HomeA la uneSORTIE DE MANUEL VALLS SUR ALI BONGO : Des vérités sur fond de calculs politiciens  

SORTIE DE MANUEL VALLS SUR ALI BONGO : Des vérités sur fond de calculs politiciens  


 

Ali Bongo est-il vraiment un président mal élu ? C’est la question que l’on est en droit de se poser suite aux propos tenus le week-end dernier par le Premier ministre français, Manuel Valls, lors d’une émission télévisuelle tendant à mettre en doute l’élection à la régulière, du président gabonais en 2009. En effet, répondant à la relance d’un invité sur le plateau de la deuxième chaîne de télévision française, le chef du gouvernement français n’a pas bégayé en affirmant, en substance, qu’Ali Bongo n’était pas un président élu, du moins  « pas comme on l’entend ».  Il n’en fallait pas plus pour créer un incident diplomatique entre Paris et Libreville qui a immédiatement rappelé son ambassadeur en France pour consultation. Toutefois, ce n’est pas la première fois que les relations entre les deux pays sont mises à mal de la sorte. En effet, après l’épisode de la confiscation de l’avion présidentiel gabonais en France, puis celui de la mise en garde à vue du directeur de cabinet de Bongo fils,  cette sortie du Premier ministre français est  le troisième incident du genre qui jette un froid sur les relations franco-gabonaises, depuis l’accession de Ali Bongo au palais présidentiel de Libreville. Pour en revenir aux propos de Manuel Valls, la question que l’on pourrait se poser est de savoir si cette sortie est un lapsus ou une réponse qui traduit tout haut le fond de sa pensée.  En attendant que l’intéressé lui-même soit plus explicite sur la question, il est difficile de penser que la langue du Premier ministre français a simplement fourché, puisqu’il ne s’est pas dédit lorsque son interlocuteur l’a relancé sur le sujet. En outre, il est difficilement compréhensible qu’à une telle hauteur de responsabilité, un personnage aussi averti que Manuel Valls puisse se laisser aller aussi facilement à une telle indélicatesse politico-diplomatique, sans avoir eu à remuer au moins sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler.  De là à penser que Valls a dit tout haut ce que l’establishment politique français pense tout bas, il y a un pas que certains ont vite fait de franchir dans le landerneau politique gabonais. Quoi qu’il en soit, cette déclaration ne manquera pas de faire couler beaucoup d’encre et de salive au Gabon.  Et dans ce contexte préélectoral, une telle sortie qui vient littéralement remettre en question la légitimité même du président gabonais, est  pain bénit pour  son opposition qui pousse depuis un certain temps des quatre fers pour éjecter le rejeton d’Omar Bongo Ondimba, du palais présidentiel de Libreville.

Ali Bongo traîne comme un boulet au pied, le péché originel d’avoir été élu d’une façon discutable

Quand on sait ce que représente le Gabon dans le dispositif de la Françafrique, l’on se demande ce qui vaut à Bongo fils autant d’impairs de la part des autorités françaises, au regard de l’excellence des relations entre les deux pays, et surtout du poids qui fut celui de son père dans ces relations. Est-ce un signe des temps ? Paris est-elle en train de lâcher Ali Bongo ? La Françafrique aura-t-elle finalement vécu ? En tout cas, Bongo père avait su forcer le respect de la France, au point que Paris pouvait dormir sur ses deux oreilles tant qu’Omar Bongo était au pouvoir pour défendre ses intérêts.  Aujourd’hui, le fils ne semble pas avoir tout à fait chaussé les bottes du père, en termes de relations privilégiées avec l’Hexagone. Pour sûr, ce ne sont pas ses flirts  supposés ou réels avec d’autres partenaires comme la Chine ou les Etats-Unis, qui pourraient consolider les liens de ce couple, surtout au moment où son partenaire est à la recherche d’un second souffle pour son économie qui est au plus mal depuis un certain temps. En tout cas, les propos de Manuel Valls, en cette période d’imminence électorale, ne semblent pas le fait du hasard. Si ce n’est pas une forme de mise en garde, cela y ressemble fort. En cela, l’on pourrait dire que Manuels Valls prend des risques calculés en s’attaquant à Ali Bongo qui traîne comme un boulet au pied, le péché originel d’avoir été élu d’une façon discutable. Si l’homme devait se présenter pour un troisième mandat, il sait ce qu’il lui reste à faire pour avoir les faveurs de Paris. Ce n’est pas le président congolais, Denis Sassou Nguesso, qui dira le contraire ; lui qui est pratiquement allé chercher l’onction de Paris pour contourner les dispositions constitutionnelles qui l’empêchent de briguer un autre mandat.

En tout état de cause, si Ali Bongo nourrit des ambitions de se succéder à lui-même, il s’avère impératif pour lui de s’entourer de toute la légitimité nécessaire,  s’il veut, en tout cas, se débarrasser de l’image de président mal élu qui lui colle à la peau depuis l’élection de 2009, et surtout le fameux  « on a inversé les résultats au bénéfice d’Ali Bongo » lâché à l’époque par un ancien Conseiller Afrique de l’Elysée qui avait édifié les Français sur les tenants et les aboutissants de cette élection controversée. De ce point de vue, les propos de Manuels Valls pourraient être vus comme des vérités sur fond de calculs politiciens. Après le rappel de son ambassadeur, que fera maintenant Libreville ? L’on attend de voir.

Outélé KEITA


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