PROJET D’INSTITUTION DU FASO DAN FANI COMME TENUE SCOLAIRE : L’initiative est bonne mais il faut des mesures d’accompagnement
Le ministère de l’Education nationale, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales (MENAPLN) nourrit l’ambition d’instituer la tenue scolaire en Faso Dan Fani et mène, à cet effet, la réflexion en concertation avec les acteurs qui interviennent dans la production du tissu traditionnel. En attendant de voir les conclusions de cette réflexion, l’on peut, déjà, saluer cette idée qui, si elle est menée à terme, vaut son pesant d’or et pour le système éducatif national et pour l’économie du pays. En effet, il ne fait aucun doute que la tenue scolaire en Faso Dan Fani peut inculquer aux apprenants, les éléments irréductibles de leur identité socio-culturelle et développer en eux, le sentiment d’appartenance à leur société et au-delà, à la Nation burkinabè. La tenue scolaire en Faso Dan Fani est donc un ferment du patriotisme ; chose dont le Burkina Faso qui traverse de grands moments de tourments en raison de la grave crise sécuritaire actuelle, a fortement besoin. Pour l’économie du pays, l’institution de cette tenue scolaire participera fortement aux efforts de développement de la filière coton en actionnant le levier de la transformation locale des produits de notre agriculture. Dans la même dynamique, elle constituera un immense coup de fouet pour le secteur de l’artisanat national et de la mode dont une grande partie est portée par les travailleurs et travailleuses du domaine de la confection du tissu traditionnel. Et sans doute aussi, au regard du potentiel en termes de marché de consommation que la tenue scolaire en Faso Dan Fani devrait ouvrir, le projet des autorités du MENAPLN, en se matérialisant, pourrait être une immense source de revenus pour les tisseuses et couturiers du pagne traditionnel et participer à la promotion de l’emploi.
Le MENAPLN doit bien baliser le terrain
Cela dit, l’institution de la tenue scolaire en Faso Dan Fani n’est pas sans soulever des inquiétudes. Et la première des inquiétudes, c’est la question des coûts à supporter par les parents d’élèves. Et cette inquiétude est d’autant plus fondée qu’elle peut entraÏner même des conflits avec la loi. En effet, avec le principe de la gratuité scolaire, aucun élève ne doit être exclu à cause de la tenue scolaire. Il faut donc envisager un mécanisme de subvention de l’Etat qui pourrait permettre de réduire la facture pour les parents d’élèves. L’autre inquiétude est relative aux mesures à prendre pour réduire même les coûts de confection du Faso Dan Fani afin de le rendre disponible. Cette inquiétude pose donc la problématique des taxes à concéder par l’Etat pour permettre aux producteurs du fil, de satisfaire la demande des tisseuses du pagne traditionnel. Il faut donc en amont engager les discussions avec tous les acteurs de la chaîne de la production pour que le projet ne prenne pas du plomb dans l’aide. Enfin, et surtout la dernière et plus grosse des inquiétudes, c’est la peur d’attirer dans un milieu très sensible comme l’éducation, des loups qui n’ont d’yeux que pour les grands marchés et qui pourraient prendre dans l’étau de leurs intérêts, l’éducation des générations futures en otage. Sans nul doute, en effet, que des grands opérateurs économiques lorgnent déjà des yeux, le gros marché qu’ouvre la perspective de l’institution de la tenue scolaire en Faso Dan Fani et élaborent déjà leurs plans pour mettre le grappin dessus. Il faut donc craindre que ce marché ne devienne une foire d’empoigne qui perturbe la sérénité des activités pédagogiques. En tout état de cause, le MENAPLN doit bien baliser le terrain pour que ce projet qui, à bien des égards, contribue à l’atteinte des finalités éducatives édictées par la loi d’orientation de l’éducation et au dynamisme de l’économie nationale, puisse tenir toutes ses promesses.
Sidzabda