VIOLENCES AU BURUNDI : N’kurunziza sur les traces de Néron
Depuis quelques mois, l’atmosphère sociopolitique au Burundi sent le souffre. En cause, la candidature du président sortant, Pierre N’kurunziza, à un troisième mandat que ne lui autorise pas la Constitution. Si le maître de Bujumbura avait jusque-là entretenu le flou sur ses intentions réelles, au point de semer quelque peu le doute dans certains esprits, depuis le week-end dernier, il a tombé le masque et l’histoire s’est accélérée au Burundi. En effet, l’officialisation de sa candidature, par son parti, à l’occasion d’un congrès extraordinaire, a mis le feu aux poudres, à moins de deux mois de l’élection présidentielle et l’on se demande jusqu’où ira la fronde. D’autant plus que depuis lors, le Burundi semble entré dans l’œil du cyclone, avec des rues qui ne désemplissent pas de militants de l’opposition en colère, décidés à braver les forces de l’ordre pour manifester leur mécontentement et leur désapprobation de ce qu’ils qualifient de coup d’Etat constitutionnel.
N’kurunziza a décidé d’utiliser les grands moyens et de ne pas reculer
Hier encore, ils étaient des milliers à descendre dans la rue, à l’appel de l’opposition. Pourtant, sentant venir le danger, l’Eglise catholique burundaise, la Communauté internationale, la société civile burundaise et même certains de ses proches avaient pris les devants pour mettre en garde le président burundais contre les dangers d’une telle candidature. Mais rien n’y fit. En faisant porter sa candidature par son parti, l’homme fort de Bujumbura a volontairement mis le feu à son pays et, comble de l’insouciance, il n’a rien trouvé de mieux à faire que d’esquisser des pas de danse lors de sa cérémonie d’investiture. Un véritable Néron des temps modernes, qui a apparemment choisi la méthode forte pour se maintenir au pouvoir et qui semble tombé sous le charme de l’incendie qu’il a lui-même provoqué, comme pour prouver sa toute puissance. Et si l’empereur romain n’avait pas hésité à marcher sur les cadavres de certains de ses proches dont son frère, sa mère et sa femme, le dictateur burundais semble, de son côté, bien décidé à ne faire aucun cadeau à tous ceux qui se dresseront sur son chemin pour l’empêcher de rebeloter. En témoignent l’impressionnante machine de répression déployée contre les manifestants de l’opposition, les arrestations de militants des droits de l’Homme, la restriction des espaces et des moyens d’expression et de communication, notamment à travers la fermeture des réseaux sociaux et de certaines radios comme la RPA. Toutes choses qui font planer des lendemains incertains sur le Burundi car, face à la détermination de l’opposition, tout porte à croire que N’kurunziza a décidé d’utiliser les grands moyens et de ne pas reculer, en descendant le rideau de fer sur son pays pour mieux réprimer. C’est pourquoi il a franchi le Rubicon en arrêtant un activiste des droits de l’Homme.
Ainsi, contre vents et marées, N’kurunziza a fait le choix d’aller jusqu’au bout de la dictature. Et l’on se demande jusqu’où ira sa folie « pouvoiriste » et meurtrière et qui sauvera le peuple burundais. Surtout en l’absence d’une armée républicaine.
En tout état de cause, l’on ne peut pas se taire et laisser N’kurunziza massacrer des populations pour assouvir des ambitions personnelles. Il revient à la communauté internationale de soutenir le combat du peuple burundais. A ce titre, au-delà des paroles de mise en garde, elle serait bien inspirée de prendre des mesures énergiques contre le régime de Pierre N’kurunziza. L’une des pistes de pacification pourrait aussi être l’implication de la Première dame qui, en mère de famille, devrait refuser d’engager sa responsabilité, en assistant sans rien dire au massacre d’enfants burundais.
C’est au moment où les dictateurs se croient souvent les plus forts, qu’ils sont quelquefois les plus vulnérables
En tout état de cause, en bandant les muscles pour passer au forceps, le président burundais s’engage dans un chemin qui est certes difficile pour l’opposition, mais qui peut être périlleux pour lui-même. En effet, d’ici la tenue de l’élection, la situation va inéluctablement évoluer dans un sens ou dans l’autre. Et, tout peut arriver. C’est pourquoi le peuple burundais ne doit pas abandonner le combat, s’il est convaincu de défendre une cause juste. Car, c’est au moment où les dictateurs se croient souvent les plus forts, qu’ils sont quelquefois les plus vulnérables. On l’a vu au Niger, avec Salou Djibo qui a mis fin au règne de l’homme du Tazartché, Mamadou Tandja. On l’a vu au Burkina Faso, avec ce qui est arrivé à Blaise Compaoré. Même si Bujumbura n’est ni Ouagadougou, ni Niamey, N’kurunziza aurait tort de croire qu’il est à l’abri de toute éventualité. Et le réveil pourrait être douloureux pour lui. Car, quelle que soit la force d’un dictateur, il n’arrivera jamais à bout d’un peuple déterminé. Car les dictateurs passent, mais les peuples restent.
Au demeurant, c’est cette sagesse qui a fini par habiter le président béninois, Thomas Yayi Boni qui, à la faveur des élections législatives du week- end dernier dans son pays, a une fois de plus réitéré sa volonté de se retirer au terme de son dernier mandat. Sans aucune ambiguïté, Yayi Boni a rassuré ses compatriotes qu’il ne serait plus candidat à aucun scrutin dans son pays. Un comportement responsable, digne d’un véritable homme d’Etat, et aux antipodes de celui du maître de Bujumbura qui persiste, lui, à brûler son pays, sans remords et sans regrets. Cela dit, si l’on peut comprendre le silence de la plupart des chefs d’Etat de cette région des Grands lacs, qui aspirent presque tous à commettre le même forfait que Pierre N’kurunziza, l’on comprend moins le silence de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC), face aux risques d’embrasement de ce pays membre, et la volonté du premier citoyen du Burundi de vendanger son pays. Assurément, il y a de quoi avoir honte d’être africain, en ce XXIe siècle.
« Le Pays »
lewang
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On ne peut pas comprendre les hommes politiques! si pour Blaise on comprenait que c’est parce qu’il a “mis des épineux dans la marre qu’il ne voulait pas rentrer se baigner” c’est imcomréhensible pour d’autres, qui pourtant sont venus aux affaires par le jeu de l’alternance. Sage décision pour Boni Yayi meme si les Béninois doivent rester vigilants.
28 avril 2015ntare V
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Bon article…
28 avril 2015Bédjou
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Quelle que soit la force d’un dictateur, il n’arrivera jamais à bout d’un peuple déterminé. Car les dictateurs passent, mais les peuples restent. Vérité de vérité
28 avril 2015