APPELS A LA DEMISSION DE ZUMA : Plus tôt il partira, mieux ça vaudra
Jacob Zuma vit-il ses derniers moments à la tête de l’Etat sud-africain ? C’est la question que l’on se pose depuis que les appels à sa démission se multiplient, avec l’entrée en scène de son propre parti, l’ANC, le parti au pouvoir, réuni en session de crise depuis le début de la semaine. Déjà, le week-end dernier, des cadres du parti s’étaient rendus à son domicile à l’effet de le pousser à rendre le tablier, sans succès. Depuis lors, les tractations se poursuivent pour inciter le natif de Nkandla à lâcher prise, en raison de ses nombreux scandales et autres accusations de corruption qui ont fini par avoir raison de la patience de ses compatriotes dont une large frange ne le juge plus digne de présider aux destinées de leur pays. Mais à quoi sert-il de résister, quand on a tout ou presque tout un peuple contre soi ? S’il a encore le sens de l’honneur, Jacob Zuma devrait avoir la sagesse de rendre lui-même le tablier avant d’être poussé vers la sortie tel un malpropre. Mais depuis le début de la semaine, l’histoire semble s’accélérer au point que le 7 février dernier, la capitale sud-africaine bruissait de rumeurs faisant état d’un départ imminent du pouvoir du chef de l’Etat qui était, à en croire certaines sources, en négociations avancées avec son parti sur la question d’une éventuelle transition.
Zuma aura été une malheureuse parenthèse de l’Histoire
En attendant d’en savoir davantage sur les « discussions constructives » qu’il aurait eues avec le président de l’ANC, Cyril Ramaphosa, dans ce sens, l’on ne serait pas étonné que Jacob Zuma demande, entre autres, l’impunité et la non confiscation de ses biens, en plus de plaider pour le maintien de certains de ses fidèles lieutenants au sein de l’appareil d’Etat. Même s’il faut condamner ce genre de deals qui ne contribuent pas au renforcement de la démocratie et de la bonne gouvernance sous nos tropiques, c’est peut-être le moindre mal pour se débarrasser de certains satrapes du continent, dans l’espoir qu’ils seront rattrapés un jour par leur passé. Et dans le cas de l’Afrique du sud, Zuma aura été une malheureuse parenthèse de l’Histoire à refermer au plus vite. Loin de pouvoir chausser les bottes de Nelson Mandela, il n’aura pas fait mieux que Thabo Mbeki qui se sera montré plus digne en ne faisant pas autant dans la résistance lorsqu’il a été contraint à la démission. C’est dire que l’ANC se devait de réagir, pour sauver les meubles et essayer de préserver ce qui lui reste encore de crédibilité. D’autant plus que le septuagénaire président zulu qui a certainement gardé tous ses réflexes de vieux combattant, dans un sursaut d’orgueil et certainement mû par un instinct de survie, se montre plus difficile à convaincre et à destituer que l’on ne le pensait ; survivant à sept motions de défiance à l’Assemblée nationale, qui l’ont vu plier comme le roseau, sans jamais rompre.
C’est donc de guerre lasse et en toute logique que l’instance dirigeante du parti s’est résolue à prendre le taureau par les cornes pour crever l’abcès. Et il était temps. Car, de plus en plus, la question Zuma est en train de cristalliser les passions et d’empoisonner la vie politique en Afrique du sud où la question de son départ alimente visiblement les discussions.
Zuma n’a jamais été aussi proche de la sortie
D’ailleurs, l’homme devra encore faire face à une autre motion de défiance, la huitième du genre, d’ici à quelques semaines, s’il persiste à rester encore au pouvoir malgré les nombreux appels à la démission. C’est donc un Jacob Zuma vomi, visiblement éprouvé et en plein désamour avec son peuple, qui semble livrer son ultime combat pour une sortie de scène la plus honorable possible. Mais jusqu’à quand durera le bras de fer ? Jusqu’à quand les tractations vont-elles durer ? Jusqu’à quand les Sud-africains devront-ils encore supporter leur président ? Bien malin qui pourra répondre à ces questions. Toutefois, au point où on en est, l’on est porté à croire que plus tôt Zuma partira, mieux ça vaudra. D’abord pour lui-même, pour mettre fin au cauchemar lié à ce long bras de fer engagé par ses contempteurs depuis plusieurs mois et qui ne semblent vouloir reculer devant rien pour obtenir son départ, suite à ses nombreux errements et son égarement à la tête de l’Etat. Sans oublier qu’il peut s’aménager une sortie honorable, en ne manquant pas l’occasion de couvrir ses arrières. Ensuite, pour son parti, l’ANC, aujourd’hui divisé entre pro-Zuma et anti-Zuma qui se regardent en chiens de faïence, et qui pourra désormais envisager l’avenir avec plus de sérénité, après avoir payé dans les urnes au prix fort les frasques répétées de son chef, en subissant une mémorable bérézina lors des élections municipales de 2016, dans des localités comme Johannesburg, Pretoria et Port Elisabeth jadis réputées être ses bastions inexpugnables. Cela passe par une réorganisation du parti pour recoller les morceaux en vue des échéances futures. Enfin, pour le peuple sud-africain qui se verra ainsi débarrassé de son fantasque dirigeant qu’il traînait comme un boulet à son pied et qui l’aura conduit dans l’une des plus graves récessions économiques que le pays ait jamais connues.
En tout état de cause, Jacob Zuma n’a jamais été aussi proche de la sortie. Partira, partira pas ? Ses jours semblent comptés à la tête de l’Etat sud-africain, mais il faut attendre de voir. Les heures et jours à venir seront déterminants.
« Le Pays »