SUSPENSION D’IMPORTATION DE POUSSINS DE CHAIR : Pourvu que le consommateur y trouve son compte
C’est une décision qui concerne un secteur où interviennent plusieurs acteurs avec des intérêts aussi divers que divergents. Il s’agit de la mesure interdisant l’importation des poussins de chair. Cette décision émane du ministère en charge des ressources animales qui a annoncé, dans un communiqué publié le 3 octobre dernier, la suspension temporaire de la délivrance des autorisations d’importation de ces espèces, toutes races et souches confondues, dans notre pays. La mesure, selon le ministère, vise non seulement à renforcer la souveraineté alimentaire, mais surtout à consolider la filière avicole nationale. De ce point de vue, on peut dire que l’ambition est toute noble. D’autant plus qu’elle contribue à encourager et à booster la production locale dans un secteur où la demande est constamment forte. Et elle cadre parfaitement avec la vision des plus hautes autorités du pays qui travaillent à faire du “consommons local”, non pas un slogan creux, mais une réalité. Ainsi, après la labélisation du poulet bicyclette qui visait déjà à valoriser ce produit local de qualité prisé par les Burkinabè, cette nouvelle mesure s’annonce comme une étape supplémentaire franchie dans l’ambition affichée par nos gouvernants, de privilégier la consommation des produits issus de l’élevage national. La mesure est d’autant plus à saluer qu’elle permettra de mettre en valeur nos producteurs locaux, de créer des emplois avec les fermes qui vont augmenter leur niveau de production, et subséquemment, les prix pourraient connaître une baisse pour le plus grand bonheur des consommateurs.
Il est très important que le gouvernement mette l’accent sur le contrôle des prix et de la qualité
Cela dit, on ne peut s’empêcher d’avoir des appréhensions face à cette mesure d’interdiction d’importation des poussins de chair, qui est tombée comme un couperet. En effet, si cette mesure protectionniste vise à développer la filière avicole nationale, le terrain est-il suffisamment préparé pour que les fruits tiennent la promesse des fleurs? Cette mesure ne va-t-elle pas contribuer, à la longue, à rendre le poulet moins accessible sur le marché, quand on sait que bien de nos producteurs locaux dépendent fortement de ces poussins de chair importés d’autres pays? Cette question est d’autant plus fondée que les poussins locaux coûtent non seulement chers, mais aussi sont difficiles à trouver sur le marché. Aussi, en mettant désormais l’accent sur la production locale, est-on en mesure de maîtriser un éventuel cas d’envolée des prix sur le marché ? Dans nos pays, les produits locaux coûtent souvent plus chers que ce qu’on importe de l’extérieur. Si cela peut, dans une certaine mesure, se comprendre, parce que la production a forcément un coût, il n’en demeure pas moins que certains producteurs dépassent parfois les bornes du bon sens. Et comme toujours, ce sont les pauvres consommateurs qui en font les frais. Une chose est indéniable : avec la nouvelle mesure, on a la latitude de s’assurer de la qualité de ce qu’on produit; chose qu’on ne pouvait pas réussir parfaitement avec les produits importés. Mais le plus important demeure le consommateur. Et il faut protéger à tout prix ses intérêts. Dans ce sens, le gouvernement a-t-il une vision holistique pour contrôler les coûts ? On ose croire qu’il y a déjà pensé. Autrement, cette mesure risque fort d’entraîner une augmentation des prix, avec certains producteurs ou commerçants qui n’hésiteront pas à faire de la surenchère. C’est pourquoi il est très important que le gouvernement mette l’accent sur le contrôle des prix et de la qualité de ce qui sera produit afin que le consommateur pour qui cette mesure a été prise, puisse y trouver son compte.
SIDZABDA
