AFFAIRE CHEBEYA – BAZANA EN RDC
2 juin 2010 – 2 juin 2021. Cela fait 11 ans, jour pour jour, que le directeur exécutif de la Voix des sans voix, Floribert Chebeya, et son chauffeur, Fidèle Bazana, trouvaient la mort dans des circonstances non encore élucidées. De la narration des faits, il ressort que les deux hommes ont été trucidés dans les locaux de l’inspection générale de police où ils avaient rendez-vous avec le maître des lieux qu’était le général John Numbi. Ce double assassinat avait provoqué une clameur mondiale au point que les autorités congolaises, avec à leur tête Joseph Kabila, n’avaient eu d’autre choix que d’ouvrir une enquête qui, au final, avait abouti à une parodie de procès. Car, tout a été mis en œuvre pour mettre hors de cause le principal accusé qu’est le général John Numbi dont la seule sanction a été sa suspension de ses fonctions à titre conservatoire. Mais c’était sans compter avec la détermination des mouvements de défense des droits humains et des familles des victimes qui, en dépit des obstacles que multipliait le régime Kabila, n’ont pas renoncé au combat pour la manifestation de la vérité. Tant et si bien que plus d’une décennie après, le dossier Chebeya – Bazana a connu quelques avancées à la faveur du changement de régime. En effet, un haut gradé de la police congolaise vient d’être assigné à résidence surveillée. Et le dossier d’instruction sera non seulement rouvert dans quelques jours, mais aussi le général John Numbi qui passait pour être un intouchable, a compris que les temps ont changé et a préféré prendre la poudre d’escampette. Porté disparu, l’ex-patron de la police congolaise fait l’objet d’un mandat d’arrêt et pourrait être extradé si son pays en fait la demande. Car, tout ou presque l’accable dans la disparition tragique de Floribert Chebeya et Fidèle Bazana.
Les familles des victimes et les ONG de défense des droits humains tiennent le bon bout
En effet, outre le témoignage à charge d’un ancien responsable de la police, en l’occurrence Paul Mwilambwe, il y a la récente sortie des deux membres du commando en exil qui sont passés aux aveux, déclarant que John Numbi a été le commanditaire du double assassinat perpétré le 2 juin 2010. John Numbi est donc mal barré. Car, voilà un homme qui faisait la pluie et beau temps en République démocratique du Congo (RDC) et qui avait pris le risque de lier étroitement son destin à celui d’un dictateur et qui, aujourd’hui, se retrouve groggy de ses propres turpitudes au point de fuir son pays. Pour une humiliation, c’en est une pour un général quatre étoiles qui se prenait pour l’alpha et l’oméga de tout en RDC. En tout cas, les familles des victimes et les ONG de défense des droits humains tiennent le bon bout. Elles doivent maintenir la pression, surtout que le divorce est désormais consommé entre le président Félix Tshisékédi et son prédécesseur, Joseph Kabila. Car, il y a fort à parier que si les relations entre les deux hommes étaient toujours au beau fixe, le dossier Chebeya-Bazana serait torpillé. On se rappelle d’ailleurs qu’à son arrivée au pouvoir, Tshisékédi fils avait surpris désagréablement les uns et les autres en affirmant qu’il ne voulait pas « fouiner dans le passé » de Kabila. Heureusement que deux ans après, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Si fait que les deux hommes se regardent aujourd’hui en chiens de faïence.
Boundi OUOBA