FUITE DE RESPONSABILITES : Eh Dieu, laissez la transition tranquille !

Vraiment, il y a des gens dans ce pays-là qui me font beaucoup rire, tant ils manquent de sérieux à tout point de vue. Ils aiment profiter de chaque situation si bien qu’il est difficile de les comprendre. Et puis, ils sont tellement ingénieux qu’ils savent exploiter les occasions pour se tirer d’affaire. De quoi s’agit-il exactement ? Je fais le constat que depuis le départ de Blaise Compaoré du pouvoir, le 31 octobre dernier, un mot revient constamment sur toutes les lèvres : transition. Transition par-ci, transition par-là, si fait que je ne comprends plus rien. A ce propos, je m’en vais vous raconter une anecdote. J’ai vu un couple qui faisait la bagarre, la semaine passée, dans un quartier de Ouagadougou. Je ne vais pas vous dire le nom du quartier parce que certains d’entre vous pourraient reconnaître le couple dont je parle, parce qu’il n’y a jamais eu d’harmonie. Chaque fois, monsieur et madame se regardent en chiens de faïence, on ne sait trop pour quelle raison. Bref ! Ce jour-là, la raison de leur bagarre était la suivante. Madame, en voyant monsieur sortir le matin sans rien dire, lui a demandé l’argent de la popote. En retour, mon cher ami a répondu qu’il avait les poches trouées depuis un certain moment, du fait de la transition. Ce qui a énervé madame qui lui a rétorqué que même avant l’avènement de la transition, il était le même, c’est-à-dire sans le sou. Cette réponse m’a fait sourire pendant toute la journée.
Parce que je me suis rappelé que mon frère Tiiga aussi avait dit à sa femme qu’il n’avait pas l’argent cette année pour lui payer le pagne du 8-Mars, à cause de la transition. Pourtant, même les années antérieures, jamais, à ma connaissance, celui-ci n’avait payé un pagne à sa femme, à l’occasion du 8-Mars. La transition a bon dos. Le matin, transition, à midi, transition, le soir transition ! « On va où là ? »

La transition ne saurait être un alibi à tout

Je me rends compte que quand certains veulent se dérober de leurs responsabilités, ils accusent la transition, comme pour dire que c’est à cause d’elle que les affaires ne marchent pas. Mon œil ! Ce n’est pas vrai. Même avant la transition, certains, dans ce pays-là, étaient connus pour être de faux types, tant ils ne respectent pas leurs engagements. Ce n’est pas normal. Car je sens que les gens en abusent maintenant. Si fait que même ceux qui devaient de l’argent à d’autres prétextent de la transition pour ne plus payer. D’autres aussi ne paient plus leurs employés, sous prétexte que les nouvelles autorités ont fermé le robinet, austérité financière oblige. Oh, braves gens, où allons-nous avec une telle mentalité ? Arrêtons de mentir aux autres, car la vérité va nous rattraper. Puisque, comme on le dit, le mensonge a beau courir les rues, la vérité finira un jour par le rattraper. Je le dis, parce que certains oublient que la transition finira un jour et qu’ils n’auront plus de prétexte à avancer pour fuir leurs responsabilités. Et voilà leur c…dehors ! Pourquoi donc reporter à demain ce que l’on peut faire aujourd’hui sans contrainte ? Ne faisons pas de la transition un bazar qui doit recevoir toutes nos camelotes à vendre aux gens. C’est injuste et abject. Je suis d’accord que certaines sociétés ont ressenti ou continuent de ressentir les contrecoups de la chute de Blaise Compaoré, parce qu’elles étaient portées à bout de bras par l’ancien système, mais de là à faire de la transition le prétexte à tout, je dis non ! La transition ne saurait être un alibi à tout. Il faut laisser la transition tranquille. Car, à l’allure où vont les choses, au-delà du fait que « plus rien ne sera comme avant », j’ai envie de dire que « plus rien ne sera normal dans ce pays » et ce, même après la transition. En tout cas, moi, fou, je ne veux plus entendre dire que quelqu’un a fui ses responsabilités, en accusant injustement la transition pour laquelle je prie nuit et jour. Que croyez-vous ? Même devenu fou, je vais au culte tous les vendredis et dimanches parce que pour moi, Dieu est à la fois à la mosquée et à l’église.

« Le Fou »