RETRAIT ANNONCE DE L’AFC-M23 DE LA VILLE D’UVIRA : Effet d’annonce ou annonce sans effet ?
Moins d’une semaine après la conquête de la ville d’Uvira, les rebelles de l’AFC-M23 annoncent qu’ils se retireront de ladite ville. L’information a été donnée à travers un communiqué rendu public le 15 décembre dernier, prenant de court les opinions congolaise et internationale. Mais, comme on le sait, l’AFC-M23 n’a pas fait une telle annonce de gaieté de cœur. Il l’a faite sous la pression accentuée des Etats-Unis qui n’ont jamais fait mystère de leur déception ou préoccupation suite à la prise de la ville d’Uvira, qu’ils considèrent comme une violation de l’accord de Washington, pour ne pas dire un pied de nez fait au président Donald Trump.
Donald Trump doit jouer les gendarmes jusqu’au bout
Et ce n’est pas tout. Car, selon des sources diplomatiques, Washington n’exclut pas de nouvelles sanctions ciblées contre des responsables rwandais soupçonnés de ramer à contre-courant des efforts en cours pour un retour de la paix dans la partie orientale de la République démocratique du Congo (RDC). C’est dire si l’AFC-M23 et son parrain rwandais sont dos au mur. C’est donc pour éviter de s’attirer les foudres du locataire de la Maison blanche qu’ils ont annoncé leur retrait d’Uvira. Ils l’ont fait malgré eux. Toutefois, il faut éviter d’être dupe pour croire en leur bonne foi, si tant est qu’il en est une. Car, tout en se disant prêt à se retirer de la ville d’Uvira, l’AFC-M23 pose des conditions que Kinshasa n’acceptera pas non plus facilement. Il s’agit notamment de la « démilitarisation » d’Uvira et du déploiement dans ladite ville, d’une force neutre. Autrement dit, l’AFC-M23 ne veut pas du retour à Uvira, des forces armées congolaises qu’il a réussi à déloger à l’issue de violents combats. Toute chose qui fait dire à certains que si l’annonce des rebelles de se retirer d’Uvira n’est pas un effet d’annonce, elle n’est pas loin d’une annonce qui restera sans effet. A moins que les Etats-Unis continuent à mettre la pression sur Kigali et ses filleuls, de sorte à les obliger à respecter leurs engagements sur le terrain. Cela dit, s’il veut donc se donner des chances de voir prospérer l’accord signé sous son égide, et produire des résultats tangibles sur le terrain, Donald Trump doit jouer les gendarmes jusqu’au bout. Car, faut-il le rappeler, entre Kigali et Kinshasa, la confiance a foutu le camp à tel point que les deux capitales se regardent en chiens de faïence. On a vu d’ailleurs comment les deux présidents que sont Paul Kagame et Félix Tshisékédi ont passé le temps à se snober ; tant ils ne veulent pas se voir, même en peinture. Seules Doha et Washington ont réussi le tour de force de les réunir autour d’une table de négociations. Et là aussi, au-delà de la photo de famille, on ne note aucune avancée significative sur le terrain, qui puisse rassurer les populations déjà fort éprouvées. Autant dire que l’on fait du surplace face à une crise sécuritaire qui, si rien n’est fait, pourrait provoquer un « embrasement régional ».
Restaurer la confiance entre les différentes parties prenantes au conflit dans l’Est de la RDC
Le jeu en valant donc la chandelle, il faut que les Etats-Unis prennent leurs responsabilités afin de faire bouger les lignes. Pour ce faire, il leur revient de travailler davantage à aplanir les divergences de vues afin de restaurer la confiance entre les différentes parties prenantes au conflit dans l’Est de la RDC. Quand on sait que le président américain, en plus du Prix Nobel de la paix qu’il convoite, lorgne aussi les « terres rares » de la RDC, on espère que ce dernier mettra les bouchées doubles pour stabiliser le pays, et sauver le soldat Félix Tshisékedi à la peine ; lui qui, naguère, avouait publiquement être venu aux affaires trouver une « armée de clochards ». Et, preuve que la situation est très explosive en RDC, on a appris l’arrestation, le 16 décembre dernier, du Secrétaire général du parti de Joseph Kabila, en l’occurrence Emmanuel Ramazani Shadary, pour ne pas le nommer. Il aurait été conduit vers une destination inconnue. Que lui reproche-t-on ? Faut-il voir un lien de cause à effet entre cette arrestation et l’évolution de la situation dans l’Est du pays ? En tout cas, c’est un pas que d’aucuns ont vite fait de franchir, surtout quand on sait qu’en plus de l’arrestation du sieur Shadary perçu par Kinshasa comme étant l’homme-lige de Kabila, le siège du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) a été aussi perquisitionné. On se rappelle d’ailleurs que le même Ramazani Shadary avait été déjà convoqué et auditionné par la Justice pour des propos jugés séditieux.
« Le Pays »
