VIOLS ET VIOLENCES CONTRE LES FEMMES AU SOUDAN : La guerre dans toute sa laideur
Les violences sexuelles comme arme de guerre. C’est ce qui se passe au Soudan où les combats font rage entre le Général Abdel Fattah al-Burhan à la tête de l’armée régulière, et le Général Mohamed Hamdane Daglo dit Hemetti des Forces de soutien rapide (FSR). Une guerre pour le pouvoir qui dure depuis plus de dix-neuf mois maintenant, et qui a fait des milliers de morts et des millions de déplacés dont certains ont trouvé refuge dans des pays voisins. Créant l’une des pires catastrophes humanitaires au monde, avec une situation rendue encore plus difficile en raison de la violation systématique des cessez-le-feu. Mais le calvaire des Soudanais ne s’arrête pas là puisqu’un rapport onusien publié fin octobre dernier, fait état d’une généralisation des viols dans ce conflit fratricide aux conséquences déjà très dramatiques, mais dont nul ne saurait, pour l’instant, prédire l’issue, au regard de l’équilibre des forces sur le terrain. Un rapport glaçant, qui met en lumière les abus et autres exactions commises par les forces combattantes des deux camps, sur les populations, avec toutefois une responsabilité plus accrue des paramilitaires des Forces de soutien rapide dans les enlèvements et détention de femmes soumises à des viols répétés, parfois collectifs. La guerre dans toute sa laideur, qui interpelle d’autant plus la conscience humaine que selon ce rapport, certaines victimes préfèrent se donner la mort pour échapper à leurs bourreaux, quand pour d’autres survivantes de viols, le suicide reste la seule option d’une vie à jamais brisée.
Ce sont les pauvres populations qui paient le plus lourd tribut d’une guerre qu’elles n’ont pas demandée
C’est dire la souffrance qu’endurent ces femmes soudanaises qui restent manifestement les premières victimes de la guerre, quatre ans après la révolution contre le régime d’Omar el Béchir, qui avait porté un vent d’espoir pour les Soudanais en général et l’autre moitié du ciel en particulier. Le pire est que face à la situation chaotique que vit le pays, aucune perspective de sortie de crise ne pointe à l’horizon qui s’assombrit de jour en jour. Les tentatives de médiation n’ayant jusque-là abouti qu’à des échecs, dans un contexte où les positions restent tranchées avec des belligérants qui ne sont pas loin de négocier avec le couteau dans le dos ; chacun nourrissant le secret espoir d’une victoire militaire sur le terrain. Pendant ce temps, ce sont les pauvres populations qui paient le plus lourd tribut d’une guerre qu’elles n’ont pas demandée. Plus particulièrement les femmes qui sont aujourd’hui moralement anéanties au point que certaines croient pouvoir trouver leur salut en s’engageant sous les drapeaux, dans les rangs de l’armée régulière. C’est dire si la situation que vivent ces femmes qui souffrent des affres de la guerre, est critique au Soudan. C’est dire aussi la nécessité de trouver une solution pour que ces crimes ne restent pas impunis. Car, en temps normal, ce sont des actes déjà hautement répréhensibles.
Le plus grand bien aujourd’hui pour un Etat, reste la stabilité
A fortiori en temps de guerre où c’est encore pire, au regard de la vulnérabilité et de la fragilité des pauvres victimes qui cherchent d’abord à vivre avant de chercher à se construire socialement.
Au-delà, ce rapport sur la situation de la femme soudanaise dans un contexte de conflit armé, sonne comme une interpellation voire un plaidoyer pour l’élimination des violences à l’égard des femmes dans le monde. Des violences aussi récurrentes que multiformes, qui appellent aujourd’hui plus qu’hier, à des réponses adéquates. Et ce en termes d’engagement conséquent et d’actions vigoureuses qui vont au-delà de la journée internationale contre les violences faites aux femmes, célébrée le 25 novembre de chaque année sous l’égide des Nations unies, depuis 1999. En tout état de cause, la communauté internationale ne peut pas rester les bras croisés face au drame qui se joue au Soudan. Une crise humanitaire et sécuritaire sur fond d’insécurité alimentaire et de violences sexuelles endémiques qui sont la preuve que le plus grand bien aujourd’hui pour un Etat, reste la stabilité. Encore faudrait-il que dans le cas du pays de Omar el Béchir, les acteurs politiques veuillent y travailler. A commencer par les militaires engagés aujourd’hui dans une lutte à mort pour le pouvoir, après avoir pris en otage la révolution d’un peuple qui croyait avoir fait le plus dur en se débarrassant du dictateur et qui est aujourd’hui au bord de la désillusion.
« Le Pays »