PROCESSUS DE VALIDATION DES CANDIDATURES A LA PRESIDENTIELLE AU SENEGAL : Le Conseil constitutionnel doit jouer la carte de la transparence
A quelques semaines de la présidentielle du 25 février prochain, la validation des candidatures par le Conseil constitutionnel continue de faire des vagues au Sénégal. En cause, le fichier électoral dont de nombreux candidats remettent en cause la fiabilité, suite à l’invalidation des candidatures de plusieurs prétendants au trône, pour cause de parrainages jugés non conformes. De quoi jeter le trouble dans l’esprit de ces candidats recalés qui ne comprennent rien au rejet de ces parrainages, alors que les personnes concernées, soutiennent-ils, disposent d’une carte d’électeur parfaitement valide. C’est dans ce contexte qu’une quarantaine de candidats, parmi lesquels une dizaine dont les candidatures ont été validées, ont pris à témoin l’opinion internationale, notamment l’Union européenne (UE) pour signaler des dysfonctionnements à l’effet d’obtenir plus de transparence dans la validation des candidatures, notamment sur le logiciel et le fichier électoral utilisés pour le contrôle des parrainages. Au regard de la polémique qui enfle au-delà même des candidats recalés, il faudra que les grands juges acceptent de se remettre en cause pour procéder à une réévaluation de leur outil de travail et à un examen minutieux de la situation.
L’institution judiciaire de validation des élections a besoin de dissiper les doutes sur son impartialité
Le Conseil constitutionnel doit d’autant plus jouer la carte de la transparence qu’au-delà du tort d’écarter arbitrairement des candidats, il y a la crédibilité du processus électoral à préserver. Et dans ce contexte de tensions préélectorales consécutives à la saga judiciaire de l’opposant Ousmane Sonko qui a été écarté de la course au fauteuil présidentiel dans les conditions que l’on sait, il faut éviter d’ajouter de la frustration à la frustration ; toute chose qui pourrait faire le lit d’une contestation électorale ou postélectorale dont nul ne saurait prédire ni l’ampleur ni l’issue. Le Sénégal n’a pas besoin de ça. C’est pourquoi le Conseil constitutionnel doit travailler à rassurer non seulement les candidats, mais aussi l’opinion publique sur l’authenticité de son logiciel. Cela est d’autant nécessaire qu’en tant qu’arbitre, l’institution judiciaire de validation des élections a besoin de dissiper les doutes sur son impartialité. C’est pourquoi il importe que la base d’appréciation qui est, ici, le fichier électoral, soit la même pour toutes les parties prenantes au processus électoral. C’est dire s’il y a lieu de se rassurer sur la conformité du fichier électoral du Conseil constitutionnel avec celui utilisé par les candidats pour aller à la recherche des parrainages. Ainsi que celui de la Commission électorale nationale autonome (CENA), surtout si ledit fichier a fait l’objet de réactualisation. Autrement, comment expliquer qu’un si grand nombre de parrains restent « non identifiés » et introuvables dans le fichier électoral du Conseil constitutionnel, si ces personnes disposent vraiment d’une carte d’électeur valide en amont ? La question mérite d’autant plus d’être prise au sérieux par l’institution judiciaire qu’à quelques semaines de la présidentielle du 25 février prochain, qui fait couler beaucoup d’encre et de salive, le temps presse.
Le Conseil constitutionnel gagnerait à revoir sa copie
Et c’est sa crédibilité qui est, ici, en jeu, au moment où la confiance ne semble pas la chose la mieux partagée entre tous les acteurs politiques. En tout cas, ce n’est pas un hasard si les candidats qui récriminent aujourd’hui contre le Conseil constitutionnel, se retrouvent à ne pas être ceux qui ont maille à partir avec le pouvoir de Dakar. Cela dit, la question qui se pose est de savoir si la requête de la quarantaine de candidats qui dénoncent ces « dysfonctionnements graves » et souhaitent une prorogation du délai de validation des candidatures, portera fruit. Cela est d’autant plus important qu’au-delà de la volonté de voir clair dans le jeu, le souhait des candidats recalés est d’avoir la possibilité de régulariser leurs dossiers respectifs. L’autre question, au cas où le logiciel du Conseil constitutionnel s’avérerait effectivement défaillant, est de savoir quel impact son éventuelle révision, pour autant que la décision en soit prise et que cela soit encore techniquement possible, pourrait avoir sur le processus de validation des candidatures en cours. Faut-il s’attendre à ce que certains candidats soient repêchés ? Faut-il s’attendre à d’autres surprises ? Bien malin qui saurait répondre à ces questions. En tout état de cause, en attendant la publication du fichier électoral dans les délais impartis par la loi, le Conseil constitutionnel gagnerait à revoir sa copie et à engager le processus de vérification de son propre fichier. Cela pour non seulement s’assurer qu’il ne fait pas fausse route, mais aussi et surtout rassurer l’opinion nationale et internationale qui a les yeux rivés sur le Sénégal.
« Le Pays »