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AN II DU MASSACRE DE KHARTOUM


Le 3 juin 2019, des dizaines de manifestants pacifiques rencontraient la mort alors qu’ils protestaient pacifiquement contre la récupération de la révolution par les militaires. La brutalité de la soldatesque avait ému tant l’opinion nationale que la communauté internationale. Elle avait d’autant plus suscité l’indignation que les Soudanaises et les Soudanais qui ont pris part à la révolution, avaient fondé l’espoir que la chute du boucher de Khartoum, Omar El Béchir, marquerait l’avènement d’un régime arrimé au respect des droits humains. Leur désenchantement fut grand, quand les forces de sécurité ont ouvert le feu sur un sit-in, tuant plus de  100 manifestants et en blessant des dizaines d’autres. Les nouveaux maîtres de Khartoum avaient alors promis la création d’une commission d’enquête nationale chargée de faire la lumière sur les allégations de violation des droits de l’Homme le  3 juin 2019 et l’ouverture d’autres enquêtes pour des crimes commis dans le passé. Deux ans après le drame, aucun début de manifestation de la vérité. C’est contre cet état  de fait que des experts indépendants de l’ONU (Organisation des nations unies) ont déclaré, le 3 juin 2021, que la reddition des comptes et la justice pour les victimes du massacre du 3 juin 2019 de manifestants pacifiques à Khartoum, sont indispensables pour que le pays aille dans le sens d’une démocratie pacifique. L’on peut, d’emblée, rendre hommage aux experts indépendants qui ont signé cette déclaration. Car, sans de tels actes, beaucoup de crimes risquent d’être ensevelis par le temps. Mais, l’on peut se poser la question de savoir si cette sortie des experts indépendants de l’ONU, peut véritablement faire bouger les lignes dans le sens d’une manifestation de la vérité à propos de l’attaque meurtrière du 3 juin 2019.

 

La communauté internationale doit prendre les exigences des experts indépendants de l’ONU à son compte

 

 

 Car, il est vrai que Béchir est parti mais bien des généraux qui l’ont accompagné tout au long de ses 30 ans de règne sanglant sur le Soudan, sont encore au pouvoir à Khartoum. Et ces gens-là ont été formatés par des habitudes et des pratiques qui sont  aux antipodes du respect des droits humains. En réalité, ils sont imperméables au langage du respect des droits de l’Homme. Ils ont juste suivi le sens du vent de la révolution pour ne pas subir le sort de leur ancien mentor. L’on peut même se poser la question de savoir s’ils n’ont pas fait cette révolution de palais pour éviter d’être eux mêmes emportés par la bourrasque révolutionnaire. Ce qui aurait entraîné vraisemblablement des réformes démocratiques significatives au Soudan.    De ce point de vue, l’on peut être sceptique quant à leur volonté réelle d’enquêter sur le cas du 3 juin 2019 en particulier et quant à l’ouverture d’autres enquêtes pour des crimes commis dans le passé en général.  Les experts indépendants de l’ONU ont également évoqué la situation spécifique des femmes victimes notamment d’abus et de violences sexuels. Sur ce sujet aussi, l’on ne peut rien attendre de bon de la part de bien des autorités militaires qui gèrent le pouvoir aujourd’hui au Soudan, pour la simple raison que certains d’entre eux pourraient avoir fait partie des donneurs d’ordres au moment des faits. La personne sur laquelle on peut compter pour véritablement arrimer le Soudan post-Béchir aux principes de base de l’Etat de droit, est le Premier ministre civil, Abdallah Hamdok. Mais tout porte à croire que les marges de manœuvre  de ce dernier sont très réduites. Il revient donc au peuple soudanais d’ouvrir l’œil et le bon de sorte à ce que sa révolution, pour laquelle son sang a été versé, ne soit pas bradée par des nostalgiques du régime de Omar El Béchir. La communauté internationale qui, aujourd’hui, est en train de délier les cordons de la bourse pour accompagner la transition au Soudan vers la démocratie, doit également faire pareil au risque de voir ses efforts voués à l’échec. C’est pourquoi elle doit, ici et maintenant, prendre les exigences des experts indépendants de l’ONU à son compte. Par-là, elle peut mettre la pression sur les autorités militaires aux affaires au Soudan  pour les obliger à tourner définitivement la page des pratiques d’Omar el Béchir. C’est à ce prix que la révolution soudanise n’aurait pas été inutile.

 

Pousdem PICKOU

 


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