APPEL DE LA MAJORITE A L’APAISEMENT AU MALI
Un acte de raison
Le compte à rebours pour la présidentielle au Mali, a pratiquement commencé, et le moins que l’on puisse dire, c’est que les préparatifs de ce grand rendez-vous se passent dans un climat de grandes tensions entre la majorité et l’opposition. A titre d’illustration, l’on peut évoquer les violences du 2 juin dernier. En effet, ce jour-là, les forces de l’ordre ont sévi, selon le gouvernement, contre une manifestation non autorisée d’une coalition de partis politiques d’opposition. Le bilan de la répression fait état de plus de 25 personnes blessées. Il faut rappeler que les opposants ont motivé leur marche pour exiger la transparence du scrutin présidentiel de juillet prochain d’une part et de l’autre, dénoncer ce qu’ils appellent l’accaparement des médias d’Etat par le camp présidentiel. Soumaïla Cissé, le patron de l’opposition, avait attaqué au vitriol cet état de fait. Et tout laisse croire que sa colère n’est pas, pour le moment, retombée.
Le Mali a besoin de sérénité
En effet, demain vendredi 8 juin, Soumaïla Cissé et ses camarades projettent d’organiser une journée de protestation pour exiger du pouvoir, des élections propres, un égal accès aux médias publics ainsi que la fin de la répression des forces de l’ordre à l’endroit de l’opposition. Ces exigences ne devraient pas faire rougir les yeux des tenants du pouvoir, pour autant qu’ils soient démocrates. Les choses devraient donc se passer de manière civilisée. Mais l’on peut constater déjà que la marche de l’opposition risque d’être contrariée par un élément perturbateur. En effet, des jeunes se réclamant de la mouvance présidentielle, prévoient d’organiser le même jour et au même endroit, c’est-à-dire à Bamako, des manifestations pour, disent-ils, porter dans les rues la contradiction à l’opposition. En somme, il s’agit d’une contre-manifestation. Et cela ressemble fort à une provocation. Et celle-ci est lourde de tous les dangers. C’est pourquoi l’on peut saluer la mise au point de la mouvance présidentielle qui se désolidarise de l’initiative de ce groupuscule de jeunes se réclamant d’elle. Mieux, la majorité, par la voix de Bakary Tréta, président du RPM (Rassemblement pour le Mali), parti au pouvoir, a appelé, lors d’une conférence de presse, à un apaisement. A cette même occasion, le patron du parti présidentiel a invité non seulement l’opposition, mais également les partis de la majorité à « rentrer dans la République, à respecter les règles du jeu et à se préparer à une compétition civilisée ». Voici qui est bien dit. Pour autant qu’il soit sincère, l’on doit le couvrir de compliments.
Car, les démocrates du Mali et d’ailleurs n’en demandent pas mieux. La grande question que l’on ne peut pas s’empêcher de se poser, après ces propos élégants, est de savoir s’il sera entendu par le groupuscule de jeunes qui entend contrarier dans les rues, la manifestation de l’opposition. En tout cas, il le faut. Car, le Mali a plus besoin de sérénité que tout autre chose pour traverser la période pré-électorale. Demain, l’on saura si les uns et les autres font la différence entre la démocratie et la guerre. En
attendant, l’on peut déjà qualifier l’appel de la majorité à l’apaisement, d’acte de raison. Et cet appel ne doit pas se limiter aux mots. Il doit se traduire dans les faits et gestes de tous les jours.
La majorité tout comme l’opposition ne doivent pas tomber dans le piège des terroristes
Tous les Maliens doivent d’autant plus intégrer ce comportement, que la Nation est en train de vivre des moments où la moindre étincelle peut se muer en un immense incendie dont les conséquences peuvent facilement être imaginées. En effet, ils sont nombreux et aux aguets, les pêcheurs en eaux troubles au Mali. Si les acteurs politiques du pays, du fait de leurs manigances politiciennes, leur ouvrent une brèche, ils n’hésiteront pas à s’y engouffrer pour envenimer la situation. Et tout le monde connaît l’identité de ces pêcheurs en eaux troubles. Il s’agit de la kyrielle de terroristes qui écument le Nord du pays et qui sont en passe de mettre le Centre du Mali dans le chaos en suscitant et en attisant la haine entre les communautés qui peuplent la zone. De manière générale, il s’agit de l’ensemble des Maliens et des Maliennes qui n’ont pas intérêt à ce que la démocratie se consolide dans leur pays. La majorité présidentielle tout comme l’opposition doivent donc tout faire pour ne pas tomber dans leur piège. Et la meilleure manière de le faire est d’observer scrupuleusement tous les principes de la démocratie et les règles d’un Etat de droit digne de ce nom. C’est le lieu d’inviter tous les jeunes Maliens à plus de discernement et de responsabilité, pour éviter l’instrumentalisation des hommes politiques dont certains, il faut le dire, sont visiblement en panne d’idées. Cette interpellation est d’autant plus pertinente que sous nos tropiques, bien des hommes politiques ne pensent aux jeunes qu’en période électorale. En effet, l’on peut faire le constat que c’est pendant cette période, que les « grins », du nom de ces lieux informels de rencontre de jeunes pour échanger sur tout et parfois sur le sexe des anges, sont arrosés de thé et de sucre, par les partis politiques, de la majorité comme de l’opposition. Comme le disent les Ivoiriens, les jeunes doivent « quitter dans ça ». En tout cas, ils n’ont pas intérêt à jouer le rôle de personnes manipulables à souhait, bref de bétail électoral. Tout le monde est donc invité à la retenue pour sauver la maison commune, c’est-à-dire le Mali.
« Le Pays »