APPELS A LA DIVERSIFICATION DES PARTENAIRES : Éviter les rapports d’aliénation et de domination
Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, une partie de l’opinion suggère, pour ne pas dire, exige la rupture, ici et maintenant, avec le partenaire historique qu’est la France. En lieu et place, cette frange de la population préconise un partenariat presqu’exclusif avec l’Ours russe. Certains d’entre eux n’éprouvent aucune gène à inviter les nouveaux dirigeants à faire appel au groupe russe Wagner du célébrissime Pregojine. Les arguments généralement brandis par les tenants de cette option, sont les suivants. D’abord, ils estiment à tort ou à raison, que le partenariat avec la France, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, manque d’efficacité et de sincérité. D’aucuns même le trouvent trouble et suspect. Ensuite, ils exhibent le cas du Mali pour soutenir le caractère concret, opérationnel et efficace du partenariat avec la Russie. Ils illustrent cela par la livraison au Mali, d’équipement militaires et autres hélicoptères de combat par la Russie. Enfin, ils croient dur comme fer, que « pour éteindre un incendie, on n’a pas besoin d’eau propre ». Ils invoquent cet adage en guise d’objection aux détracteurs de Wagner. Depuis Roch Marc Kaboré en passant par Damiba, jusqu’à Ibrahim Traoré, les tenants de la « Russie ou rien » ne font que donner de la voix à coup de portraits géants de Vladimir Poutine, de drapeaux russes et de pancartes qui encensent le partenariat avec ce pays. Bref, le Burkina est inondé aujourd’hui par une sorte de « russomania » qui interroge et qui fait peur. C’est pourquoi l’on peut se permettre de décliner, ici, le type de partenariat que le Burkina doit nouer, pour autant qu’il aspire véritablement à sortir la tête hors de l’eau dans la guerre que lui imposent les terroristes depuis sept ans.
Les intérêts peuvent amener un pays prétendument ami, à s’installer au Burkina et à travailler à y rester pendant longtemps pour perpétuer ses intérêts
Mais avant, il convient de respecter l’opinion des hommes et des femmes qui, à cor et à cri, réclament la Russie et Wagner. Car, la beauté de la démocratie réside, entre autres, dans la diversité des points de vue. C’est pourquoi l’on peut leur faire observer ce qui suit. Premièrement, les peuples conscients et responsables, jaloux de leur liberté et de leur souveraineté, doivent d’abord compter sur eux-mêmes pour assurer leur sécurité. C’est ce qu’a fait justement l’URSS (Union des républiques socialistes soviétiques) lorsque le pays a été envahi par les Nazis pendant la seconde Guerre mondiale. En effet, alors que les troupes de Hitler ont pris possession du pays, Staline, à l’époque l’homme fort de l’URSS, a sonné le rassemblement de tout le pays. C’est cette mobilisation populaire qui a permis de vaincre la puissante machine militaire allemande. Deuxièmement, face à la problématique de la lutte contre le terrorisme, il est sage de taper à la porte de tous les pays qui sont susceptibles de nous aider de manière sincère. D’emblée, il ne faut donc exclure personne. La sagesse ne recommande-t-elle pas de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier ? De ce point de vue, le Burkina gagnerait à s’ouvrir à la Chine, à la Russie, à la Turquie, à l’Egypte, au Rwanda au Vietnam, à la France et l’on en oublie. En matière de partenariat, peut-on dire, mieux vaut être « polygame » que « monogame ». Il faut donc travailler à diversifier les partenariats dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Et dans l’hypothèse où le partenaire historique nous en empêcherait, il faut se mettre debout et arracher le droit de le faire. Le Rwanda était dépendant exclusivement de la France dans tous les domaines, jusqu’au jour où Paul Kagame a courageusement rompu avec la France et a ouvert son pays à d’autres partenaires. Depuis lors, le Rwanda est respecté par tous les pays, y compris la France. C’est dans ce sens que Thomas Sankara a dit que « l’esclave qui refuse de se débarrasser de ses chaînes, ne mérite pas que l’on s’apitoie sur son sort ». Troisièmement, les porteurs de pancartes pro-russes doivent se rendre à l’évidence que les Russes ne sont pas de bons Samaritains. Ils ne viendront pas nous aider pour nos beaux yeux. Au cas où ils prendraient pied au Burkina, on doit s’attendre à ce que l’addition soit salée. Cette logique n’est pas seulement propre à la Russie, elle s’applique à tous les pays. Car, la guerre, c’est avant tout du business. Et en la matière, il n’y a pas d’état d’âme. Les intérêts donc peuvent amener un pays prétendument ami, à s’installer au Burkina et à travailler à y rester pendant longtemps pour perpétuer ses intérêts. C’est cette raison essentiellement qui fait que la guerre en RDC ne finit jamais, malgré la présence du plus gros contingent onusien dans le monde. La raison est simple : la RDC regorge de grandes richesses. Pour pouvoir piller ces richesses, il faut donc travailler à ce que la guerre ne prenne jamais fin dans ce pays. Car, ce serait la fin des haricots. De ce qui précède, l’on peut aboutir à la conclusion que ce qui fera l’affaire du Burkina dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, c’est la diversification des partenariats. Et dans cette diversification, il faut mettre un point d’honneur à éviter les rapports d’aliénation et de domination. Ibrahim Traoré, le tout nouveau chef de l’Etat à qui une partie de l’opinion demande d’attacher le Burkina au pied de la seule Russie, saura-t-il en tenir compte ? Les jours et mois à venir nous le diront.
Sidzabda