ENLISEMENT DE LA GUERRE AU SOUDAN : D’où viendra le salut du peuple soudanais ?
Un an après son déclenchement en avril 2023, la guerre au Soudan continue de faire rage entre le chef de l’armée, le Général Abdel Fattah Al-Burhan, et son rival des Forces de soutien rapide (FSR), le Général Mohamed Hamdane Daglo dit Hemetti, qui se disputent le pouvoir à Karthoum. Et si ce conflit armé inter-soudanais est encore loin d’être une guerre oubliée, il n’est cependant pas loin de lasser la communauté internationale qui ne manque pas d’initiatives de paix visant à rapprocher les deux frères ennemis. Mais dont les efforts tardent encore à produire les effets escomptés dans le sens de la désescalade devant conduire à l’arrêt des combats. Comment peut-il en être autrement quand les protagonistes ne montrent aucune volonté réelle d’aller à la paix, en nourrissant chacun le secret espoir d’une victoire militaire sur le terrain ? Comment peut-il encore en être autrement quand la violation systématique des cessez-le-feu, qui tend à annihiler toute perspective de paix à court ou moyen terme, en même temps qu’elle trahit une volonté des deux généraux ennemis d’avoir l’un ou l’autre à l’usure, est le vice le mieux partagé par les belligérants ? Toujours est-il qu’avec des protagonistes engagés dans une guerre totale et qui refusent de se parler, on se demande d’où viendra le salut du peuple soudanais.
Derrière les deux chefs de guerre soudanais, sont tapis dans l’ombre, des puissances étrangères aux intérêts divergents
La question est d’autant plus fondée qu’avec l’équilibre des forces en présence, le conflit est aujourd’hui au bord de l’enlisement. Et bien malin qui saurait dire qui du Général Al-Burhan et de son rival Hemetti, prendra militairement le dessus sur l’autre. Pendant ce temps, c’est le peuple soudanais qui continue de souffrir le martyre d’une guerre injuste qui lui a été imposée. Et de payer le plus lourd tribut de la mésentente entre des généraux aux ego surdimensionnés, et dont le degré de manque de patriotisme se mesure à l’aune de la haine viscérale qu’ils se vouent mutuellement au point de prendre en otage le destin de tout un peuple. Et aujourd’hui, avec les milliers de morts et les millions de déplacés fuyant les combats, la situation du pays est d’autant plus chaotique que la situation humanitaire reste fortement préoccupante. Et ce, au grand dam des organisations humanitaires qui ne demandent que de meilleures conditions de travail sur le terrain, au moment où le besoin d’assistance humanitaire se fait sentir chez la moitié des cinquante millions d’habitants du pays menacés par la famine. C’est le lieu de saluer la conférence humanitaire internationale pour le Soudan et ses voisins, qui s’est ouverte le 15 avril dernier à Paris à l’effet de trouver, au-delà des questions humanitaires, une solution politique négociée au conflit. C’est la preuve, si besoin en était que la communauté internationale est loin d’avoir abandonné le Soudan à son triste sort. Même si l’on peut déplorer son incapacité à imposer la paix, qui frise parfois l’hypocrisie. Car, il est aujourd’hui un secret de Polichinelle que derrière les deux chefs de guerre soudanais, sont tapis dans l’ombre, des puissances étrangères aux intérêts divergents.
La communauté internationale ne pourra rien si les Soudanais eux-mêmes ne montrent pas une volonté d’aller à la paix
Et tant que ces mains invisibles de parrains mafieux continueront de tirer les ficelles en apportant leur soutien à l’un ou l’autre des belligérants, tout porte à croire que le Soudan ne connaîtra pas de sitôt la paix. Et le supplice des Soudanais aujourd’hui, sera celui des Libyens hier, qui ont vu leur pays partir en lambeaux, écartelé entre des gouvernements rivaux au gré des intérêts des grandes puissances après la disparition du Guide de la Jamahiriya, le colonel Mouammar Kadhafi, dans les conditions que l’on sait. Et le Soudan est d’autant plus en train d’emprunter le même chemin, si ce n’est déjà fait, que la soif de changement des Soudanais qui se sont débarrassés de la dictature de Omar el Béchir dans les conditions que l’on sait, est aujourd’hui contrariée par la boulimie du pouvoir et le cynisme d’officiers militaires. Toujours est-il que si le pays est aujourd’hui à la croisée des chemins, c’est peu de dire qu’avec cette guerre qui n’en finit pas de se prolonger, il court inexorablement à la dislocation. C’est dire si la responsabilité des deux Généraux ennemis soudanais qui ont entraîné leur pays dans ces violences meurtrières, est engagée devant l’Histoire. C’est dire aussi si la solution à cette crise qui a commencé banalement et qui dure depuis un an maintenant, viendra d’abord des Soudanais eux-mêmes. En tout état de cause, la communauté internationale ne pourra rien ou pas grand-chose, si les Soudanais eux-mêmes ne montrent pas une volonté d’aller à la paix. Et le Général Al-Burhan et son rival Hemetti doivent en prendre conscience à l’effet de désarmer les cœurs et les esprits, s’ils aiment encore leur pays.
« Le Pays »