FIN DU DIALOGUE NATIONAL INCLUSIF ET SOUVERAIN AU TCHAD : Quel gâchis !
La cérémonie de clôture du dialogue national inclusif et souverain a eu lieu le 8 octobre dernier au Tchad, soit soixante-douze heures après la fin des travaux. Malgré la promesse de libération de prisonniers, faite par le président Mahamat Deby, les conclusions de ce dialogue national, sont contestées par une cinquantaine de structures politiques et associatives qui dénoncent un passage au forceps sur bien des décisions. La clameur de désapprobation qui a accueilli la fin des travaux, vient en rajouter à une atmosphère générale déjà empuantie par le retrait de l’Eglise catholique et de certains groupes armés. C’est donc un sentiment général de gâchis qui se dégage de ces Assises nationales qui étaient censées faire taire les dissensions entre les Tchadiens qui, depuis des décennies, n’ont cessé de se regarder en chiens de faïence. Mais pouvait-il en être autrement ? Il est difficile de répondre à cette question par l’affirmative quand on connaît toutes les difficultés qui ont entouré le démarrage de ce dialogue national dit inclusif et souverain et qui ont jalonné tout son parcours. Ces difficultés sont l’expression de la triste réalité que les Tchadiens dont toute l’histoire est écrite en lettres de sang sur une toile tissée de clivages ethnicistes, ne croient pas au dialogue comme mode de résolution des problèmes et encore moins à la démocratie comme mode d’accession et de gestion du pouvoir d’Etat.
La dynastie Deby peut donc théoriquement poursuivre son règne
Il en résulte que ce dialogue n’était qu’une simple entourloupe politique destinée à faire avaliser l’agenda de Deby Fils qui remporte ainsi le jackpot en obtenant le prolongement de la Transition et la possibilité de se présenter aux prochaines élections. La dynastie Deby peut donc théoriquement poursuivre son règne. Mais le jeu politique au Tchad se jouera-t-il conformément à ce scénario préétabli ? Rien n’est moins sûr quand on sait que pour de nombreux acteurs de la scène politique tchadienne, les fruits de ce dialogue n’ont pas tenu la promesse des fleurs. Des groupes armés comme le FACT menacent même de reprendre les armes. Et il n’est pas non plus dit que la centaine de structures politiques et associatives qui ne se reconnaissent pas dans les conclusions de ces assises nationales, avalera ce deal qui a tous les atours d’une escroquerie politique. Mais en attendant de voir de quoi demain sera fait au Tchad, la plupart de ces contestataires ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes. Non seulement ils ont fait preuve d’un manque de vision politique en s’embarquant dans le navire de ce dialogue dont les finalités étaient bien visibles au départ, mais ils ont aussi été hypnotisés par les mallettes d’argent qui, à n’en pas douter, ont bien circulé pendant toute la traversée. Faut-il en rire ou en pleurer ? Mais telles sont les dures réalités des oppositions africaines ballotées, qui manquent de voix quand les bouches sont pleines. Cela dit, le dialogue aura eu le mérite, chose rare dans l’histoire de ce pays où ce sont les vainqueurs de la guerre qui gèrent toujours le pouvoir d’Etat, de rassembler, même pour une brève durée, autour d’une table, les fils et filles de la Nation. Sans nul doute que cela vaudra son pesant d’or dans le jeu politique au Tchad. L’autre gain du dialogue est que les armes se sont tues pendant que les protagonistes de la scène politique tchadienne se parlaient. C’est donc la preuve que les Tchadiens qui se sont toujours parlé par le langage des armes, peuvent s’exprimer autrement. Il convient de consolider ce maigre acquis en rendant permanent le dialogue.
SAHO