée. Et les jeunes qui étaient venus soi-disant pour assurer sa sécurité, ont profité pour entrer. Ils portaient des gilets jaunes et rouges. Ce ne sont pas nos jeunes. Quand l’imam Sana est descendu du véhicule, deux jeunes sont entrés dans la mosquée pour crier et dire à l’imam qui était en train de faire le sermon, de descendre. Ils ajoutent que l’imam Sana est arrivé avec un autre imam pour officier la prière. Et les gens, dans la mosquée, leur ont dit de sortir avec leur bruit. C’est au regard de ce bruit que l’imam Aboubacar Sana s’est vu obligé de sortir. Voyez-vous, le président Abdoul Rasmané Sana n’a pas été informé que l’imam serait présent à cette prière du vendredi. Pour preuve, ce dernier est allé le voir mais on lui a fait savoir qu’il a pris des médicaments et qu’il faut qu’il repasse après la prière. Il est donc reparti. En toute vérité, le président Sana ne savait pas que l’imam Aboubacar Sana viendrait à la prière du vendredi. Ceux qui disent qu’on a empêché l’imam de rentrer, seul Dieu connaîtra celui qui a posé cet acte. Car, ce n’est pas la vérité. Nul ne peut empêcher imam Sana de rentrer prier dans cette mosquée. Si véritablement on avait essayé d’empêcher l’imam d’entrer dans la mosquée, la CRS qui était là pour la sécurisation, allait s’interposer. Par ailleurs, l’imam Bandé est entré dans la mosquée, accompagné de ses proches. Il a pu effectuer deux unités de prière. Et il s’est assis. C’est l’un de ses gardes du corps qui lui a dit de sortir de la mosquée, après le départ de l’imam Sana. Donc, si véritablement on souhaitait refouler l’imam Sana, l’imam Bandé aussi n’allait pas avoir accès à la mosquée. On a distillé de mauvaises paroles. Pour l’arrivée de l’imam Aboubacar Sana et son départ, nous avons les vidéos qui attestent que nous ne l’avons pas refoulé.
« Quand nous sommes arrivés à la grande mosquée, on a constaté que 6 bureaux ont été vandalisés »
Il y a eu un autre fait le dimanche dernier à la grande mosquée où, dit-on, il y a eu du vandalisme. Comment êtes-vous organisés actuellement ici à la mosquée ?
On avait appris que des gens voulaient s’en prendre au président Abdoul Rasmané Sana. On ne savait pas véritablement là où ils allaient agir. C’est ainsi que nous avons décidé d’aller chez lui afin de le protéger. Et même les forces de l’ordre y étaient. C’est de là-bas qu’on nous a alertés que des gens veulent venir prendre en otage la grande mosquée. On voulait partir à la grande mosquée, mais le président Sana nous a interdit d’y aller. Il a dit de laisser ceux qui y sont, faire ce qu’ils veulent de la mosquée. Mais si ce pays a des textes, on verra bien la suite des évènements. C’est ainsi que nous sommes restés chez le président. Quand nous sommes arrivés à la grande mosquée, on a constaté que 6 bureaux ont été vandalisés ainsi que le sabotage de l’émetteur de la radio al Fadjr. Cette radio n’émet plus depuis le dimanche à 16h. Ils ont ramassé les outils de travail des jeunes qui assurent la sécurité au sein de la mosquée. Ils ont pris de l’argent, des téléphones portables qui étaient en charge, des marchandises de petits commerçants telles que des montres. Le constat a été fait par un huissier et la police. Dans la mosquée, ils ont vandalisé la porte par laquelle les imams ont accès à leur lieu de prière. Ils se sont préparés pour venir, car ils avaient des armes blanches et tout ce qui pouvait les aider à poser leurs actes. Malgré tout, actuellement, il y a la CRS qui assure la sécurité des lieux et des fidèles depuis le lundi dernier. Nul ne peut y avoir accès sans être fouillé. J’invite donc ceux qui sont des habitués des lieux, à ne pas avoir peur car les activités cultuelles se tiennent normalement.
Propos recueillis par Boureima KINDO