ALFRED GOUBA, SECRETAIRE D’ETAT EN CHARGE DE LA DECENTRALISATION : « Nous souhaitons avoir des référentiels fiables. C’est pourquoi nous impliquons tous les acteurs »
Après plus de deux décennies de mise en œuvre du processus de décentralisation et à la lumière des pratiques et des réalités de terrain, le gouvernement, à travers les ministère en charge de la décentralisation, veut définir « une vision prospective de la décentralisation » débouchant sur « une politique nationale de la décentralisation » qui, a son tour, doit déboucher sur une « stratégie». Ainsi, le Secrétariat permanent de la Conférence nationale de la décentralisation (SP/CONAD) relevant dudit ministère, avec l’appui de consultants, de personnes- ressources et de cadres de départements ministériels, a organisé un atelier d’examen du document provisoire de ladite vision par les membres des Groupes de travail sectoriels (GTS). C’était du 24 au 26 août 2016 à Koudougou.
Réputée être fondatrice du socle d’un véritable développement humain durable, le Burkina Faso s’est résolument engagé dans le processus de la décentralisation depuis juin 1991 avec sa constitutionnalisation. Ainsi, après plus de deux décennies de la mise en œuvre de l’organisation du territoire en collectivité territoriales et la participation démocratique des populations à la libre administration des collectivités territoriales, des défis demeurent. Ces défis sont dus, entre autres, à certains paramètres, nonobstant les acquis relevés par le rapport de l’état des lieux et celui de l’évaluation finale du Cadre stratégique de mise en œuvre de la décentralisation (CSMOD). Il s’agit de la faible participation citoyenne, de l’insuffisante prise en compte de la dimension économique dans le processus, de la faible capacité d’autofinancement des collectivités territoriales, de l’inexistence d’une politique nationale exprimant la vision à long terme de la mise en œuvre de la décentralisation. Ces difficultés ont amené le gouvernement, selon le SP/CONAD, Idrissa Koanda, à travers le ministère en charge de la décentralisation et sous la houlette du SP/CONAD, a engagé la réflexion pour la construction de nouveaux référentiels en vue de la définition d’une vision prospective de la décentralisation. Ce, avec l’appui de pools de consultants et des cadres de départements ministériels. Et vu la transversalité de la politique de la décentralisation, les acteurs sectoriels ont échangé sur les scenarii et les stratégies proposés pour la vision consignée dans un document par les consultants, du 24 au 26 août 2016 à Koudougou à l’hôtel Beneb Souka. Globalement, au cours de cet atelier, les échanges se sont focalisés sur les scénarii « possibles », puis « globaux », les composantes de la vision prospective de la décentralisation, ses éléments de stratégies, opportunités et risques de mise en œuvre. « Après l’échéance de la réflexion des experts, il était nécessaire que nous échangions avec les différents acteurs sectoriels sur les propositions qui ont été faites, car, la construction de ces référentiels se présente sur une démarche de co-production et participative », a laissé entendre le SP/CONAD. Et le secrétaire d’Etat auprès du ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité intérieure, chargé de la décentralisation, Alfred Gouba, d’ajouter qu’ « en impliquant tous les acteurs, c’est une manière de dire aux autres ministères que la décentralisation est l’affaire de tous ». Outre cela, notre souhait, poursuit-il, est de proposer des référentiels fiables. Et à l’étape actuelle du processus, le secrétaire d’Etat a relevé que le processus est en bon chemin. « Même s’il y aura des difficultés, ça sera peut-être au niveau de sa mise en œuvre », signale-t-il. En effet, l’exercice de formulation de la vision est basé sur l’analyse des problématiques dégagées de l’état des lieux de la décentralisation. A cet effet, ces problématiques ont été regroupés en cinq axes thématiques que sont : « la capacité de délivrance de services publics locaux par les collectivités territoriales » ; « le financement de la décentralisation » ; « le développement local et l’harmonisation du développement territorial » ; « l’enracinement de la démocratie locale » ; « la coordination et le suivi du processus de centralisation ». Sous l’encadrement du SP/CONAD, les travaux se sont déroulés sous forme de séances plénières et de séances en groupe, soit trois groupes définis dans l’arrêté n°2016-009/PM/CAB. Lors de la première plénière, les participants ont formulé des hypothèses d’évolution et caractérisé les scénarii suivant l’axe thématique « gouvernance locale », sans omettre les contenus respectifs des deux référentiels complémentaires constitutifs de «la vision prospective de la décentralisation » et de « la politique nationale de la décentralisation ». Ensuite, s’en est suivi les travaux en groupe où chacun selon son axe thématique, à savoir la délivrance des services publics locaux, le développement économique local et l’harmonisation du développement territorial, et le financement de la décentralisation, a examiné trois à cinq problématiques. Quant à la dernière plénière, elle a été l’occasion de partager et de programmer l’exploitation des résultats des travaux de groupes par les parties prenantes au sein de leurs administrations respectives, avant leur communication au SP/CONAD pour exploitation avec le pool d’experts dans la finalisation du référentiel « vision prospective ». Selon le conseiller technique du ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité intérieure, Kalifara Séré, les objectifs globaux de l’atelier ont été atteints. « Dans l’ensemble, les travaux se sont bien déroulés. Peut- être on aurait pu faire mieux, mais sur un plan purement programmatique, l’essentiel du chantier est rempli à cette étape », dira-t-il, avant d’ajouter que l’essentiel est d’assurer maintenant un suivi pour consolider les matériaux que nous venons de rassembler à Koudougou. En outre, il s’agira, toujours selon lui, de faire en sorte que les représentants deviennent véritablement des points focaux sur le processus et assurent le portage à l’intérieur des politiques sectorielles. Toute chose qui permettra aux différents responsables tels les secrétaires généraux des ministères et les ministres, de prendre à bras-le-corps ces référentiels en construction, sinon, est-il convaincu, s’ils ne sont pas inclusifs de l’ensemble des politiques, il y aura un problème de légitimation de la décentralisation, car la particularité de cette vision est qu’elle est mieux structurée du point de vue juridique et stratégique. Pour le moment, il faudrait attendre jusqu’à fin novembre 2016 pour avoir une version finale de ces référentiels qui, normalement, doivent être validés lors de la prochaine conférence nationale de la décentralisation.
Modeste BATIONO