AFFAIRE D’AGRESSION DE DEUX JEUNES A PISSILA : Les victimes réagissent, le présumé coupable dans le mutisme
Une affaire houleuse a fait couler beaucoup d’encre dans la commune de Pissila, située à une trentaine de kilomètres de Kaya. Il s’agit d’un enseignant du nom de Abdoulaye Sawadogo dit « Eto’ » qui aurait tabassé deux jeunes : un commerçant du nom de Jean Baptiste D. Ouédraogo dit JB et Amado Sebgo, étudiant et gérant de maquis. Tout serait parti d’une histoire de fesses. « Faux ! Tout ce que je sais, c’est qu’il a mon crédit de 20 000 F CFA », a nié JB. Les blessés et leurs proches nous ont approchés le lundi 5 février 2018 pour nous donner leur version des faits. Ils en ont profité pour exprimer leur inquiétude par rapport à la lenteur du dossier au commissariat de Police où ils ont déposé plainte pour « coups et blessures volontaires ». Nous revenons donc sur cette affaire qui continue de défrayer la chronique à Pissila. Selon eux, il y a du flou sur cette affaire qui n’a que trop duré, car les faits remontent au 15 janvier 2018. Nous avons voulu confronter les points de vue en contactant par téléphone l’enseignant Abdoulaye Sawadogo qui n’a pas voulu s’exprimer sur la question. Lisez !
Les faits se sont déroulés le 15 janvier 2018 aux environs de 20h dans la commune de Pissila, située à une trentaine de kilomètres de Kaya. Jean Baptiste D. Ouédraogo dit JB, commerçant et le plus gravement blessé, retrace le film des évènements qui se sont passés en deux jours.
Acte 1 : les faits du 15 janvier 2018
« Je suivais un match de football dans un vidéo-club. Aux environs de 20h, Eto’ (Ndlr : surnom de l’enseignant) y est entré me dire qu’il veut me voir. Je le connais bien. Mais, on s’était vu il y a de cela 6 jours. Il a mon crédit de 20 000 F CFA il y a de cela 4 ou 5 mois. Je lui ai même dit de prendre son temps pour me rembourser. Un jour, quand je lui ai demandé de me remettre mon argent, il m’a répondu qu’il n’en a pas et qu’il fallait que je patiente jusqu’à la fin du mois. Je lui ai dit qu’il n’y a pas de problème. Mais, en venant au vidéo-club, je ne savais pas qu’il était venu dans l’intention de me faire du mal. Il avait dans sa main un gros caillou. Tout à coup, je reçus un coup sur mon visage. Je suis tombé raide, évanoui et maculé de sang. Il m’a piétiné la poitrine avec ses chaussures. J’ai compris qu’il était venu pour me tuer. J’ai tenté de me relever après avoir retrouvé mon souffle. Je ne comprenais rien. J’ai donc pris la fuite à l’intérieur du vidéo-club. Heureusement, Dieu merci, j’ai eu la vie sauve grâce à l’intervention de la foule qui suivait le match. J’ai donc été évacué d’urgence au CSPS de Pissila où j’ai eu les premiers soins. » Sur la question du mobile de l’agression, comme quoi il aurait eu maille à partir avec l’enseignant pour une histoire de fesses, JB répond : «C’est bien vrai que les rumeurs disent que je sors avec sa copine. Mais c’est faux. Il n’en est rien. Je n’ai jamais courtisé sa copine. D’ailleurs, nous n’avons même pas de lien d’amitié quelconque. Ce ne sont que des rumeurs. Tout ce que je sais, c’est qu’il a mon crédit».
Après l’agression de JB, l’enseignant est allé s’en prendre à Amado Sebgo, étudiant et gérant de maquis. Et voici le témoignage de ce dernier : « J’étais dans mon lieu de travail dans la même soirée des faits quand l’enseignant en question est arrivé. Etant donné qu’il avait l’habitude de venir prendre ses pots chez nous, personne ne pouvait imaginer qu’il pouvait poser un tel acte de violence. Quand il est arrivé, j’étais installé dans la maison. Il y est entré furtivement comme d’habitude quand il vient pour boire. Tout d’un coup, j’ai reçu un coup de poing sur mon nez qui a commencé à saigner. Je me suis retrouvé à terre. En voulant me relever, il m’a asséné des coups sur mes joues avant de repartir. Je me suis débrouillé pour sortir de la maisonnette et c’est à ce moment que j’apprends que mon ami JB a été aussi agressé par le même enseignant. Je me suis rendu au CSPS de Pissila pour des soins où j’ai vu JB qui avait un visage méconnaissable». Le gérant de maquis, Amado Sebgo, meilleur ami de JB, a aussi fait savoir qu’Eto avait emprunté 18 000 F CFA auprès de lui et qu’il n’a pas remboursé.
Acte 2 : Les faits au CHR de Kaya le 16 janvier 2018
Du CSPS de Pissila, les deux blessés ont été transportés au CHR de Kaya au vu de l’ampleur de leurs blessures. Ils ont eu à faire deux examens radio.
Selon Issa Ouédraogo, grand frère de JB, les différents certificats médicaux délivrés par le médecin soignant au CHR de Kaya mentionnent des « coups et blessures volontaires » sur JB et son ami Amado Sebgo. Les deux blessés sont toujours en soins et dans l’incapacité de travailler : 14 jours d’indisponibilité pour JB et 6 jours pour Amado Sebgo. Et toujours selon lui, cela n’est pas sans conséquence sur le rendement financier des deux jeunes.
Le présumé coupable joint au téléphone n’a pas voulu s’exprimer
Les deux blessés ont déposé une plainte contre l’enseignant au commissariat de Police de Pissila pour « coups et blessures volontaires » avec incapacité de travailler. Nous avons tenté d’obtenir à deux reprises par téléphone la version de l’enseignant, le mercredi 7 et le jeudi 8 février 2018. Mais ce dernier n’a pas voulu se prononcer sur cette affaire. Il s’est contenté de nous répondre tout simplement en ces termes : « J’ai dépassé ce stade, je n’ai rien à dire sur cette affaire. J’ai été auditionné au commissariat de Police de Pissila. Et le dossier y est traité. Je n’ai plus un mot à dire ». A l’en croire, il semble ne pas se reconnaître dans les plaintes déposées par les deux blessés.
Impatient de voir que jusqu’à présent cette affaire traîne toujours entre les mains de la Police, Issa Ouédraogo, frère d’un des blessés, s’insurge : « Le fait que les enquêtes demeurent toujours dans le silence nous inquiète énormément. Nous ne sommes pas du tout contents. Nous craignons une manipulation. Nous sommes conscients du rôle de sécurisation que joue un commissariat dans une commune comme celle de Pissila. Mais pourquoi un tel silence autour de cette affaire ? Nous aurions voulu qu’après l’audition de l’enseignant, que l’affaire soit transférée à la Justice et que des sanctions soient prises à la hauteur du forfait de l’agresseur ».
L’instituteur Abdoulaye Sawadogo, quant à lui, semble tourner cette page pendant que les proches des victimes demandent une seule chose : « La vérité, rien que la vérité et que la Justice doit être au service de tous les Burkinabè sans distinction aucune », a fait savoir Issa Ouédraogo.
Madi OUEDRAOGO (Correspondant)
Silowé
/
Un médecin n’est pas qualifié pour écrire “Coup/s et blessure/s volontaires…” sur un certificat médical. Son rôle est de constater l’état d’une (des) blessure/s et soigner le patient. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond ici, chez les deux présumés victimes.
13 février 2018