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76E  ASSEMBLEE GENERALE DE L’ONU  


Il s’était préparé à y prendre la parole, mais le colonel Mamady Doumbouya et ses hommes en ont décidé autrement. Lui, c’est l’ex-président guinéen, Alpha Condé qui, au lendemain du coup d’Etat qui l’a renversé, le 5 septembre dernier, s’inquiétait du discours qu’il devait prononcer à la tribune de la 76e Assemblée générale  de l’ONU qui s’est ouverte le 21 septembre 2021. L’histoire dit que le président déchu a même réclamé son ordinateur de travail à ses tombeurs pour peaufiner son discours.  Au-delà de l’image pathétique d’un dirigeant sénile complètement déconnecté de la réalité du coup de force qui a brutalement mis fin à plus d’une décennie de règne, cette réaction de l’ex-homme fort de Conakry a au moins le mérite de le présenter sous le jour d’un chef d’Etat qui prenait sa mission au sérieux, au point de vouloir être l’une des voix encore audible de l’Afrique à la tribune de l’ONU. C’est dire si à son corps défendant,  Alpha Condé est le grand absent de cette grande-messe annuelle des dirigeants de la planète au pays de l’Oncle Sam. Une édition marquée du sceau de la pandémie du Covid-19, qui verra bien des délégations y participer par visioconférence même si plus de la moitié des têtes couronnées de la planète y sont physiquement présents.

 

On peut regretter que l’essentiel des pouvoirs de l’ONU reste toujours concentré entre les mains d’une poignée de pays

 

 

Ceci étant, si l’on peut se féliciter de la longévité de l’organisation mondiale, il y a néanmoins lieu  de s’interroger aujourd’hui sur son rôle et surtout son avenir. Car, plus de soixante-quinze ans après sa création, alors que le monde a fortement changé, on peut regretter que l’essentiel des pouvoirs de l’ONU reste toujours concentré entre les mains d’une poignée de pays qui ont le pouvoir d’infléchir ses décisions dans le sens unique de leurs intérêts.  En effet, l’Assemblée générale est devenue pratiquement une coquille vide ; la plupart des décisions importantes ne se prenant qu’en comité restreint, sous l’œil vigilant des cinq pays jouissant du droit de  veto, que sont les Etats-Unis d’Amérique, la Russie, le Royaume Uni, la Chine et la France. C’est dire s’il est temps de repenser le fonctionnement de l’ONU pour l’adapter au contexte actuel du monde. A défaut, il faudrait, aux autres pays, trouver la formule pour briser le cercle fermé de ce club sélect de pays dont les décisions impactent le monde entier. D’autant que jusque là, ni le poids économique de l’Inde, ni la puissance commerciale de l’Allemagne, ni l’influence montante du Japon, ni l’émergence du Brésil encore moins les pétrodollars des pays du Golfe, n’ont permis à ces pays d’y entrer. C’est pourquoi l’on est porté à se demander quelle carte l’Afrique pourrait abattre,  car il est incompréhensible que ce continent entier n’ait pas de siège permanent au Conseil de sécurité qui est l’organe institutionnel où se fait et se défait l’équilibre du monde. Une absence des véritables centres de décisions, qui tend à reléguer le continent africain au second rang au moment où il est pourtant devenu le théâtre de toutes les rivalités politiques, économiques et géostratégiques des grandes puissances du monde.

 

 

De quoi regretter l’absence de grands tribuns de la trempe des Fidel Castro, Mouammar Kadhafi et autre Thomas Sankara

 

 

 Si fait qu’aujourd’hui, les AG de l’ONU ne présentent plus de grand intérêt pour les populations africaines quand elles ne passent pas simplement inaperçues. A tout le moins, elles constituent, pour ainsi dire, une  occasion de villégiature aux frais de la princesse, pour de nombreux chefs d’Etat africains à la tête de délégations allées beaucoup plus pour remplir une formalité que pour espérer titiller les grands de ce monde en abordant des sujets qui fâchent. Et pourtant, ce ne sont pas les centres d’intérêt qui manquent. A commencer par le terrorisme qui est une préoccupation mondiale et qui sévit aujourd’hui durement dans la bande sahélo-saharienne avec des velléités d’extension de ses tentacules jusqu’aux pays du littoral. Il y a aussi la question de la crise sanitaire de la pandémie du Covid-19, qui impacte négativement les économies africaines déjà sous perfusion, sans oublier, dans une moindre mesure, la question du franc CFA et de la monnaie unique de la CEDEAO qui a encore, peut-on dire, récemment pris du plomb dans l’aile dans les conditions que l’on sait. De quoi regretter l’absence, à une telle tribune, de grands tribuns de la trempe des Fidel Castro, Mouammar Kadhafi et autre Thomas Sankara qui, eux, savaient se faire entendre et porter la voix des plus faibles en troublant la conscience des plus grands. C’est peut-être un rôle du genre que voulait jouer Alpha Condé, à cette 76ème AG de l’ONU, pour marquer les esprits et entrer davantage dans l’histoire au-delà de sa Guinée natale. Malheureusement pour lui,  l’histoire ne lui en aura laissé ni le temps, ni l’opportunité.

« Le Pays »

 


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