DEMANDE D’EXPERTISE MEDICALE DE L’ETAT DE SANTE D’ALI BONGO : On voit venir les choses
« Il ne faut pas rêver ! » Ainsi titrions-nous dans notre édition du 21 août dernier, lorsque des opposants et des acteurs de la société civile réunis au sein du collectif « Appel à agir », avaient saisi la Justice gabonaise aux fins de se pencher sur l’état de santé du président Ali Bongo. On ne pensait pas si bien dire. En effet, la Cour d’appel de Libreville qui avait jugé la requête recevable dans la forme, faisant ainsi fi du verdict de la Cour de cassation qui avait prononcé une mesure suspensive, vient de ramener le dossier au 2 septembre prochain.
On voit déjà venir les choses puisqu’en première instance, la même requête avait été déjà rejetée. Et ce n’est pas tout. La présidente de la Cour d’appel qui, sans aller au fond, avait jugé la requête recevable, a été suspendue de ses fonctions. Il s’agissait là d’un message fort que le pouvoir gabonais envoyait ainsi à tous les « petits juges » qui seraient tentés de jouer les Zorro. On comprend pourquoi à l’audience d’hier, le quorum n’était pas atteint ; un seul magistrat ayant répondu présent. Ainsi va la Justice dans nos républiques bananières où aller contre la volonté du prince régnant, constitue un crime de lèse-majesté qui mérite d’être sévèrement sanctionné.
Le Gabon n’est ni le Niger, ni le Kenya où l’on a vu des juges prononcer des décisions en défaveur des dirigeants sans que le ciel ne leur tombe dessus
Et ce n’est pas la présidente de la Cour d’appel qui dira le contraire ; elle qui a été sanctionnée pour avoir jugé seulement recevable la requête de l’opposition. Qu’en aurait-il été si elle s’était prononcée en faveur d’une expertise médicale sur l’état de santé du chef de l’Etat ? Sans doute ç’aurait-il été la diète noire. Car le Gabon n’est ni le Niger, ni le Kenya encore moins les Comores où l’on a vu des juges prononcer des décisions en défaveur des dirigeants sans que le ciel ne leur tombe dessus. C’est d’ailleurs cette liberté de ton qui devrait caractériser le juge au nom du sacro-saint principe de la séparation des pouvoirs.
Mais il en va autrement au Gabon comme dans bien d’autres pays du Gondwana où les tribunaux ne sont que des chambres d’enregistrement des désidératas des régimes en place. En tout cas, au regard de sa santé chancelante, l’on a envie de dire qu’Ali Bongo ne rend service ni à lui-même ni au peuple gabonais qui a droit à la vérité. Car, comme on le sait, ils sont nombreux, ses thuriféraires qui, dans l’ombre, travaillent à ce que n’ait jamais lieu cette expertise médicale que réclament l’opposition et la société civile. Mais ils oublient une chose. Ali Bongo est un mortel. Il n’est pas indispensable au Gabon comme il tente de le faire croire. Et l’addiction au pouvoir dont il fait montre, ne l’honore pas ; tant il donne l’impression de ne pas s’imaginer une autre vie en dehors du pouvoir.
B.O