MALI : Sale temps pour IBK !
Au Mali, les attaques terroristes sont devenues quasi-quotidiennes. Quand elles n’ont pas lieu au Nord, elles se déroulent dans le Centre du pays. Et à chacune de ces attaques, l’on peut faire le constat que le mode opératoire est le même. L’on peut aussi noter que les cibles sont invariablement les mêmes. Ce sont soit les forces armées maliennes, soit les forces armées de la Minusma et de Barkhane. Le comble est que face à ces expéditions djihadistes meurtrières et récurrentes, la riposte semble molle, très molle. La preuve parmi tant d’autres vient de nous être donnée hier, 18 juin 2017, avec l’attaque du campement touristique de Kangaba, du nom de cet hôtel très fréquenté par les Occidentaux. Au moment où nous tracions ces lignes, il n’y avait pas de bilan disponible puisque l’attaque était toujours en cours. Peu avant, soit le 16 juin dernier, c’est le camp militaire de Bintagoungou qui avait été pris pour cible par des terroristes. Là, le bilan fait état de 5 soldats tués et de nombreux autres disparus.
Iyad Ag Ghali et ses camarades sont en passe de dicter leur loi au Nord et au Centre du Mali
Et comme d’habitude, les assaillants, après leur forfait, comme par enchantement, se sont évaporés dans les dunes de sable du désert de la zone de Tombouctou, après s’être offert le culot de réduire à néant le maigre arsenal militaire dont dispose le camp et d’emporter dans leur repli, puisque l’on ne peut pas parler de fuite, un engin et du matériel militaires. Il n’est donc pas exagéré de dire que Iyad Ag Ghali et ses camarades sont en passe de dicter leur loi au Nord et au Centre du Mali et ce, malgré la présence des soldats maliens, de Barkhane et de la Minusma. L’on peut même dire, à juste titre, que les barbus sont en train d’humilier la communauté internationale, puisqu’ils ont la témérité de pilonner à l’artillerie lourde, de manière pratiquement impunie, des camps militaires. Si c’étaient encore des individus qui, par désespoir, se faisaient exploser, l’on pouvait comprendre l’impuissance de ces milliers de soldats présents dans la zone. Mais que des djihadistes se permettent d’attaquer à l’arme lourde, quand ils veulent et comme ils veulent, des enceintes militaires tenues par l’armée malienne et la communauté internationale, là, il y a quelque chose de dérangeant et de révoltant. Dès lors, l’on peut comprendre que le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, soit monté au créneau, devant le Conseil de sécurité de l’ONU, pour supplier cette instance d’adopter impérativement une résolution anti-djihadiste dans le Sahel. Le chef de la diplomatie malienne a, en outre, demandé le renouvellement et le renforcement du mandat de la MINUSMA, en butte aujourd’hui à des attaques de plus en plus fréquentes et meurtrières. Il a été soutenu sur ce dernier point par le représentant de l’ONU au Mali, Mahamat Saleh Annadif. Celui-ci a, en effet, lancé un appel aux pays membres pour « combler les lacunes opérationnelles de la MINUSMA ». Pour être plus explicite, le diplomate onusien évoque l’idée selon laquelle la MINUSMA manque de moyens matériels, humains et financiers pour renforcer sa capacité opérationnelle. Sur ce point précis, l’on pourrait s’attendre à ce qu’il y ait une convergence de vues de l’ensemble des 15 membres du Conseil de sécurité. Par contre, là où les choses vont se corser, c’est au niveau de l’adoption d’une résolution, comme l’a demandé avec insistance la France, soutenant la création d’une force africaine anti-djihadiste dans le Sahel. En effet, Washington et Londres ne veulent pas en entendre parler. Pour le premier cité, c’est-à-dire les Etats-Unis, le G5 Sahel manque de précision. En outre, ils estiment qu’une simple déclaration du Conseil de sécurité, plutôt qu’une résolution, pourrait suffire. La vérité est que tous ces arguments cachent mal la volonté de l’administration Trump, de revoir à la baisse la contribution financière des Etats-Unis au budget de l’ONU.
Le Mali a besoin d’un consensus politique
Cette promesse, il l’avait faite aux Américains pendant la campagne présidentielle. Dans l’hypothèse où le chantre de « l’Amérique d’abord » la mettrait en exécution, l’on peut affirmer que cela comporte le risque de couper les ailes de l’ONU, au regard du fait que l’Oncle Sam est de loin, le plus grand bailleur de fonds de cette institution. De ce point de vue, les nouvelles pourraient ne pas être bonnes pour le G5 Sahel puisque l’argent, c’est le nerf de la guerre. Et le pays qui pourrait le plus en payer les pots cassés parmi les 5 pays qui constituent le groupe du G5 Sahel est, de toute évidence, le Mali ; lui qui, chaque jour que Dieu fait, reçoit sa dose de nuisance de la part de la kyrielle d’organisations djihadistes qui régentent actuellement le Sahel africain. Et pour ne pas arranger les choses pour Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), c’est dans ce contexte que l’opposition est vent debout dans son pays, pour contester les modifications constitutionnelles que le pouvoir veut proposer à l’arbitrage des Maliens, le 9 juillet prochain. Et à en juger par la forte mobilisation que l’on a pu observer le 17 juin 2017, dans les rues de Bamako, l’on peut en déduire que le camp anti-référendum représente une force qui est loin d’être négligeable. De tout ce qui précède, l’on peut résumer la situation sécuritaire et politique au pays de Modibo Kéïta comme suit : les terroristes massacrent dans le Nord et dans le Centre, l’idée du financement de la force du G5 Sahel risque d’être torpillée par les réticences des Etats-Unis, et pendant ce temps, l’on rue dans les brancards à Bamako. Bref, l’on peut affirmer que la météo politique n’est pas bonne pour IBK. Et pour que le temps ne se gâte pas davantage pour lui au point de se métastaser en déluge pour le Mali, il revient au président malien de se montrer grand en retirant pendant qu’il est encore temps, le projet de référendum qui se profile à l’horizon. Il doit d’autant plus le faire hic et nunc qu’aujourd’hui plus que jamais, le Mali a besoin d’un consensus politique de ses fils et filles pour mieux faire face à la menace djihadiste. C’est à ce prix que le Mali pourra se donner toutes les chances de rallier financièrement, matériellement et humainement les autres nations à sa cause.
« Le Pays »