AN 9 DE L’ASSASSINAT DE GHISLAINE DUPONT ET CLAUDE VERLON : Saura-t-on jamais la vérité ?
Le 2 novembre dernier, marque le neuvième anniversaire de l’assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon. En rappel, les deux journalistes de RFI avaient été enlevés et tués en 2013, dans les encablures de Kidal, dans le Nord du Mali. Le double assassinat avait été revendiqué par Al Qaïda au Maghreb islamique mais la mort violente des deux journalistes, n’a jamais cessé d’interroger tant les circonstances comportent de nombreuses zones d’ombre. Est-ce une tentative de sauvetage qui aurait mal tourné ? Est-ce une question de rançon non honorée ? La responsabilité de l’armée française serait-elle peu ou prou engagée dans le dénouement sanglant du rapt ? Des questions qui restent aujourd’hui encore sans réponses. Si fait que neuf ans plus tard, le mystère reste entier sur les motifs de l’enlèvement et les circonstances exactes de la mort des deux journalistes. En tout cas, la version officielle qui a été servie, et qui fait état de la découverte, par un convoi de l’armée française, des corps criblés de balles des deux reporters non loin du pick-up en panne de leurs ravisseurs, ne convainc pas les proches des victimes.
Plus le temps passe, plus les espoirs de voir jaillir toute la lumière s’amenuisent
Réunis en Association « Les amis de Ghislaine Dupont et Claude Verlon », ces derniers réclament la déclassification de documents couverts par le secret défense. Une démarche qui a du mal à aboutir, et qui se heurte à une lenteur judiciaire difficilement compréhensible. Contribuant à épaissir le mystère dans une affaire qui a pourtant besoin de connaître son épilogue, pour permettre aux familles des victimes, de faire le deuil de leurs disparus. C’est dans ce contexte qu’intervient le neuvième anniversaire de l’assassinat des deux suppliciés du désert malien, sans que le dossier ne connaisse de grandes avancées sur le plan judiciaire. Toute chose qui fait planer le doute sur un aboutissement heureux du dossier. Car, plus le temps passe, plus les traces et les indices disparaissent et plus les espoirs de voir jaillir toute la lumière dans ce dossier sombre, s’amenuisent. Comment peut-il en être autrement quand la France, qui est au cœur du dossier tout comme elle était au cœur de la lutte contre le terrorisme au Sahel au moment des faits, ne se montre pas particulièrement coopératrice en procédant à la levée du secret-défense qui aurait pu permettre de donner un coup d’accélérateur au dossier de l’assassinat de ses propres ressortissants ? Paris aurait-elle des choses à cacher ? L’histoire nous le dira sans doute. Mais en attendant, si la lumière ne peut pas venir de Paris, comment pourrait-elle venir des dunes de sable du désert malien, au moment où les relations entre Paris et Bamako se sont particulièrement refroidies ? Autrement dit, saura-t-on jamais la vérité sur les tenants et les aboutissants de ce double assassinat ? La question est d’autant plus fondée que le neuvième anniversaire de ce douloureux événement, intervient dans un contexte de fortes tensions entre la France et le Mali qui ne sont pas loin de la rupture des relations diplomatiques, depuis le départ, du Mali, de la force française Barkhane dans les conditions que l’on sait.
Le silence persistant de l’armée et de l’Exécutif français ne manquent pas d’interroger
Et, les ponts entre Bamako et Paris étant ainsi pratiquement coupés, on peut se demander s’il n’y a pas aussi à craindre pour le dossier. Car, si le dossier ne paraît pas aujourd’hui une priorité pour Paris, on ne voit pas comment les autorités de la transition malienne pourraient se sentir plus concernées. C’est dire si la clé pour lever le voile sur une bonne partie de ce mystère, se trouve à Paris. Et la France est aujourd’hui l’un des acteurs majeurs à pouvoir faire bouger les lignes dans ce dossier désormais emblématique. C’est pourquoi le silence persistant de l’armée et de l’Exécutif français, malgré les multiples relances des proches des victimes qui ne cachent pas leur agacement doublé du sentiment d’être menés en bateau, ne manquent pas d’interroger. En attendant, chaque anniversaire de ce triste assassinat devient encore plus interpellateur. Et il y a des raisons de croire qu’il ne cessera de l’être tant que des voix continueront à s’élever pour demander la lumière sur cette affaire. En tout état de cause, l’Organisation des nations unies (ONU) ne s’inscrit pas dans une autre dynamique quand elle a décrété la journée du 2 novembre, Journée internationale de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre des journalistes, en mémoire des deux journalistes français. C’est dire si l’assassinat de Gislaine Dupont et Claude Verlon ne saurait rester impuni. Mais encore faudrait-il parvenir à faire la lumière sur le dossier.
« Le Pays »