MARCHE DE LA CIGARETTE : Ces tarifs qui frisent la « concurrence déloyale »
L’auteur du point de vue ci-dessous dénonce ce qu’il considère comme des « pratiques anticoncurrentielles » dans le marché du tabac au Burkina Faso. Il en appelle au respect des textes, pour éviter que les plus forts n’écrasent les plus faibles. Lisez plutôt !
Lors de son passage en décembre dernier, la loi de finances 2018 a modifié la structure des droits d’accises régissant le secteur du tabac d’un système à deux tiers avec des produits dits « bas de gamme » et « standard » à 30% et des produits de « luxe» à 40% vers un système à taux unique, de 45% pour toutes les catégories de cigarettes.
Sur la même lancée, un arrêté conjoint du ministère du Commerce, de l’industrie et de l’artisanat et celui de l’Economie, des finances et du développement, signé le 15 janvier 2018, a défini une nouvelle fixation des prix selon une catégorisation établissant que :
– les produits « bas de gamme » ou « populaires » sont ceux dont le prix de vente au détail homologué est égal ou supérieur à six cents (600) F CFA et inférieur ou égal à sept cents (700) F CFA le paquet de vingt (20) ;
– les produits « standards » étant ceux dont le prix de vente au détail homologué est supérieur à sept cents (700) F CFA et inférieur ou égal à huit cents (800) F CFA le paquet de vingt (20) cigarettes ;
– les produits de « luxe » étant ceux dont le prix de vente au détail homologué est supérieur à huit cent (800) F CFA le paquet de vingt (20) cigarettes.
Avec un système à un seul niveau maintenant en place, il convient alors de s’interroger quant à la signature de cet arrêté continuant à catégoriser les produits du tabac et leur prix.
Suite à ce changement, le leader du marché, Imperial Tobacco Group, au travers d’une large communication papier à travers son réseau de distribution, a procédé en date du 1er février 2018, à l’augmentation des prix de ses produits, les faisant ainsi passer de 500 à 650 F CFA pour Excellence, de 650 à 750 F CFA pour Hamilton et de 700 à 800 F CFA pour Davidoff leur marque « Premium ».
On peut ici s’étonner de la rapidité de la réactivité de l’industriel, eu égard au délai requis pour mettre en place une telle communication, lorsqu’on sait qu’ils n’ont eu que quelques jours après la publication de l’arrêté du 15 janvier et la validation subséquente des prix réquis par les autorités compétentes, pour s’y préparer !
Quoi qu’il en soit, dans le but de se conformer à cette nouvelle disposition, les fabricants ou importateurs de cigarettes de toutes marques ont déposé des dossiers de réajustement des prix de leurs produits.
Toutefois, à leur grande surprise, leurs dossiers de réajustement des prix ont été purement et simplement invalidés par les autorités compétentes du ministère du Commerce, de l’industrie et de l’artisanat et ce, sans explication précise à ce jour.
A quoi pourrait-être dû ce rejet dans un marché régi par la liberté des prix et le respect de la concurrence ?
S’agirait-il là d’une tentative du gouvernement de leur imposer un prix de vente et les contraindre à aligner leurs offres sur celles arrêtées par le dépositaire des marques « Hamilton » et « Davidoff » au Burkina Faso ?
Si tel est le cas, cela constituerait une grave entrave à la loi portant organisation de la concurrence au Burkina Faso instituant non seulement une liberté de fixation des prix et interdisant les pratiques anticoncurrentielles même imputables à l’Etat ainsi que les prix imposés de manière directe ou indirecte.
En tout cas, beaucoup y voient la main d’un grand concurrent qui userait de sa position dominante en s’adonnant à des pratiques de concurrence déloyale et contraires aux usages honnêtes, pour régner en maître sur le marché du tabac au pays des Hommes intègres .
Romuald L. Marie OUEDRAOGO