RECOURS EN ANNULATION DE LA DISSOLUTION DU PASTEF : Quelles chances, pour le parti de Sonko, de revenir dans le jeu électoral ?
Un mois et demi après sa dissolution par décret présidentiel dans les conditions que l’on sait, le parti Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (PASTEF) a déposé un recours devant la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et la Cour suprême du Sénégal. Dans la requête introduite auprès de l’instance judiciaire communautaire, le parti d’Ousmane Sonko demande que cette institution supranationale ordonne à l’Etat du Sénégal, d’annuler ou à tout le moins de suspendre la mesure de dissolution qui le frappe et de le rétablir dans ses droits politiques en vue de la présidentielle du 25 février prochain. La même requête d’annulation et de suspension de la mesure de dissolution, a été déposée auprès de la Cour suprême du Sénégal. Au-delà des arguments juridiques avancés par les avocats du parti d’opposition le plus en vue, la question qui se pose est la suivante : quelles chances, pour le parti d’Ousmane Sonko, de revenir dans le jeu électoral ?
Les déboires judiciaires de Sonko sont en train de déteindre négativement sur son parti
La question est d’autant plus fondée qu’à cinq mois de la présidentielle, les enjeux sont énormes alors que le temps semble jouer contre la formation politique du jeune leader de l’opposition. Cela est d’autant plus vrai que la course à la succession du président Macky Sall qui a renoncé à la tentation du troisième mandat dans les conditions que l’on sait, est déjà ouverte. Et les candidats déclarés se bousculent déjà au portillon au moment où d’autres fourbissent leurs armes dans l’ombre. Pendant ce temps, le PASTEF, lui, se bat pour exister, en étant engagé dans un combat pour la survie où il garde le mince espoir de revenir dans le jeu électoral, après la condamnation disqualificative de son leader, Ousmane Sonko, dans le procès d’atteinte aux mœurs qui l’opposait à une employée d’un salon de massage dakarois. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les déboires judiciaires de celui qui se voulait le principal challenger de Macky Sall dans les urnes, sont en train de déteindre négativement sur son parti qui est en passe de rater son rendez-vous électoral avec l’histoire. Et ce, s’il devait in fine se retrouver dans l’incapacité de présenter un candidat à la prochaine présidentielle. Et l’horizon paraît d’autant plus sombre pour le PASTEF que ce principal parti d’opposition à Macky Sall, se retrouve englué dans des dossiers judiciaires à l’issue plutôt incertaine. Comment peut-il en être autrement quand on voit comment la Justice se hâte doucement sous nos tropiques, pour rendre ses décisions ? C’est dire si d’ici à la présidentielle du 25 févier prochain, rien ne dit que le dossier sera vidé devant les différentes juridictions dans le sens voulu par le PASTEF. Or, une décision tardive, même en cas de victoire devant l’une et/ou l’autre des juridictions, ne servirait pas à grand-chose sinon pour l’histoire, au parti de l’opposant.
Les chances du PASTEF d’avoir gain de cause, paraissent minces
Et quid si les deux juridictions venaient à rendre des décisions contradictoires ? Toujours est-il qu’en saisissant simultanément la Cour suprême et la Cour de Justice de la CEDEAO, le PASTEF veut se donner les meilleures chances de succès, en menant le combat sur deux fronts. Derrière le recours à la Cour de justice de la CEDEAO, se cache certainement une volonté de se prémunir contre une éventuelle décision arbitraire de la Justice sénégalaise dont le PASTEF a toujours crié à l’inféodation au pouvoir. Mais il faut croire que le parti du maire de Ziguinchor n’est pas pour autant sorti de l’auberge, même en cas de décision favorable de l’instance communautaire. Surtout si la résistance des Etats à l’exécution des arrêts de telles juridictions supranationales se traduit en refus d’obéissance comme cela a été le cas dans de nombreux cas dont les précédents Karim Wade au Sénégal, Kpatcha Gnassingbé au Togo, Guillaume Soro en Côte d’Ivoire pour ne citer que ceux-là. C’est dire si dans ce dossier, sauf retournement de situation, les chances du PASTEF d’avoir gain de cause à l’effet d’obtenir sa participation au scrutin présidentiel de février 2024, paraissent minces. Car, à moins de vouloir se tirer une balle dans le pied, on ne voit pas comment la coalition au pouvoir, Benno Bokk Yakaar, qui est déjà fragilisée par des défections et pas des moindres en son sein, suite à la désignation du Premier ministre Amadou Bâ pour porter le dauphinat de Macky Sall à la prochaine présidentielle, pourrait remettre en selle un challenger de taille comme le PASTEF. En tout état de cause, on ne peut pas reprocher au PASTEF de lutter pour sa survie encore moins pour la conquête du pouvoir d’Etat. Mais s’il échouait dans ce combat à court terme, il ne pourrait s’en prendre qu’à lui-même et à son président, Ousmane Sonko, qui aura prêté le flanc à cette non-participation à une présidentielle qui s’annonçait pourtant prometteuse pour lui et son parti.
« Le Pays »