NOUVEL ASSASSINAT D’UN OPPOSANT AU BURUNDI : Qui arrêtera le boucher de Bujumbura ?
Le Burundi n’arrête pas de compter ses morts, même après la forfaiture du pasteur président Nkurunziza qui a tordu le cou à la Constitution de son pays et aux accords d’Arusha pour opérer par un passage en force, un hold-up électoral. Ce, après avoir marché sur les cadavres d’une centaine de ses compatriotes opposés à son troisième mandat. Malheureusement, le décompte macabre n’est pas prêt de s’arrêter puisque dans la nuit du lundi 7 au mardi 8 septembre dernier, un autre opposant, Patrice Gahungu de l’Union pour la paix et la démocratie (UPD) dont il était le porte-parole, tombait sous les balles assassines de sinistres individus, certainement à la solde du président pasteur. Car, qui d’autre que lui et ses partisans, auraient intérêt à poser ce énième acte ignoble, en vue de réduire au silence une voix discordante, à l’instar de celle du président de ce même parti, Zedi Feruzi, refroidi en mai dernier, aux premières heures chaudes de la contestation ? En tout cas, dans le contexte actuel, l’on voit mal l’opposition guillotiner un de ses bouillants leaders pour faire porter le chapeau à Nkurunziza, au moment où elle a le plus besoin de soutiens de taille pour continuer le combat. Ce serait une attitude suicidaire qui consisterait à tuer le berger et laisser les brebis à la portée du loup. Et même si c’était le cas, ce serait un signe de faillite du gouvernement qui a le devoir de protéger tous les citoyens burundais sur son sol. Quoi qu’il en soit, avec la succession des événements, comment ne pas penser que même indûment installé dans le fauteuil présidentiel, Nkurunziza ne semble pas rassasié de se repaître du sang de ses compatriotes qui continuent de dénoncer son troisième mandat ? Et face à la lâcheté de la communauté internationale qui semble avoir rendu les armes face au fait accompli, l’on se demande qui arrêtera le boucher de Bujumbura. D’autant plus que l’opposition, déjà fragilisée par la répression féroce qui s’abat sur ses militants et les nombreux morts enregistrés dans ses rangs depuis des mois, éprouve de plus en plus de difficultés à lui tenir tête, dans ce combat de longue haleine. Et, ironie du sort, tout porte à croire que c’est au moment même où Nkurunziza « joue le dernier acte de sa forfaiture » comme nous titrions dans notre édition d’hier, en menant une offensive diplomatique auprès de certains de ses voisins pour expliquer que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, qu’il ne s’embarrasse pas de fioritures pour nettoyer les dernières poches de résistance en exterminant ses opposants qui ont encore l’outrecuidance de donner de la voix sur un problème qui, pour lui, est clos. Il achève, en tout cas, de convaincre, pour ceux qui en doutaient encore, qu’il est un dictateur de la pire espèce, qui ne met même pas la forme dans ses actes ignobles, sûr qu’il est de sa toute puissance.
Il devrait y avoir un signal fort et courageux à envoyer à Bujumbura
Nkurunziza qui est conscient qu’en dehors d’un coup de force, rien ne peut encore lui arriver, veut en finir, une fois pour toute, avec toute forme de résistance. Dans cette optique, la tournée de la mission qu’il a envoyée dans certains pays voisins, pourrait avoir pour but de s’assurer que ces derniers n’apporteront pas leur soutien à un éventuel coup de force pour le faire partir, comme l’ont, du reste, juré les militaires déserteurs qui se sont réfugiés à l’extérieur. Dans ces conditions, avoir l’assurance d’un voisin comme le Kényan Uhuru Kenyatta, qui a accueilli de nombreux réfugiés, lui permettrait de dormir relativement d’un bon œil. Toutefois, la communauté internationale ne peut pas continuer à fermer les yeux et laisser Nkurunziza continuer à massacrer ses compatriotes, fussent-ils ses opposants. A défaut d’une action énergique, elle devrait renforcer la pression par toutes sortes de sanctions appropriées parmi lesquelles les fermetures d’ambassades et l’arrêt de toute coopération. Certes cela semble surréaliste dans ce contexte de compétition économique et diplomatique avec la Chine et la Russie, mais il devrait y avoir un signal fort et courageux à envoyer à Bujumbura. Faute de quoi l’histoire retiendra contre la communauté internationale l’accusation de crime de non assistance à peuple en danger.
Outélé KEITA