AFRIQUE DU SUD, CHAMPIONNE DU MONDE DE RUGBY:Une couronne ternie par la xénophobie
Dans la matinée du samedi 2 novembre 2019, des milliers de Sud-africains noirs et blancs, devant leur poste téléviseur, et d’autres rassemblés dans la superbe enceinte du stade de Yokohama au Japon, ont suivi avant de célébrer avec joie, le troisième sacre des Springboks, l’équipe nationale d’Afrique du Sud, à la coupe du monde de rugby, un sport qui était exclusivement réservé aux Blancs de ce pays sous le régime ségrégationniste. Une victoire obtenue devant le XV de la Rose, la formation anglaise. Une nouvelle date historique pour la nation arc-en-ciel puisque, comme ce fut le cas en 1995 avec le premier sacre mondial de l’Afrique du Sud, puis en 2007, ce troisième succès rassemble tout un peuple sous un même drapeau.
En 1995, un an après la fin de l’apartheid, les Springboks remportaient leur premier titre mondial et c’est le premier président noir d’Afrique du Sud, Nelson Mandela, qui remettait le trophée au capitaine François Pienaar, un Sud-africain d’origine afrikaner. Si les Sud- africains de couleur blanche se sont toujours succédé au capitanat, vingt-quatre années après, soit près d’un quart de siècle, c’est un premier capitaine noir, Siya Kolisi, qui brandit, pour la toute première fois, le trophée mondial de rugby. Tout un symbole. Comme quoi, il n’y a pas de couleur, de race, pour défendre les couleurs d’une nation. Le rugby vient ainsi d’exprimer la puissance du sport lorsqu’il s’agit de rassembler les fils d’un même pays sans distinction de couleur ni de race. Ainsi, le rugby, autrefois l’un des symboles de l’apartheid, marque aujourd’hui le triomphe de l’union sur les ségrégations.
De sa tombe, Nelson Mandela doit se réjouir mais, en même temps, s’attrister de voir son héritage vendangé par les incessantes chasses à l’homme
Ce titre mondial est une belle revanche pour cette équipe mixte qui a su donner une fantastique réponse à la difficile histoire de ce pays. En plus de la qualité que les Springboks ont à revendre, il leur fallait de la motivation, ce qui n’a pas fait défaut. Mais, au firmament de la gloire, la nation arc-en-ciel doit à présent combattre un démon : cette nouvelle forme d’apartheid qui n’est autre que la xénophobie, marquée par les violences racistes qui s’abattent sur d’autres Africains vivant ces dernières années en Afrique du Sud. Ce qui ternit la couronne obtenue par la nation arc-en-ciel. De sa tombe, Nelson Mandela doit se réjouir de ce troisième sacre mondial mais, en même temps, s’attrister de voir son héritage vendangé par les incessantes chasses à l’homme pratiquées sur des étrangers africains et qui n’honorent pas du tout cette nation.
Antoine BATTIONO