FERMETE AFFICHEE DU PF CONTRE TOUTES LES FORMES D’INCIVISME
On attend de voir pour croire
Le président du Faso (PF), Roch Marc Christian Kaboré, a eu un entretien avec la presse, le 24 juin 2018. A cette occasion, presque toutes les questions touchant à l’actualité nationale lui ont été posées. Celle de la grève au MINEFID a largement été évoquée. Le PF a réitéré l’option du dialogue du gouvernement mais en martelant ceci : « Levez le mot d’ordre de grève, et on va discuter ». Manifestement, le préalable de Roch Kaboré a été entendu par la partie syndicale. En effet, à en croire un communiqué émanant de la corporation, le mot d’ordre de grève est suspendu. Mais, on peut tout de même se poser la question de savoir : A quand la fin de ce bras de fer entre les 2 parties ? Cette question est d’autant plus pertinente que les effets dévastateurs de cette longue grève avaient commencé à inquiéter bien des Burkinabè. Une de ses conséquences, par exemple, est le refus de la correction financière liée aux avancements, à la bonification d’échelons consécutive aux décorations de 2016 et 2017. Même les reclassements en ont eu pour leur grade. En un mot comme en mille, les fonctionnaires, notamment les pauvres enseignants concernés par ces questions, en paient un lourd tribut. Vivement donc que les uns et les autres mettent un peu d’eau dans leur vin pour que ces victimes collatérales de cet épique bras de fer, puissent entrer en possession de leur dû. Au delà d’eux, c’est l’ensemble des Burkinabè qui prient afin que le syndicat et le gouvernement puissent, au plus vite, accorder leurs violons. Car tout le pays commence à en pâtir sérieusement. Cela dit, un autre sujet qui a été évoqué, lors de cet entretien, est celui de l’incivisme. Roch Marc Christian Kaboré n’a pas eu besoin de porter de gants pour y répondre. La loi sera appliquée dans toute sa rigueur, a-t-il laissé entendre. Ainsi donc, tous les comportements déviants seront réprimés désormais. Dans le même registre, Roch Marc Christian Kaboré a promis de traquer, sans état d’âme, tous les entrepreneurs qui mettent un point d’honneur à exécuter les marchés publics de la pire des manières.
On ose croire que l’éléphant annoncé n’arrivera pas avec un pied cassé
L’on peut saluer cette fermeté présidentielle, mais avec modération. En tout cas, on attend de voir pour croire, pour plusieurs raisons. La première est que le fantôme a déjà eu tout le temps de s’aménager une place confortable dans la maison Burkina au point que le fait de vouloir l’en déloger aujourd’hui, s’apparente à une véritable gageure. Et cet habitus est alimenté par une mauvaise compréhension de la démocratie et de l’Etat de droit par bien des Burkinabè. Ces derniers sont convaincus qu’un tel régime politique donne tous les droits et pas le moindre devoir. Il en résulte des comportements dont la principale caractéristique est la défiance des lois et règlements de la République. Houphouët Boigny, abordant la problématique de la chienlit qui régnait dans son pays alors qu’il était aux affaires, avait lâché ceci : « Je préfère l’injustice au désordre ». Et pour justifier cette thèse, il avait laissé entendre qu’il était plus facile de remédier à l’injustice que de trouver une solution au désordre. Et l’on peut se permettre d’adhérer à la thèse du « vieux », au regard des dégâts causés aujourd’hui par le désordre et l’incivisme au Burkina Faso. Ce faisant, l’on peut même dire que l’on est en train de tuer à petit feu la liberté, car cette valeur, ce bien précieux, selon Jean Jacques Rousseau, ne peut être préservé sans le respect de la loi. L’autre forme d’incivisme qui fait des ravages au pays des Hommes intègres, est la non-exécution des marchés publics dans les règles de l’art. Ainsi, des écoles nouvellement construites, perdent leur toit au moindre vent alors qu’elles ne sont pas encore réceptionnées. Le même phénomène s’observe au niveau des routes. Et la liste est loin d’être complète. Tout récemment, le ministre des Infrastructures, en sortie terrain sur l’axe Ouagadougou-Kaya en réhabilitation, a pu constater de visu certaines insuffisances des travaux. Et quant au non-respect des délais d’exécution des marchés publics, cela est devenu pratiquement la norme, par les temps qui courent. Et face à tous ces manquements qui plombent manifestement le développement du pays, l’on a l’impression que l’Etat a capitulé.
Car, dans un Etat normal, bien de ces entrepreneurs répondraient de leurs actes devant les tribunaux. Mais au Burkina, c’est tout autre. Roch Marc Christian Kaboré a juré la main sur le cœur d’y mettre fin. Cette promesse a été déjà entendue. Seulement, elle n’a jamais été suivie d’effets. Cette fois-ci, on ose croire que l’éléphant annoncé n’arrivera pas avec un pied cassé pour parler comme les Ivoiriens. En attendant, la prudence commande que l’on adopte la posture de Saint Thomas, c’est-à- dire, « voir avant de croire ».
Sidzabda